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haïr

vt (ha-ir), je hais, tu hais, il hait, nous haïssons, vous haïssez, ils haïssent ; je haïssais ; je haïs, tu haïs, il haït, nous haïmes, vous haïtes, ils haïrent (plusieurs grammairiens disent que le tréma ne dispense pas de l'accent : haïmes, haïtes) ; je haïrai ; je haïrais ; hais, haïssons, haïssez ; prés. du subjonctif : que je haïsse, que tu haïsses, que nous haïssions ; imparf. du subjonctif : que je haïsse, que tu haïsses, qu'il haït, que nous haïssions, que vous haïssiez, qu'ils haïssent ; haïssant ; haï
  • 1Avoir pour quelqu'un un sentiment qui fait que nous lui voulons du mal. Rodrigue : Ton malheureux amant aura bien moins de peine à mourir de ta main qu'à vivre avec ta haine. - Chimène : Va, je ne te hais point. [Corneille, Le Cid] Fais-toi des ennemis que je puisse haïr. [Corneille, Horace] ...Je hais tous les hommes, Les uns parce qu'ils sont méchants et malfaisants, Et les autres pour être aux méchants complaisants. [Molière, Le misanthrope] Et jusqu'à je vous hais, tout s'y dit tendrement [dans les pièces de Quinault]. [Boileau, Satires] Vous me haïssez trop pour ne me plus aimer. [Boursault, Ésope à la cour, II, 1] Et je souhaiterais, dans ma juste colère, Que chacun le haït, comme le hait son père. [Racine, La Thébaïde, ou Les frères ennemis] L'on hait avec excès lorsque l'on hait un frère. [Racine, ib. III, 6] Ah ! je l'ai trop aimé, pour ne point le haïr. [Racine, Andromaque] Si je la haïssais, je ne la fuirais pas. [Racine, Phèdre] Quand vous me haïriez, je ne m'en plaindrais pas. [Racine, ib. II, 5] Mais le roi qui le hait, veut que je le haïsse. [Racine, Iphigénie en Aulide] Je l'aime [Mme de Montespan], et ne puis me persuader qu'elle me haïsse. [Maintenon, Lettres] Regretter ce qu'on aime est un bien, en comparaison de vivre avec ce qu'on hait. [La Bruyère, IV] Tel vous aime, dit-il, n'en croyez rien, il ment ; Vous dit-on qu'on vous hait, croyez-le aveuglément. [Dufrény, Réconc. norm. II, 7] Albert : Vous ne m'aimez donc pas ? - Agathe : Non, mais, en récompense, Je vous hais à la mort. [Regnard, Les folies amoureuses] Il y a des hommes dont il est glorieux d'être haï. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque] On ne hait pas toujours ceux qu'on rend malheureux. [La Chaussée, Mélanide, V, 2] Et, pour se rassurer, en vain il [Louis XI] sacrifie Ceux qu'il hait, ceux qu'il craint, ceux dont il se défie. [Masson, Helv. II]

    Haïr quelqu'un ou quelque chose comme la peste, comme la mort, le haïr extrêmement.

    En un sens particulier, haïr quelqu'un de, lui en vouloir à cause de. Mais je hais vos messieurs de leurs honteux délais. [Molière, L'amphytrion]

    Absolument. Je hais quelquefois Et moins que je ne veux et moins que je ne dois. [Corneille, Sertorius] Dire qu'on ne saurait haïr, N'est-ce pas dire qu'on pardonne ? [Molière, L'amphytrion] Quand il hait une fois, il veut haïr toujours. [Racine, La Thébaïde, ou Les frères ennemis] ....il faut désormais que mon coeur, S'il n'aime avec transport, haïsse avec fureur. [Racine, Andromaque] On a dit en latin qu'il coûte moins cher de haïr que d'aimer. [La Bruyère, IV] Vous qui croyez que ne pas perdre vos ennemis, c'est leur pardonner, et qui bornez la loi qui vous ordonne d'aimer, à ne haïr qu'avec mesure. [Massillon, Oraisons funèbres et sermons] Haïr est le tourment le plus affreux de tous. [La Chaussée, Gouvern. II, 6] Et pourquoi, monsieur, voulez-vous haïr quelqu'un ? la peine est toute du côté de celui qui hait. [Legrand, le Philanthrope, sc. 14]

    Faire haïr, rendre odieux ; se faire haïr, se rendre odieux. Cela le fit haïr de ses voisins. Ce roi s'est fait haïr de ses sujets. Vous lui faites baïr ceux qu'il devrait aimer.

    Faire haïr se construit aussi avec la préposition à. Quel horrible péché me fait haïr des cieux, DESPORTES, ; je dirais plutôt haïr aux cieux ; et, de fait, on dit : Vous me l'avez fait haïr ; or, qui doute que me ne soit datif, comme : Vous me donnez ; on dit : Cette action l'a fait haïr au roi ; cela l'a fait haïr à tous ceux qui l'aimaient. [Malherbe, Comment. sur Desportes, Oeuvres, t. IV, p. 347]

  • 2En parlant des choses, avoir de l'aversion, de la répugnance. Il n'aimait que la chasse et haïssait fort l'étude. [Scarron, Le Roman comique] Je hais ce qui est faux. [Sévigné, 507] Haïr mon âme, dit saint Augustin, c'est, dans le sens de l'Évangile, haïr mes propres haines et mes propres affections. [Bourdaloue, 3e dim. après la Pentecôte, Dominic. t. Il, p. 370] Je ne peux pas savoir auparavant Si j'aimerai le mariage ; Mais je sais bien que je hais le couvent. [Imbert, Jaloux sans amour, II, 5]

    Il se dit quelquefois des choses dont on reçoit quelque incommodité. Haïr le froid, le chaud.

    Haïr que, avec le subjonctif. M. de la Vallière est mort je ne sais comment ; je hais toujours que les hommes aient mal au derrière ; on lui a fait plusieurs opérations.... [Sévigné, 16 oct. 1676]

  • 3Haïr à, avec un infinitif. Avoir de la répugnance pour. Je hais mortellement à vous parler de tout cela ; pourquoi m'en parlez-vous ? ma plume va comme une étourdie. [Sévigné, 440] Tel qui hait à se voir peint en de faux portraits, Sans chagrin voit tracer ses véritables traits. [Boileau, Epîtres] Ils haïssent autant à les voir [les femmes] avec de la céruse sur le visage, qu'avec de fausses dents. [La Bruyère, III]
  • 4Haïr avec la négation s'emploie familièrement dans le sens d'aimer assez, et alors il prend à ou de quand il est suivi d'un infinitif. Elles ne haïssent pas de primer dans ce nouveau genre de vie. [La Bruyère, III] Des défauts dont nous ne haïssons pas à être raillés. [La Bruyère, V] La bonne dame ne haïssait pas le vin d'Espagne. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] Peut-être ne haïssez-vous pas des abus qui vous laissent tranquilles. [Massillon, Car. Mélange.] Mais à quoi jugez-vous que la comtesse ne le hait pas ? [Marivaux, Le legs] Si je n'étais pas canusi [prêtre du Japon], je ne haïrais pas d'être quaker. [Voltaire, Dialogue de Pégase et du vieillard] Je ne hais pas à garder les dindons. [Voltaire, Correspondance] Le bon vin me paraît une excellente chose, et je ne hais point à m'en égayer. [Rousseau, Julie, ou la Nouvelle Héloïse]
  • 5Se haïr, vpron Avoir de la haine pour soi. Je me hais de te voir ainsi mésestimée. [Régnier, Élégies] Excuse un malheureux qui perd tout ce qu'il aime, Que tout le monde hait et qui se hait lui-même. [Racine, Andromaque]

    En termes de religion, se haïr soi-même, haïr en soi la nature humaine. Nulle autre religion [que la chrétienne] n'a proposé de se haïr ; nulle autre religion ne peut donc plaire à ceux qui se haïssent et qui cherchent un être véritablement aimable. [Pascal, Pensées] Ils [ceux qui croient] ne veulent aimer que Dieu, ils ne veulent haïr qu'eux-mêmes. [Pascal, ib. XIII, 7]

    Avoir une haine réciproque. Cessez de vous haïr.

REMARQUE

1. Ce fut Joachim du Bellay, au XVIe siècle, qui se permit l'un des premiers de dire je hais pour je haïs. Il en fut repris par Charles Fontaine, l'un de ses contemporains. [Génin, Variations du langage] C'est une erreur de Génin ; on peut voir à l'historique que la contraction remonte aux temps les plus anciens, le présent étant écrit je hé ou il hait.

2. Voltaire a deux fois manqué à aspirer l'h : Je meurs au moins sans être haï de vous. [Voltaire, Enf. prod. IV, 3] Et : Aurait rendu comme eux leur dieu même haïssable. [Voltaire, Alzire, ou Les américains] C'est une grosse faute.

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