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si [2]

adv. (si)
  • 1Tellement (sens le plus voisin de l'étymologie : sic, ainsi). Il n'y avait plus que quatre petits mots dans la langue française : la reine est si bonne ! [Retz, Mémoires] Il ne faut pas toujours être si délicat. [La Fontaine, Fables] Voilà le plus beau des éventails.... je n'ai jamais rien vu de si joli. [Sévigné, 6 avr. 1672] Une main si habile eût sauvé l'État, si l'État eût pu être sauvé. [Bossuet, Oraisons funèbres] Et j'espérais ma part d'une si riche proie. [Racine, Athalie] Je veux aujourd'hui vous exposer les règles de la foi sur un point si important de la doctrine chrétienne. [Massillon, Carême, Vocation.] Jean Corvin Huniade, ce fameux général des armées hongroises, qui combattit si souvent Amurat et Mahomet II. [Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations et sur les principaux faits de l'histoire depuis Charlemagne jusqu'à Louis XIII] Ces pauvres Savoyards sont de si bonnes gens. [Rousseau, Les confessions] La nymphe était si belle, et son amant si tendre. [Delille, Les trois règles de la Nature]

    Familièrement, pas si bête, c'est-à-dire il n'est pas si bête, ou cela n'est pas si bête, ou je ne suis pas assez bête pour faire cela.

  • 2Si, avec que dans un autre membre de phrase et l'indicatif, tellement.... que. Le vent est si grand qu'il rompt tous les arbres. Ce temps, si long que l'on use à composer un long ouvrage, [le prédicateur devrait] l'employer à se rendre si maître de sa matière, que les tours et les expressions naissent dans l'action et coulent de source. [La Bruyère, XV] Le monde est si corrompu que l'on acquiert la réputation d'homme de bien seulement en ne faisant pas de mal. [De Lévis, Pensées, V]
  • 3Si, avec que et l'infinitif, au point de. Je ne me repais pas de pensées si vaines que de m'imaginer.... [Descartes, Discours de la méthode] Si quelques prêtres se trouvaient si horriblement méchants que de se laisser aller à cette diabolique impiété. Statuts synod. de Le Gouverneur, évêque de Saint-Malo, art. 21 (1628)] Celui-ci [Eunus adopté par Ésope] le paya d'ingratitude, et fut si méchant que de souiller le lit de son bienfaiteur. [La Fontaine, Vie d'Ésope.] Mais je ne me crois pas si chéri du Parnasse, Que de savoir orner toutes ces fictions. [La Fontaine, Fables] Et j'ai eu un aïeul, Bertrand de Sotenville, qui fut si considéré en son temps, que d'avoir permission de vendre tout son bien pour le voyage d'outre-mer. [Molière, George Dandin] Ouais ! je ne croyais pas que ma fille fût si habile que de chanter ainsi à livre ouvert. [Molière, Le malade imaginaire] Eh bien ! nous avons aimé un homme.... et nous avons été si sotte que de l'épouser [mariage de Mme de Coligny et de la Rivière]. [Sévigné, à Mme de Guitaut, 23 janv. 1682] Il me semble qu'il y a vingt ou vingt-cinq ans vous n'étiez point si innocente que de ne pas savoir quel jour c'était que le lendemain de la veille de la Pentecôte. [Sévigné, à Mme de Grignan, 12 janv. 1676] Es-tu toi-même si crédule Que de me soupçonner d'un courroux ridicule ? [Racine, Bajazet]

    On peut supprimer le que. Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? [La Fontaine, Fables] Elle [Mme d'Heudicourt] a été si sotte de donner scrupuleusement dans l'étoffe [dépense en étoffes], sans rien mettre à part [sur une somme donnée pour des habits]. [Sévigné, 16 oct. 1676] Le pauvre Chardon de la Rochette, qui toute sa vie fut si simple de croire obtenir par la science une place de savant. [Courier, A MM. de l'Académie.]

  • 4Si, dans une phrase négative suivi de que, veut le subjonctif. Il n'a pas été si leste qu'il ne soit tombé.
  • 5Si, suivi de qui, ne s'emploie que dans une phrase négative et veut le subjonctif. Il n'y a si vil praticien qui, au fond de son étude sombre et enfumée, ne se préfère au laboureur qui jouit du ciel. [La Bruyère, VII]
  • 6Si devant un adjectif ou un adverbe, au commencement de la phrase et ayant une force exclamative, tant est.... ! Si fort tous les pécheurs s'endorment tranquillement dans cette espérance qu'ils se convertiront un jour ! [Massillon, Avent, Délai.] Il [Dieu] nous a pour ainsi dire portés lui-même sur ses ailes au haut de la roue ; si rapidement nous y sommes montés ! [Massillon, Carême, Danger des prospér. temp.]

    Ironiquement. Vous deviez si bien venir ! je vous ai attendu toute la journée.

  • 7Il peut s'employer devant les expressions adverbiales ; des grammairiens ont prétendu le contraire ; mais de bons auteurs en ont usé de la sorte. Vous voyez bien, mes pères, qu'il y a peu d'opinions que vous ayez si à tâche d'établir. [Pascal, Les provinciales] L'extravagance y paraît si à découvert, qu'elle ne laisse presque pas de lieu à la méprise. [Massillon, Carême, Resp. humain.]

    Il peut même précéder un substantif. Ces conjectures ne sont pas si conjectures que tu penses. [Rousseau, Julie, ou la Nouvelle Héloïse]

  • 8Il sert d'adverbe de comparaison en place de aussi, autant ; mais il ne s'emploie qu'avec la négation ou dans une phrase interrogative. Mais de ces soupirants qui vous offraient leur foi, Aucun ne vous eût mise alors si haut que moi. [Corneille, Tite et Bérénice] Eh bien, ils se battront, puisque vous le voulez ; Mais Rodrigue ira-t-il si loin que vous allez ? [Corneille, Le Cid] Avez-vous jamais ouï parler d'une étoile si brillante que celle du roi ? [Sévigné, 13 oct. 1677] Je n'ai jamais vu rien de si beau, de si bon, de si aimable, de si net, de si bien arrangé, de si éloquent, de si régulier, en un mot de si merveilleux que votre lettre. [Maintenon, Lettres] Dans la monarchie il n'y a pas une force si réprimante que dans les autres gouvernements. [Montesquieu, L'esprit des lois]
  • 9Si employé pour aussi dans une phrase affirmative a vieilli. Plein d'un amour si pur et si fort que le nôtre. [Corneille, Suréna] On y fait si bonne chère qu'on veut. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont]

    L'usage n'a conservé que la locution familière : Si peu que vous voudrez, si peu que rien, c'est-à-dire aussi peu que vous voudrez, très peu.

    Si .... comme, se disait jadis pour aussi.. que ; cette tournure a vieilli. Il n'est rien de si beau comme Calixte est belle. [Malherbe] Je vous félicite, vous, d'avoir une femme si belle, si sage, si bien faite comme elle est. [Molière, Le médecin malgré lui] Il ne paraît pas que la paix soit si proche comme je vous l'avais mandé. [Sévigné, 24 juin 1672]

  • 10Si.... que, quelque... que. Si mince qu'il puisse être, un cheveu fait de l'ombre. Protésilas sera prêt à le faire [le bien] avec vous pour conserver l'autorité ; mais, si peu qu'il sente en vous de facilité à vous relâcher.... [Fénelon, Télémaque]

    Avec ellipse du que. Une figure, si régulière soit-elle, n'est pas agréable à la vue lorsque... [Descartes, Musique, choses à remarquer.]

    Si peu que, le peu que. Si peu que j'ai d'espoir ne luit qu'avec contrainte. [Corneille, Polyeucte] Divers petits commandants qui étaient le jouet des barbares [sur la fin de l'empire romain], et qui consumaient si peu qu'ils avaient de force à se supplanter les uns les autres. [Mézer. Abr. de l'hist. de France. ann. 455] On se réjouit de ce qu'on pourra faire bonne chère en toute licence : plus de jeûnes, plus d'austérités ; si peu de soin que nous avons peut-être apporté durant ce carême à réprimer le désordre de nos appétits, nous nous en relâcherons tout à fait. [Bossuet, Sermons]

  • 11Si que, de telle sorte que. La belle sut de la beauté le prix, Si que bientôt, nouvelle Cythérée, Paris la vit en ses murs admirée. [Chaul. à Mme de Valois.]
  • 12Si bien que, tellement que, de sorte que. La pluie nous surprit en chemin, si bien que nous nous égarâmes. .... Si bien Qu'encor qu'elle ait des yeux, si ne voit-elle rien. [Régnier, Satires] Nul animal n'avait affaire Dans les lieux que l'ours habitait, Si bien que, tout ours qu'il était, Il vint à s'ennuyer. [La Fontaine, Fables]

    Si bien donc, se dit interrogativement en reprenant un sujet de conversation. Si bien donc que vous allez trouver M. et Mme Oronte ? [Lesage, Crispin rival de son maître]

  • 13Si, signifiant étymologiquement ainsi, est quelquefois employé comme particule affirmative, mais seulement dans le cas où il s'agit de détruire une négation précédente. Vous dites que non, je dis que si. Vous gagez que non, je gage que si. Est-ce que vous n'allez pas à Paris ? Si, j'y vais.

    On répond si et non oui, parce que, les phrases étant négatives, on ne saurait si oui détruit la négation ou la confirme. Il faut ajouter que le mot si, étant destiné à détruire une opinion exprimée par notre interlocuteur, n'est pas une tournure polie quand on parle à ses supérieurs. On emploie alors une autre formule, comme : je vous demande pardon, JULLIEN.

  • 14Si fait, locut. qui s'emploie pour affirmer le contraire de ce qui a été dit. Je crois qu'il n'a pas été là. - Si fait, il y a été. Si fait vraiment. Je ne saurais manger. - Si fait bien moi, je meure. [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Si fait, mon enfant, par-ci, par-là, dans de certains moments. [Dancourt, Renaud et Armide, sc. 12]

    Si fait, c'est-à-dire ainsi fait.

    Si ferai, si ferai-je, autres façons d'affirmer, qui signifient je ferai ainsi. Quoi ! dit-il, sans mourir, je perdrai cette somme ! Je ne me pendrai pas ! eh ! vraiment si ferai, Ou de corde je manquerai. [La Fontaine, Fables]

    Cette tournure a vieilli ; cependant elle se dit encore. On la trouve dans cette phrase de J. J. Rousseau : Les expressions sont toujours plus recherchées et les oreilles plus scrupuleuses dans les pays plus corrompus ; s'aperçoit-on que les entretiens de la halle échauffent beaucoup la jeunesse qui les écoute ? si font bien les discrets propos du théâtre, et il vaudrait mieux qu'une jeune fille vît cent parades qu'une seule représentation de l'Oracle, Lett. à d'Alemb. sur les spectacles.

    Si donnons en mandement, formule fréquente dans les anciens édits.

  • 15 Familièrement. Que si, pour si fait. Vous n'y irez pas ? - Que si. Vous ne ferez donc pas cela ? - Oh ! que si.

    Substantivement. Eux de recommencer la dispute à l'envi Sur le que si, que non ; tous deux étant ainsi, Une meute apaisa la noise. [La Fontaine, Fables] On la [la Discorde] reçut à bras ouverts, Elle et que-si-que-non son frère. [La Fontaine, ib. VI, 20]

  • 16Pourtant, toutefois (ce sens vieillit). Si faut-il qu'à la fin j'acquitte ma promesse. [Malherbe, IV, 4] Si ne faut pas abandonner tout d'un coup à la censure publique quinze ou seize années de notre histoire. [Guez de Balzac, Discours à la Régente] Mais, quoique le repos règne en ma conscience, Si ne puis-je endurer avecque patience Des termes dont un jour vous vous repentirez. [Mairet, Soliman] On m'a pourvu d'un coeur peu content de soi-même, Inquiet et fécond en nouvelles amours ; Il aime à s'engager, mais non pas pour toujours ; Si faut-il une fois brûler d'un feu durable. [La Fontaine, Élég. III] Moron : Je le connais, ma peine sera inutile. - La princesse : Si faut-il pourtant tenter toute chose, et éprouver si son âme est entièrement insensible. [Molière, La princesse d'Élide] Je n'ai point d'argent à prêter ; si ai bien à mettre à profit honnête. [Pascal, Les provinciales] Vous avez beau faire : si faut-il croire, ou nier, ou douter. [Pascal, Pensées] Ma partie est puissante et j'ai tout lieu de craindre.... Si pourtant, j'ai bon droit. [Racine, Les plaideurs] Jamais de son pays ne vint lettre de change, Et, quoiqu'il mange peu, si faut-il bien qu'il mange. [Regnard, Le bal] Le roi, se fâchant davantage, dit que si fallait-il pourtant qu'elle [Mme de Torcy] le sût [ce qu'il avait dit]. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon]

    On a dit dans le même sens : si est-ce que Me trompe qui pourra ; si est-ce qu'il ne saurait jamais faire que je ne sois rien, tandis que je penserai être quelque chose. [Descartes, Méditations] Et encore qu'il y ait en l'homme autre chose que la raison, si est-ce néanmoins qu'elle est la partie dominante. [Bossuet, Pens. chrét. 33]

    Et si, même signification. Depuis trente ans, c'est elle, et si, ce n'est pas elle. [Régnier, Satires] Je la fuis, je la crains, et si, je l'aime encore. [Tristan, Panthée] J'ai la tête plus grosse que le poing, et si, je ne l'ai pas enflée. [Molière, Le bourgeois gentilhomme] Je n'ai encore vu personne qui ne soit charmé de votre Instruction ; et si, j'en ai ouï parler à bien des gens. [Maintenon, Lettres] Il n'y en aura jamais qui fasse son chemin si promptement que vous ; et si, ils aiment à aller vite, ces messieurs-là. [Dancourt, Vacances, sc. 3]

    Dans cet emploi on prononce si en appuyant dessus et en faisant une petite pause. Ce mot énergique et vif, quoiqu'il ait vieilli, ne doit pas tomber en désuétude.

REMARQUE

1. Si ne doit modifier les participes passés que lorsqu'ils sont adjectifs. On dit bien : un homme si éclairé, si rangé ; mais on ne dit pas : une éclipse si observée ; il faut dire : si exactement observée ; et alors si modifie, non le participe, mais l'adverbe.

2. Il vaut mieux répéter le si devant les adjectifs et les adverbes, et dire : vous êtes si sage et si avisé, que de dire : vous êtes si sage et avisé. Cependant cette dernière façon n'est pas absolument à repousser.

+

2. SI.
13Ajoutez :

Si, au sens de particule affirmative, pris substantivement. Si, Nancy ! ce si comprend tout. [Letourneur, Trad. de Clarisse Harlowe, lett. LVIII]

17Si plus, tant plus. Une réponse si sèche et si précise fut cruellement sentie ; mais il [le duc de Vendôme] n'était pas au bout du châtiment qu'il avait si plus que mérité. [Saint-simon, dans Scènes et portraits choisis dans les Mémoires du duc de St-Simon, par Eug. de Lanneau, Paris, 1876, t. I, p. 198]

Si plus est insolite, mais n'a rien d'incorrect.

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