pâtir
- 1Éprouver une souffrance. Il a été longtemps malade, il a bien pâti avant de mourir.
Chacun tremble et frémit à ce spectacle horrible, Et celui qui pâtit paraît seul insensible
. [Du Ryer, Scévole, V, 4]Ce sont des sentiments dont vous pâtissez, peut-être....
[Maintenon, Lettres]Pâtir de quelque chose, en souffrir du dommage.
On dit bien vrai que les petits pâtissent toujours des chagrins des grands
. [Gherardi, Théât. ital. t. I, p. 291 (le Phénix).]Hélas ! on voit que de tout temps Les petits ont pâti des sottises des grands
. [La Fontaine, Fables]Les petits pâtissent du malheur des grands, et quelquefois même de leur bonheur
. [Voltaire, Correspondance]Il n'est pas juste que vous pâtissiez des frivolités de ma jeunesse ; cependant il faut que je vous propose de daigner partager un peu mes faiblesses
. [Voltaire, Correspondance]Pâtir pour quelqu'un, souffrir d'une faute qu'il a faite, d'un tort qu'il a eu.
- 2Avoir du mal, éprouver des privations.
J'ai une tendresse pour mes chevaux qu'il me semble que c'est moi-même, quand je les vois pâtir ; je m'ôte tous les jours pour eux les choses de la bouche
. [Molière, L'avare]C'est à force d'expérience, en pâtissant beaucoup, qu'à la fin vous en acquerrez quelque petite lumière [de la vérité]
. [Bossuet, Politique tirée des propres paroles de l'Écriture sainte]Quand on a un peu pâti, le plaisir en semble meilleur
. [Marivaux, Double inconstance]Si vous laissez pâtir les enfants, vous exposez leur santé
. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation] - 3Il se dit aussi des choses qui souffrent de l'altération, du mal. Il a fait des excès, sa santé on a pâti. Cet arbre a pâti.
Sous un chêne aussitôt il va prendre son somme, Un gland tombe : le nez du dormeur en pâtit
. [La Fontaine, Fables]Il est vrai, mon oncle, qu'une oreille un peu délicate pâtit furieusement à entendre prononcer ces mots-là
. [Molière, Les précieuses ridicules]Il se dit, dans un sens analogue, des sentiments qui sont froissés.
Ciel ! que mon coeur pâtit !
[Molière, L'école des femmes]Ma fierté pâtissait à retourner chez des gens qui m'avaient si mal reçu
. [Rousseau, Les confessions]Près de beauté touchante Mon coeur en vain pâtit
. [Béranger, Voc.]Nature pâtit, se dit en parlant d'une personne qui se fait violence pour cacher les sentiments pénibles qu'elle éprouve.
- 4 Terme des mystiques. Être dans l'inaction, dans une contemplation paisible et passive.
Il faut expliquer que ce qu'on appelle pâtir et souffrir ou endurer en cette matière [l'oraison passive] n'est pas le pâtir et le souffrir qui est opposé à la joie et accompagné de douleur, mais le pâtir et le souffrir qui est opposé au mouvement propre et à l'action qu'on se peut donner à soi-même
. [Bossuet, Instructions sur les états d'oraison] - 5Endurer, avoir patience (sens qui vieillit).
Mais je ne puis pâtir de me voir rejeté
. [Régnier, Satires]Avez-vous de la peine à pâtir dans vos traverses, envisagez Jésus-Christ
. [Bossuet, Sermons]PROVERBE
Les bons pâtissent pour les méchants, se dit quand les actes des méchants attirent sur les bons un mal quelconque, et aussi quand on refuse quelque service à un honnête homme, parce qu'on a été dupe de fripons.Les mutins de Rennes se sont sauvés, il y a longtemps ; ainsi les bons pâtiront pour les méchants
. [Sévigné, 20 oct. 1675]Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.
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