Voir les citations avec "vouloir"

vouloir [1]

vt (vou-loir), je veux, tu veux, il veut, nous voulons, vous voulez, ils veulent ; je voulais ; je voulus ; je voudrais ; veuille, qu'il veuille, veuillons, veuillez, qu'ils veuillent ; que je veuille, que tu veuilles, qu'il veuille, que nous voulions, que vous vouliez (voy. sur ces deux dernières formes la remarque 2), qu'ils veuillent ; que je voulusse ; voulant ; voulu
  • 1Être en volonté de. Vouloir ce que Dieu veut est la seule science Qui nous met en repos. [Malherbe, VI, 18] Qui veut également tout ce qu'on lui propose, Dans le secret du coeur souvent veut autre chose. [Corneille, Othon] Ne veuillez pas vous perdre, et vous êtes sauvé. [Corneille, Polyeucte] M. de Beaufort et Mme de Montbazon ne voulaient proprement rien à force de tout vouloir ; et ces sortes d'esprit assemblent toujours dans leurs imaginations des choses contradictoires. [Retz, Mémoires] [Louis XIV] Voulant la paix, quoiqu'il fasse la guerre Avec succès, depuis plus de trente ans. [La Fontaine, Poés. mêlées, LXXII] Célimène : Voulons-nous nous asseoir ? - Arsinoé : Il n'est pas nécessaire. [Molière, Le misanthrope] Elle [une religieuse] sort quand elle veut ; mais elle ne le veut guère, parce qu'elle a principalement dans la tête de vouloir aller en paradis. [Sévigné, 322] La profonde obscurité du coeur de l'homme, qui ne sait jamais ce qu'il voudra, qui souvent ne sait pas bien ce qu'il veut. [Bossuet, Oraisons funèbres] Ô mon Dieu, dit-il, vous le voulez ; que votre volonté soit faite ; je me jette entre vos bras. [Bossuet, Oraisons funèbres] Saint Thomas a dit que la volonté était naturellement réfléchissante sur elle-même, qu'on aimait à aimer, qu'on voulait vouloir. [Bossuet, Instructions sur les états d'oraison] Dès que l'âme veut que le bras soit mû, le bras est mû, quoiqu'elle ne sache pas seulement ce qu'il faut faire pour le remuer. [Malebranche, De la Recherche de la vérité] Laissez faire, ils ne sont pas au bout ; J'y vendrai ma chemise, et je veux rien ou tout. [Racine, Les plaideurs] Moi, je ne veux rien ; c'est ma femme qui veut. [Destouches, Fausse Agnès, I, 1] Puisque madame le veut, que Suzanne le veut, que vous le voulez vous-même, il faut bien que je veuille aussi. [Beaumarchais, Le mariage de Figaro, ou La folle journée] Vous me donnez l'espérance d'un temps plus heureux ; je veux espérer. [Letourneur, Trad. de Cl. Harl. Lett. LXXXII]

    Absolument. Si tout est fait pour nous, s'il ne faut que vouloir, Que n'employons-nous mieux ce souverain pouvoir ? Que ne régnons-nous sur nous-mêmes ? [Deshoul. t. I, p. 132] Et vous reconnaîtrez mes soins, si vous voulez. [Racine, Andromaque] Encore une fois, il faut vouloir ; le célèbre curé de Saint-Sulpice voulut, et il bâtit sans aucun fonds un vaste édifice [Saint-Sulpice]. [Voltaire, Pol. et lég. Embell. de Paris.] On ne peut vouloir qu'en conséquence de ce qu'on sent ou de ce que l'on a senti. [Bonnet, Essai analytique sur les facultés de l'âme] J'ai toujours la puissance de vouloir, non la force d'exécuter. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation] Dès lors elle [l'âme] ne se borne plus à désirer ; elle veut ; car on entend par volonté, un désir absolu, et tel, que nous pensons qu'une chose désirée est en notre pouvoir. [Condillac, Traité sens. I, II, 9]

    Terme de turf. Comme il veut, exclamation que pousse souvent la foule au moment où le cheval gagnant va atteindre le poteau, et signifiant qu'il lui est facile de gagner sans effort.

    Vouloir ou en vouloir, se dit, en termes de haras, d'une jument qui paraît disposée à souffrir l'étalon.

    Tu l'as voulu, vous l'avez voulu, se dit par forme de reproche à quelqu'un qui a fait quelque faute contre laquelle il avait été prémuni. Vous l'avez voulu ; vous l'avez voulu, Georges Dandin, vous l'avez voulu ; cela vous sied fort bien, et vous voilà ajusté comme il faut. [Molière, George Dandin]

    On dit : Je voudrais au lieu de : je veux, pour exprimer modestement son désir. Je voudrais vous entretenir en particulier.

    Par une sorte de défi. Je voudrais bien voir qu'il osât l'entreprendre. Je voudrais bien voir cela.

    Il ne sait ce qu'il veut, se dit d'un homme irrésolu, qui ne sait pas se décider.

    Faire de quelqu'un ce qu'on veut, tout ce qu'on veut, avoir un grand empire sur ses sentiments, sur ses actions. Un roi n'a qu'à vouloir ; on fait de cette nation-ci [la française] tout ce qu'on veut. [Voltaire, Dictionnaire philosophique]

    Cet homme veut ce qu'il veut, il l'exige, il le veut fortement.

    Familièrement. Que veux-tu, que voulez-vous (sous-entendu, qu'on dise, qu'on fasse) ? et signifiant il en est ainsi. Que veux-tu, mon pauvre nourricier ? il faut bien obéir à notre maître. [Molière, Le médecin malgré lui] Que veux-tu ? mais, s'il faut ne te rien déguiser, Mon innocence enfin commence à me peser. [Racine, Andromaque] Que voulez-vous ? il a les préjugés de son pays, ceux de son parti et les siens propres. [Voltaire, Dialogue de Pégase et du vieillard] Le comte : Je ne te reconnaissais pas, moi ; te voilà si gros et si gras.... - Figaro : Que voulez-vous, monseigneur ! c'est la misère. [Beaumarchais, Le barbier de Séville, ou La précaution inutile]

    Dieu le veuille ! se dit pour marquer qu'on souhaite qu'une chose arrive ou qu'on en doute.

    Il veut que cela soit, veuille Dieu, veuille diable, se dit d'un homme qui veut venir à bout de quelque chose à quelque prix que ce soit et par toutes sortes de moyens, justes ou injustes.

    On dit dans le même sens : Veuille Dieu, veuille sa mère.

  • 2Vouloir, avec un nom de personne pour complément, avoir la volonté que la personne soit telle ou telle, ou qu'elle se présente. Je vous veux raisonnable. Mascarille : Voulez-vous deux témoins qui me justifieront ? - Albert : Veux-tu deux de mes gens qui te bâtonneront ? [Molière, Le dépit amoureux] Dieu vous voulait où vous êtes. [Maintenon, Lettres]

    Vouloir une femme, en désirer la possession. Je sais que les ans lui mettront Comme à toi les rides au front, Et feront à sa tresse blonde Même outrage qu'à tes cheveux : Mais voilà comme va le monde, Je t'ai voulue, et je la veux. [Malherbe, IV, 16]

  • 3Commander, exiger avec autorité. Il a dit : Je le veux, désobéirez-vous ? [Corneille, Le Cid] Je veux moins de valeur et plus d'obéissance. [Racine, Iphigénie en Aulide] Sa fière autorité veut de la déférence. [Voltaire, Sémiramis] Je le veux, je le veux.... comme il dit çà, ce monsieur ! je le veux.... ah ! le roi dit bien : nous voulons. [Collé, Part. de chasse, III, 7] Obéissez, je le veux. - Ma foi, il a dit : je le veux, comme un homme qui y est habitué. [A. Duval, Menuis. de Livonie, III, 3]
  • 4Souhaiter, désirer. Qu'est-ce que vous voulez, mon papa ? ma belle maman m'a dit que vous me demandez. [Molière, Le malade imaginaire] Je voudrais que toutes les âmes éloignées de Dieu fussent présentes à ce discours. [Bossuet, Oraisons funèbres] Voulez-vous du public mériter les amours, Sans cesse en écrivant variez vos discours. [Boileau, L'art poétique] Cependant, quand je veux oublier cet outrage, Et cacher à mon coeur cette funeste image, Vous osez à mes yeux rappeler le passé ! [Racine, Mithridate] Je viens vous rappeler qu'on me veut pour lord-maire. [Delavigne, Popularité, I, 8] Je voudrais m'emparer de toute la nature. [P. Lebrun, Marie Stuart, III, 1]
  • 5Consentir à. Oui, je le veux bien. Il faut vouloir tout ce que vous voulez. Veut-elle bien céder à la nécessité ? [Corneille, Médée] Je veux bien l'avouer, ces nouvelles m'étonnent. [Corneille, Horace] Seigneur, voulez-vous bien vous en fier à moi ? [Corneille, Nicomède]

    Par civilité, veuille, veuillez, aie, ayez la bonté, la complaisance. Veuille me dire au plus tôt ce que tu penses de tout cela. Veuillez vous souvenir Que les événements régleront l'avenir. [Corneille, La mort de Pompée] Veuillez être discret, Et n'allez pas, de grâce, éventer mon secret. [Molière, L'école des femmes]

    Voulez-vous bien ? est quelquefois une formule impérative. Voulez-vous bien vous taire ? taisez-vous. Voulez-vous bien finir ? finissez. Voulez-vous bien n'être pas joli comme ça ! [Beaumarchais, Le mariage de Figaro, ou La folle journée]

    Je veux bien a quelquefois une signification hautaine comme de supérieur à inférieur. Je veux bien que vous sachiez que vous n'avez rien à ordonner ici. Si vous ne le savez, je veux bien vous l'apprendre. [Corneille, Nicomède]

    Anciennement, vouloir bien, ne pas craindre de. [Condé, répondant à la harangue du président de Maisons, dit] qu'ayant appris de la bouche de la reine que Sa Majesté ne leur avait permis de s'assembler que pour le tarif et les rentes, il voulait bien leur dire qu'il ne souffrirait point leur désobéissance ni leurs entreprises. [Mme de Motteville, Mém. à la date de 1648] Je quittai un mari qui m'aimait, pour me jeter entre les bras d'un jeune homme qui avait bien voulu depuis peu de temps me faire savoir que je lui étais devenue odieuse. [Scarron, Nouvelles, l'Adultère innocent.] Cela [la perruque exprimée en vers] est dit en quatre vers que je veux bien vous écrire ici, afin que vous me mandiez si vous les approuvez. [Boileau, Lett. à Maucroix, 29 avril 1695]

  • 6Il s'emploie pour marquer la concession que l'on fait, pour admettre hypothétiquement une chose. Je vous que cette offense attaque votre gloire ; Mais qui l'osa commettre a pu ne pas le croire. [Rotrou, Antigone] Ils regorgent de biens et d'honneurs, je le veux. [Bourdaloue, 1er avent, sur la récompense des saints] Qu'il soit doux, complaisant, officieux, sincère ; On le veut : j'y souscris, et suis prêt à me taire. [Boileau, Satires] Mais je veux qu'on vous laisse une part dans la gloire : Que produit pour l'État cette noble victoire ? [Delavigne, Les vêpres siciliennes]

    Familièrement. Je veux bien que cela soit, je veux que cela soit, je suppose que cela soit, quoique je n'en convienne pas, ou quand cela serait vrai.

    Si vous voulez, si vous l'admettez. Quand on veut parler d'un grand conquérant, chacun pense à Alexandre ; ce sera donc, si vous voulez, ce même Alexandre qui nous fera voir la pauvreté des rois dans leurs conquêtes. [Bossuet, Oraisons funèbres] Le corps qui avait concentré dans ses mains tous les pouvoirs, manqua aux engagements qu'il avait pris avec ses sujets, ou, si l'on veut, avec ses esclaves. [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes] Que voulez-vous qu'il ait dit... ? comment imaginez-vous qu'il ait pu dire.... ? Que voulez-vous, mon père, que j'aie fait ? [Molière, Les fourberies de Scapin]

  • 7Prétendre. Chacun veut en sagesse ériger sa folie. [Boileau, Satires] Cette inclination qu'on veut que vous ayez pour le jansénisme. [Maintenon, Lettres] Je ne sais ; il veut absolument Que j'aie eu quelque part à cet enlèvement. [Baron, École des pères, IV, 2] Oui, grand Dieu, c'est en vain que l'humaine faiblesse Sans toi veut se parer du nom de la sagesse. [Racine L. la Grâce, I] Saviez-vous que c'est moi que ce couplet veut ridiculiser ? [Genlis, Théâtr. d'éduc. le Méchant par air, IV, 6]
  • 8Vouloir de, avec un substantif pour complément, rechercher, accepter. Je ne veux point d'un trône où je sois leur captive. [Corneille, Othon] Vous avez dit qu'il était bien aisé de quitter le monde, quand le monde ne voulait plus de nous. [Massillon, Avent, Afflictions.] Que le public veuille ou non veuille De tous les charmes qu'il accueille.... [Voltaire, Correspondance] Si Mlle Gothon veut bien de monsieur, il n'y a pas à aller par quatre chemins. [Carmontelle, Prov. la Guinguette, sc. 6] Je ne veux pas d'un monde où tout change, où tout passe. [Lamartine, Méditations poétiques]

    Populairement. En veux-tu ? en voilà, abondamment, en grande quantité. C'était un bal magnifique : il y avait des glaces en veux-tu ? en voilà.

  • 9Demander un prix d'une chose qu'on veut vendre. Il veut cent mille francs de sa terre. Combien voulez-vous, que voulez-vous de votre voiture ?
  • 10 Fig. Se dit des choses qui ont de l'autorité. La loi veut que.... La raison voulait qu'on prît ce parti. Ce qu'il [Calvin] pouvait [dans la conjuration d'Amboise] ? rompre absolument l'entreprise, en la faisant déclarer au roi ou à la justice ; l'ordre des empires le veut ; la loi éternelle l'ordonne. [Bossuet, Déf. Var. 1er disc. 19]

    Le malheur, le bonheur a voulu que..., il est arrivé par malheur, par bonheur que.... Puisque mon malheur veut que je sois cette victime publique. [Guez de Balzac, Correspondance] Son bonheur voulut que les Turcs ne l'attaquassent pas dans ces funestes conjonctures. [Voltaire, Annales de l'Empire depuis Charlemagne]

  • 11 Fig. Être d'un caractère à exiger l'emploi de (avec un nom de personne pour sujet). Il y a des enfants qui veulent être menés par la crainte. Ils vous diront.... Qu'aux larmes, au travail le peuple est condamné, Et d'un sceptre de fer veut être gouverné. [Racine, Athalie]
  • 12 Fig. Demander, réclamer, avec un nom de chose pour sujet. Un si rare service.... Veut l'honneur le plus rare et le plus éclatant. [Corneille, Horace] Comme en un grand dessein et qui veut promptitude.... [Corneille, Sertorius] Un intérêt pressant veut que je vous implore. [Racine, Esther] Et pour être approuvés De semblables projets veulent être achevés. [Racine, Mithridate] Les ouvrages qui veulent être faits avec une certaine légèreté. [Rousseau, Les confessions] L'histoire de ses maux voudrait un long discours. [Delille, Énéide] L'amitié ne veut pas qu'on tente l'impossible. [Arnault, Oscar, I, 3]

    Il se dit, dans un sens analogue, des cas régis par une préposition, par un verbe, des modes exigés par une conjonction. Quoique veut le subjonctif. Ce verbe veut l'accusatif. Cette préposition veut l'ablatif.

  • 13 Fig. Se prêter à, avec un nom de chose pour sujet. Cette machine ne veut pas marcher. Ce n'est pas seulement la propriété d'avoir qu'on a attribuée à des êtres inanimés et à des idées abstraites, on leur a aussi attribué celle de vouloir ; on dit : Ce bois ne veut pas brûler ; cette clé ne veut pas tourner, etc. [Dumars. Trop. II, 1]
  • 14Être disposé de manière à. La disposition et la décoration de ces jardins [de Colbert à Sceaux] voulaient rappeler en petit ceux de Versailles. [J. Dumesnil, Histoire des amat. franç. t. II, p. 329]
  • 15Vouloir du bien, vouloir du mal à quelqu'un, avoir de l'affection ou de la haine pour lui. Peuple, qui me veux mal, et m'imputes à vice D'avoir.... [Malherbe, v, 4] C'est me vouloir du bien d'une étrange manière ! [Molière, Le misanthrope] L'amour par lequel on se veut du bien et on désire en général sa béatitude. [Bossuet, Préf. sur l'instr. past. de M. de Cambrai, VI, 71] Mlle d'Hamilton ne lui voulut aucun mal de la promptitude dont il obéissait au roi son maître. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] Le pauvre garçon est sensible, et on lui en veut du mal. [Marivaux, Le paysan parvenu] Je me trouve bien confuse de voir que vous m'ayez tant aimée, vous qui devez me vouloir tant de mal. [Marivaux, La Vie de Marianne, ou les aventures de Madame la comtesse de ***] J'ai l'âme aimante, et je me suis toujours attaché aux gens, moins à proportion du bien qu'ils m'ont fait que de celui qu'ils m'ont voulu. [Rousseau, Les confessions]

    Particulièrement. Vouloir du bien à quelqu'un, être disposé à le protéger, à l'avancer. J'honore sa valeur, j'estime sa personne, Et penche d'autant plus à lui vouloir du bien, Que, s'en voyant indigne, il ne demande rien. [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Je le gronde quelquefois ; mais je lui veux du bien. [Goldoni, Bourru bienfais. II, 2]

    Que le mal que je lui veux m'arrive, me puisse arriver, se dit pour exprimer qu'on est bien éloigné de souhaiter du mal à quelqu'un. Je ne l'aime guère ; que le mal que je lui veux m'arrive ! [Genlis, Théâtre d'éduc. la Lingère, I, 2]

    Fig. Vouloir du mal, vouloir mal à une chose, la condamner, en être irrité. Je suis sotte, et veux mal à ma simplicité De conserver encor pour vous quelque bonté. [Molière, Le misanthrope] Que l'éclat de la plus belle victoire paraît sombre [à côté d'une mort chrétienne] ! qu'on en méprise la gloire et qu'on veut de mal à ces faibles yeux qui s'y sont laissé éblouir ! [Bossuet, Oraisons funèbres]

    Se vouloir du bien, du mal, avoir de l'affection, de l'inimitié l'un pour l'autre. Deux personnes qui se voulaient tant de bien. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] Je n'ai vu jamais aucun de ceux qui l'entouraient se vouloir du mal l'un à l'autre. [Rousseau, Les confessions]

    Fig. Se vouloir mal de quelque chose, s'en faire des reproches. Je l'aime et le dédaigne, et, n'osant m'attendrir, Je me veux mal des maux que je lui fais souffrir. [Corneille, Tite et Bérénice] Laissez ; je me veux mal d'une telle faiblesse. [Molière, Dom Garcie de Navarre, ou Le prince jaloux] Je me veux mal de mort d'être de votre race. [Molière, Les femmes savantes]

    Se faire bien vouloir, mal vouloir de quelqu'un, gagner son affection, s'attirer son inimitié.

  • 16Vouloir le bien de quelqu'un, vouloir lui être utile. Le prétexte ordinaire de ceux qui font le malheur des autres, est qu'ils veulent leur bien. [Vauvenargues. Réfl. 160]
  • 17En vouloir à quelqu'un, avoir contre lui un sentiment de rancune. Ne m'en veuille pas trop d'avoir agi sans te consulter. Leur secte [des chrétiens] est insensée, impie et sacrilége.... Mais sa fureur ne va qu'à briser nos autels, Elle n'en veut qu'aux dieux, et non pas aux mortels. [Corneille, Polyeucte] Il faut que l'on en veuille à Mlle de Murçai à la poste, ou que son écriture indéchiffrable en veuille aux yeux des commis. [Maintenon, Lettres] Comme il [Hartsoeker] était accusé d'en vouloir toujours aux plus grands hommes, tels que MM. Huyghens, Leibnitz, Newton, il se justifie par en parler plus librement que jamais. [Fontenelle, Hartsoeker.] Aristophane en voulait à Euripide ; il va dans cette pièce jusqu'à lui reprocher qu'il était fils d'une vendeuse d'herbes. [Fontenelle, Rem. sur Aristoph.] Les anciens peignaient Jupiter prenant le tonnerre composé de trois flèches brûlantes dans la patte de son aigle, et le lançant sur ceux à qui il en voulait. [Voltaire, Dictionnaire philosophique]

    En vouloir à la vie de quelqu'un, avoir formé le projet de le tuer. Je ne suis plus son fils, s'il en veut à vos jours. [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Va, César est bien loin d'en vouloir à ta vie. [Voltaire, La mort de César]

    En vouloir à, avec un nom de chose comme complément, être irrité contre cette chose, la condamner. Voilà, mon père, comme agissent ceux qui n'en veulent qu'aux erreurs, et non pas aux personnes ; au lieu que vous, qui en voulez aux personnes plus qu'aux erreurs, vous trouvez que ce n'est rien de condamner les erreurs, si on ne condamne les personnes à qui vous les voulez imputer. [Pascal, Les provinciales] Elle [l'hérésie] n'en voulait d'abord parmi nous qu'aux abus prétendus du culte ; elle a depuis attaqué le culte lui-même. [Massillon, Petit carême]

    S'en vouloir, se reprocher un tort. Non, laissez-moi, je m'en veux de vous avoir écouté si longtemps. [Picard, Collatéral, v, 2]

    En vouloir à, avoir des prétentions sur. Cousine, il te connaît, et t'en veut tout de bon. [Corneille, Le menteur] Puisque Jason en veut à la toison dorée. [Corneille, La toison d'or] Quand l'ennemi se présentant, Comme il en voulait à l'argent, Sur le mulet du fisc une troupe se jette. [La Fontaine, Fables] Un certain drôle qui, dit-on, en veut à ma nièce. [Hauteroche, Le Cocher supposé] J'en veux à votre coeur, non pas à votre bourse. [Montfleury, Femme juge et partie, II, 2] Marton, quel est donc cet homme qui vient de me saluer si gracieusement, et qui passe sur la terrasse ? est-ce à vous à qui il en veut ? [Marivaux, Les fausses confidences] Je sais bien qu'en amour il n'est pas mal d'avoir le consentement de la personne à qui on en veut. [Voltaire, l'Ingénu, 5]

    En vouloir à, diriger une attaque sur. D'autres disaient qu'on en voulait à quelque petite ville du pays de Trèves. [Pellisson, Lettres historiques] Ouais ! il me semble que j'entends un chien qui aboie ; n'est-ce point qu'on en voudrait à mon argent ? [Molière, L'avare] M. de Louvois est parti pour voir ce que les ennemis veulent faire : on dit qu'ils en veulent à Maestricht. [Sévigné, 293] Toujours la calomnie en veut aux gens d'esprit. [Gresset, Le méchant]

    En vouloir signifie aussi quelquefois chercher, désirer de rencontrer. Je ne te cherchais pas, j'en voulais à ton maître. [Hauteroche, L'Esprit follet ou La Dame invisible]

    À qui en voulez-vous ? qui prétendez-vous attaquer ? et aussi, qui demandez-vous ? qui cherchez-vous ? Êtes-vous de cette maison, ma bonne dame ? - Oui, monsieur ; à qui en voulez-vous, vous dis-je ? [Lamotte, Magnifique, II, 4]

    À qui en veut-il ? de qui se plaint-il ?

    Fig. Le bonheur en veut à..., la chance est pour.... Le bonheur en voulut à mon père ; Vardes tomba et fut désarmé. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon]

    Le malheur lui en veut, la chance est contre lui. Hélas ! la pauvre fille, le malheur lui en voulait, ce jour là. [Marivaux, Le paysan parvenu]

  • 18Vouloir dire, signifier. Que veut dire ce mot, ce procédé ? Equus veut dire en français cheval.

    Entendre ce que parler veut dire, comprendre à demi-mot.

    Que veut dire cet homme ? que prétend cet homme ? que demande-t-il ?

    Que veut dire cela ? Que veut dire ceci ? s'emploie quelquefois pour marquer un simple étonnement.

    Qu'est-ce que cela veut dire ? affirme un sentiment mêlé d'improbation.

    Que veut dire cette clause ? elle ne signifie rien.

    Que veulent dire ces vers ? on n'en comprend pas le sens.

  • 19Au XVIIe siècle, quand vouloir était suivi d'un verbe réfléchi, on mettait souvent le pronom personnel avant le verbe vouloir ; cela peut encore être employé. Je me suis voulu jeter dans le hasard. [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Les examinateurs s'étant voulu écarter un peu de cette méthode. [Pascal, Les provinciales] Et Mignot aujourd'hui s'est voulu surpasser. [Boileau, Satires] Comme cette affaire fit alors un fort grand bruit, et que les ennemis de Port-Royal s'en sont voulu prévaloir dans la suite contre ce monastère. [Racine, Port-Royal, I] À propos de la paix de Ryswyk, ne trouvez-vous pas qu'elle est si glorieuse aux alliés et nommément au roi Guillaume, qu'on ne peut assez admirer que la France se soit voulu assujétir à une mortification si honteuse ? [Bayle, Lett. à Constant, 14 nov. 1697]

    Dans ces cas, l'usage du XVIIe siècle était de ne pas faire accorder voulu, malgré la forme réfléchie.

    PROVERBE

    Ce que femme veut, Dieu le veut, les femmes veulent ardemment ce qu'elles veulent, et viennent à bout de l'obtenir.

REMARQUE

1. L'impératif est veuille, veuillons, veuillez. Cependant l'Académie dit : veux, voulons, voulez, quand on engage à avoir une volonté ferme. On en trouve en effet des exemples dans les auteurs modernes : Ne m'en veux pas (V. HUGO) ; Veux-le bien (COUSIN, Fragments, p. 211, 1833) ; Voulons le faire (BONIFACE, Gramm. n° 363) ; Voulez sortir (ID.). Ces exemples sont rapportés et condamnés par M. Jullien, Gramm. p. 117, qui recommande de dire : Ne m'en veuille pas, veuillez-le bien, veuillons le faire, veuillez sortir. C'est là, il ne peut y avoir de doute, le véritable impératif. Les autres formes sont récentes et à peine intelligibles.

2. M. Jullien dit : " Au présent du subjonctif le Dictionnaire de l'Académie donne voulions, vouliez. Je crois que c'est à tort. Fléchier, à la fin de son Traité des jeux de théâtre, écrit : Ne croyez que nous veuillions vous effrayer, Le grammairien Cl. Irson [XVIIe s.] n'admettait que ces formes. Régnier Desmarais remarquait que l'usage de voulions, vouliez, contraire à l'analogie, commençait à s'introduire, et, de fait, Mme de Sévigné emploie le plus souvent ces formes. Une épigramme de Piron (Oeuvres complètes, VI, p. 505) porte : Pourvu que vous m'en veuilliez croire. " La forme dont M. Jullien prend la défense est certainement la meilleure. Vouloir est un verbe où l'i, qui appartient au subjonctif roman, a modifié l'o, l'ou du radical (comme l'a dans vaille, de valoir) ; et c'est un barbarisme assez récent et désormais autorisé par l'usage que de dire voulions, vouliez ; mais c'est un meilleur usage de dire veuillions, veuilliez.

3. Molière a fait quelquefois voudriez de deux syllabes : Mais le mal c'est.... que monsieur votre père Est un autre vilain qui ne vous laisse pas, Comme vous voudriez bien, manier ses ducats. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] C'est un archaïsme : dans l'ancienne langue ce mot et les mots analogues n'étaient que de deux syllabes. Aujourd'hui ils sont de trois.

+

1. VOULOIR. - REM. Ajoutez :

4. Avec le prétérit indéfini de vouloir, et un que suivant, Mme de Sévigné a mis le verbe de la proposition subordonnée au prétérit indéfini du subjonctif : Elle n'a jamais voulu qu'il ait été saigné, 5 août 1671 ; Ils n'ont pas voulu que nous soyons partis plus tôt, 25 mai 1689. On dirait plutôt : qu'il fût saigné ; que nous partissions ; mais il n'y a rien à redire à ces phrases de Mme de Sévigné.

  • rechercher