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avoir [1]

vt (a-voi. Au XVIe s. on écrivait aurai, auras, etc. mais on prononçait, d'après Bèze, arai, aras, etc. Au XVIIe s. d'après Dangeau, ayant, ayons, ayez se prononçaient a-iant, a-ions, a-iez. Aujourd'hui, c'est une prononciation fautive : il faut dire éiant, é-ions, é-iez. À Paris le peuple prononce eü ou evu au lieu de u [eu] ; c'est un archaïsme sur lequel on débattait encore au XVIIe siècle ; la prononciation u est aujourd'hui la seule correcte), j'ai, tu as, il a, nous avons, vous avez, ils ont ; j'avais ; j'eus, nous eûmes ; j'aurai ; j'aurais ; aie, ayons, ayez, qu'ils aient ; que j'aie, que tu aies, qu'il ait, que nous ayons, que vous ayez, qu'ils aient ; que j'eusse, que nous eussions ; ayant ; eu, eue
  • 1Posséder un objet physique, posséder quelqu'un ou quelque chose dans un certain état. Il a une propriété patrimoniale sur notre commune. Il faut user de ce qu'on a. Avoir de la fortune. Avoir des alliés. N'avoir pas d'enfants. Il n'a pas d'argent. N'avoir rien. Il eut un père très illustre. Et de quelques bons yeux qu'on ait vanté Lyncée, Il en a de meilleurs. [Malherbe, II, 12] Il a l'oreille rouge et le teint bien fleuri. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur] J'ai pour aïeul le père et le maître des Dieux. [Racine, Phèdre] J'aurais à cette heure de quoi vous écrire un beau poulet. [Voiture, Lettres]

    Familièrement. Avoir de quoi, être dans l'aisance.

  • 2Porter, tenir. Avoir à la main une coupe, une boîte. Ayant un casque sur la tête. Il n'avait pas de canne en venant.

    En termes de jeux, avoir la boule, le dé, etc. Être en tour de jouer ou être le premier à jouer.

  • 3 Fig. Posséder une chose immatérielle, une qualité ; éprouver une sensation ou un sentiment ; être dans un état ; être âgé de ; être d'une dimension de. Qu'avez-vous ? c'est-à-dire quelle est votre émotion ? Avoir droit sur quelque chose. Avoir la paix. Avoir dans l'esprit. J'ai l'intention de. J'ai une opinion tout à fait opposée. Les hommes qui ont de la prudence. Ces gens ont coutume de. J'ai eu de la peine à me contenir. Avoir mal à la tête. Il avait vingt ans. Rue qui a 10 m. de large. Ces enfants.... Ayant Dieu dans leur coeur ne le purent louer. [Malherbe, I, 4] Et, pourvu qu'il soit cru, nous n'avons maladie Qu'il ne sache guérir. [Malherbe, II, 12] Mais serait-ce raison qu'une même folie N'eût pas même loyer. [Malherbe, ib.] Tu as donc familiarité avec le prince d'Ithaque. [Molière, La princesse d'Élide] Le désir se fait mieux sentir parce qu'il a de l'agitation et du mouvement. [Bossuet, Oraisons funèbres] Qu'avez-vous donc, dit-il, que vous ne mangez point ? [Boileau, Satires] J'ai beaucoup de plaisir à voir les choses que j'avais imaginées. [Voiture, Lettres] Ayant un empire absolu sur les esprits. [Boileau, Réflexions critiques sur Longin] Ah ! n'aie point pour moi si grande indifférence. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] Je vous écris à la vue de la terre de Barbarie, et il n'y a entre elle et moi qu'un canal qui n'a pas plus que trois lieues de largeur, bien que ce soit l'Océan et la mer Méditerranée tout ensemble. [Voiture, Lettres] Le fer qui les tua [des enfants] leur donna cette grâce Que, si de faire bien ils n'eurent pas l'espace, Ils n'eurent pas le temps de faire mal aussi. [Malherbe, I, 4] Quand j'avais de ma foi l'innocence première, Si la nuit de la mort m'eût privé de lumière, Je n'aurais pas la peur d'une éternelle nuit. [Malherbe, ib.] Eh bien ! ne mangeons plus de chose ayant eu vie. [La Fontaine, Fables] Ce qu'il y a eu en lui de plus éminent, c'est l'esprit qu'il avait sublime. [La Bruyère, 1] Trouvant que j'avais peu de latin, il entreprit de m'en enseigner davantage. [Rousseau, Les confessions] Oui, monsieur, seulement pour vous faire peur, et vous ôter l'envie de nous faire courir toutes les nuits, comme vous aviez de coutume. [Molière, Les fourberies de Scapin] Que, depuis quarante-deux ans qu'il servait le roi, il avait la consolation de ne lui avoir jamais donné de conseil que selon sa conscience. [Bossuet, Oraisons funèbres]

    Par analogie il se dit des choses. Cette ville a de beaux édifices. Cette maison a beaucoup de locataires. Ah ! sire, un tel honneur a trop d'excès pour moi. [Corneille, Horace] Si tu l'aimes encor, ce sera ton supplice. - Je n'en murmure point, il a trop de justice. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] Lorsque l'obéissance a tant d'impiété, La révolte devient une nécessité. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] Seigneur, quand ce dessein aurait quelque justice. [Corneille, Nicomède] Ce projet qui pour vous est tout brillant de gloire, N'aurait-il rien pour moi d'une action trop noire ? [Corneille, Sertorius] Un moment de sa perte a pour moi des supplices. [Corneille, ib. III, 4] Toutes les autres morts n'ont mérite ni marque ; Celle-ci porte seule un éclat radieux. [Malherbe, II, 12] Les sceptres devant eux n'ont point de priviléges. [Malherbe, ib.] À ce coup nos frayeurs n'auront plus de raison, Puisque par vos conseils la France est gouvernée. [Malherbe, IV, 2]

  • 4Trouver, rencontrer. Nous avons des gens capables d'exécuter votre projet. En te perdant j'ai sur qui me venger. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] J'avais pour de tels coups certaine vieille en main. [Molière, L'école des femmes] Et quand on a quelqu'un qu'on hait ou qui déplaît, Lui doit-on déclarer la chose comme elle est ? [Molière, Le misanthrope]
  • 5Se procurer, acquérir, obtenir, gagner, acheter. Ce qu'on a pour de l'argent. On a quatre pommes pour dix sous. On ne peut rien avoir de cet ouvrier. La cabale s'est réveillée aux simples conjectures qu'ils ont pu avoir de la chose. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] Et que j'avais de quoi le connaître. [Pascal, dans COUSIN] Il a trouvé le moyen de faire avoir des bénéfices sans argent. [Pascal, Les provinciales]
  • 6Avoir à, suivi d'un infinitif, être chargé du soin de, être dans le cas de. Avoir une terre à cultiver. Il a de grands travaux à exécuter. Je n'ai absolument rien à vous écrire. Je n'ai rien à craindre. J'ai eu à choisir. Comme il y a toujours une grande différence entre les choses qui ont à être et celles qui sont en effet.... [Voiture, Lettres] Vous avez à combattre et les dieux et les hommes. [Racine, Iphigénie en Aulide] J'ai votre fille ensemble et ma gloire à défendre. [Racine, ib. IV, 7] Que je serais heureux si j'avais à le faire. [Racine, Bérénice] Son pouvoir n'ayant plus à s'étendre plus loin, Il brise l'instrument dont il n'a plus besoin. [Rotrou, Bélisaire] Il fut ensuite au sénat, et il demanda qu'on eût, par un sénatus-consulte, à dégager sa parole et à abolir toutes les dettes. [Vertot, Histoire des révolutions arrivées dans le gouvernement de la République romaine] Le sénat lui ayant fait dire [à Mithridate] qu'il eût à retirer ses troupes de toutes ces provinces. [Vertot, ib. liv. X, p. 33] On publia le décret du sénat qui ordonnait qu'on eût à les poursuivre aux dépens du public. [Vertot, ib. liv. X, p. 45] Il nous fait remarquer que nous ayons à lui préparer les voies. [Massillon, Délai.]

    N'avoir qu'à, n'avoir rien autre chose à faire que de. Vous n'avez qu'à lever les yeux. Vous n'avez qu'à dire un mot, et la chose sera faite.

  • 7Avoir de, tenir de, avoir reçu de. J'ai cette terre du chef de mon père. De qui avez-vous la nouvelle ?
  • 8Engendrer, créer. Il avait des enfants de ses deux femmes. Elle a un fils du roi. [Sévigné, 216]
  • 9Imiter, reproduire. Avoir les traits de quelqu'un. Elle n'avait d'une femme que le corps. Il a tout votre air. Avoir la couleur du minium.
  • 10Avoir pour, regarder comme. Avoir pour suspecte la vertu même. [La Bruyère, 13] Et je vous supplierai d'avoir pour agréable Que je me fasse un peu grâce sur votre arrêt. [Molière, Le misanthrope] Eh bien, mes souverains, aurez-vous agréable Que, n'ayant pu la voir en sa fin lamentable, Nous la fassions au moins apporter devant nous ? [Mairet, Sophonisbe]

    Avoir quelqu'un, quelque chose pour soi, l'avoir en sa faveur. Ils ont pour eux la justice. Elle a pour elle sa beauté. Il suffit que ta cause est la cause de Dieu, Et qu'avecque ton bras elle a, pour la défendre, Les soins de Richelieu. [Malherbe, II, 12]

  • 11Avoir la parole dans une assemblée, avoir la permission de parler.
  • 12Avoir quelqu'un à dîner, lui donner à dîner. Il a eu beaucoup de monde à son bal.

    Avoir quelqu'un avec soi, être avec quelqu'un, en être accompagné. Il avait un ami avec lui.

  • 13Avoir une femme, obtenir ses faveurs. C'est une expression libre et de mauvaise compagnie.
  • 14En avoir, gallicisme qui signifie être irrité contre, songer à. Je ne sais à qui il en avait. [Sévigné, 173] Je ne sais à qui en ont vos femmes avec leurs voeux. [Sévigné, 511] Je lui demandai à qui elle en avait de se vouloir ruiner. [Sévigné, 441] À qui en as-tu donc, ou si c'est aux anges que tu ris ? [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont]

    Vous en aurez, expression de menace, vous serez puni, maltraité.

    En avoir dans l'aile, être atteint de quelque perte, de quelque accident grave.

  • 15Avoir, verbe auxiliaire dans la conjugaison. J'ai dit. Il avait ordonné. Je crois avoir entendu dire. Ce qui a été dit par vous. L'événement ne m'a pas trompé.
  • 16Avoir se prend impersonnellement avec le pronom y dans beaucoup de locutions. Il y a, il existe. Il y aura des vices tant qu'il y aura des hommes. Il y en a qui pensent.... Il y eut beaucoup de sang versé. Il y a de la honte à.... Il y a longtemps que.... Y a-t-il rien de plus indigne ? Pourvu qu'il y ait assez d'argent. Peut-il y avoir des doutes en une question si claire ? Il y aurait de la folie à douter d'une vérité si universellement reconnue. [Boileau, Réflexions critiques sur Longin] Il faut convenir que ces Juifs sont des hommes comme il n'y en a point. [Diderot, Nouv. max. Phil. 25]

    Il n'y a qu'à parler, c'est-à-dire il suffit de parler.

    Il n'y a qu'à pleuvoir, c'est-à-dire la pluie peut survenir.

    Familièrement. Ô vent donc, puisque vent y a, Viens dans les bras de notre belle. [La Fontaine, Fables] Madame, puisque madame y a. [Molière, George Dandin]

    Tant y a, quoi qu'il en soit. Vous me vantez cet homme ; tant y a que je ne veux pas le voir. Tant y a qu'il n'est rien que votre chien ne prenne. [Racine, Les plaideurs]

    Y ayant, puisqu'il y a, comme il y a. N'y ayant qu'une vérité de chaque chose. [Descartes, Discours de la méthode] Rapsodie veut dire un amas de vers qu'on chantait, y ayant des gens qui gagnaient leur vie à les chanter. [Boileau, Réflexions crit. n° 2] C'est ainsi que tous les interprètes ont expliqué ces mots.... y en ayant même qui ont mis à la marge du texte grec.... [Boileau, ib.] N'y ayant rien de si inconcevable. [Pascal, dans COUSIN]

  • 17S. m. terme de commerce. Avoir du poids, nom que les Anglais donnent à la livre de seize onces.

    PROVERBE

    Il n'est rien de tel que d'en avoir, c'est-à-dire si l'on n'a pas de bien, on n'est pas considéré.

REMARQUE

1. Faut-il dire : il y eut cent hommes tués, ou bien, il y eut cent hommes de tués ? L'usage aujourd'hui est d'employer de quand le substantif est sous-entendu ou qu'il est remplacé par le pronom en, et de supprimer de quand le substantif précède l'adjectif ou le participe ; ainsi on dira : il y eut cent hommes tués, et deux cents de blessés.

2. Les ennemis que j'ai eus à combattre, et les ennemis que j'ai eu à combattre. Il y a entre les deux locutions une distinction qui, quelquefois à peine sensible, l'est d'autres fois assez pour qu'on veuille choisir. Dans le premier cas, j'ai eu des ennemis, et je les ai combattus ; dans le second, il m'a fallu combattre des ennemis.

3. C'est une faute très grosse de dire, à la troisième personne du subjonctif présent, au singulier : qu'il aie, au lieu de : qu'il ait. Vaugelas la signale ; et il n'est pas rare de l'entendre encore aujourd'hui.

4. Dans les prétérits surcomposés, lorsque le complément direct du verbe est placé devant lui, doit-on prendre la forme variable eu, eue, ou la forme invariable eu ? J'avais beaucoup d'affaires ; je suis parti quand je les ai eu terminées, ou eues terminées. Les deux manières peuvent certainement se défendre ; et le poëte pour éviter un hiatus ne devrait se faire aucun scrupule d'accorder eu. Mais il est plus naturel de ne le pas accorder, JULLIEN.

5. Je vous aurais parlé, si je vous eusse trouvé ou si je vous avais trouvé. Si ne prend la construction du subjonctif qu'avec les auxiliaires.

6. En poésie, aie est monosyllabe, et pour l'employer, il faut qu'il soit suivi d'une voyelle. Mais dans le XVIIe siècle, on s'en servait devant une consonne, et on le faisait de deux syllabes : Que j'aie peine aussi d'en sortir par après. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] On observera que, bien que avoir soit un verbe actif, il n'a pas de passif ; on ne dit pas : ces choses ont été eues.

SYNONYME

AVOIR, POSSÉDER. Avoir est beaucoup plus général que posséder. On a de toutes les façons possibles, au lieu que posséder, c'est avoir, en exprimant précisément que l'on tient en sa main, en son pouvoir, la chose dont il s'agit.

+

1.
18 Terme de turf. Avoir un cheval, parier pour un cheval. Quand un pouleur demande : quel cheval avez-vous ? cela veut dire pour quel cheval pariez-vous ?

REMARQUE

Ajoutez :

7. Auxiliaire, placé autrement dans le XVIIe siècle que nous ne faisons d'ordinaire aujourd'hui. Je devais par la royauté Avoir commencé cet ouvrage [j'aurais dû.... commencer]. [La Fontaine, Fables] Et quand ce même prélat [Fénelon] veut qu'on croie sur sa parole... la bonne foi lui devait avoir imposé silence. [Bossuet, Remarques sur la réponse à la relation sur le quiétisme]Au reste cette construction est parfaitement correcte.

8. Des grammairiens ont dit que dans la locution : il y a longtemps, dix ans, etc. que, et il y a longtemps, dix ans, etc., sans que, une différence devait être établie ; que la première convenait quand l'action dont il s'agissait durait encore : il y a longtemps que je demeure dans cet appartement, et : il y a longtemps telle chose arriva. La distinction serait valable, si, dans la locution, le que était un relatif signifiant pendant lequel temps ; mais c'est une simple conjonction qui unit les deux membres. La seule remarque à faire, c'est que, quand il y a longtemps, dix ans, etc. commence la phrase, il est plus usuel de mettre le que : il y a longtemps que je suis malade, que j'ai quitté cet appartement.

9. Molière a donné à il y a pour complément un relatif. Pensez-vous qu'on soit capable d'aimer de certains maris qu'il y a ? [Molière, George Dandin]Rien ne s'oppose à cette construction.

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