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menacer

vt (me-na-sé. Le c prend une cédille devant a et o : menaçais, menaçons)
  • 1Frapper de menace. Et, après que tous les partis furent abattus, il [le cardinal de Retz] sembla encore se soutenir seul, et seul encore menacer le favori victorieux [Mazarin] de ses tristes et intrépides regards. [Bossuet, Oraisons funèbres] Jusqu'au dernier soupir vous m'osez menacer. [Racine, Alexandre le grand] J'entends de toutes parts menacer ma patrie ; Je vois marcher contre elle une armée en furie. [Racine, Iphigénie en Aulide] Quand on le [Corneille] menaça d'une seconde critique sur la tragédie des Horaces semblable à celle du Cid, il répondit : Horace fut condamné par les duumvirs, mais il fut absous par le peuple. [Voltaire, Comm. Corn. Hor. préf.] Ce tigre, encor farouche au sein de sa tendresse, Même en vous abordant, menaçait sa maîtresse. [Voltaire, Zaïre]

    Menacer quelqu'un de quelque chose, le lui faire craindre. Nous verrons cet amour dont vous nous menacez. [Corneille, Tite et Bérénice] Un conquérant qui menaçait tout le Nord de la servitude. [Bossuet, Oraisons funèbres] D'un sinistre avenir je menaçai ses jours. [Racine, Iphigénie en Aulide]

    On peut dire aussi : menacer quelqu'un d'une personne. Et qui sait si Joad ne veut point en leur place [des rois de Juda] Substituer l'enfant dont le ciel vous menace ? [Racine, Athalie]

    Menacer, ayant une chose pour régime direct. Bien que.... mon père.... ....Et de verges souvent mes chansons menaçât. [Régnier, Satires] Ainsi tomba tout à coup la fureur des vents et des flots à la voix de Jésus-Christ, qui les menaçait. [Bossuet, Oraisons funèbres] Les dieux.... Le bras déjà levé menaçaient mes refus. [Racine, Iphigénie en Aulide] Nous partions, et déjà par mille cris de joie Nous menacions de loin les rivages de Troie. [Racine, ib.]

    Cet emploi est du langage poétique ou élevé ; car il y a là des personnifications ou des métonymies que le discours ordinaire n'admettrait pas.

    Absolument. Si sa main n'est armée, au moins son front menace. [Du Ryer, Scév. IV, 6] Toi.... - Pulchérie : Ne menace point, je suis prête à mourir. [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Quoique, sans menacer et sans avertir, elle [la mort] se fasse sentir tout entière dès le premier coup, elle trouve la princesse prête. [Bossuet, Oraisons funèbres] La ville royale [Paris] s'émeut, et Rome même menace. [Bossuet, Oraisons funèbres]

    Il se construit avec de et un infinitif. On me menace, Si je ne sors d'ici, de me bailler cent coups. [Molière, Les femmes savantes] Dieu même.... tant irrité contre nous, nous menace en sa colère d'abréger nos jours. [Bossuet, Oraisons funèbres] Au moindre bruit qui court qu'un auteur les menace De jouer des bigots la trompeuse grimace. [Boileau, Disc. au roi.]

    Il se construit avec que et le verbe suivant au conditionnel ou au futur. Ésope le menaça que ses mauvais traitements seraient sus. [La Fontaine, Vie d'Ésope.] Il tâche de l'intimider, il la menace qu'on dira à l'audience qu'elle.... [Sévigné, à Guitaut, 23 janv. 1682] Je menace que, si ma fille est encore grosse et toujours grosse, je n'irai point les voir. [Sévigné, ib. 2 déc. 1671]

    Par antiphrase, dans le discours familier, faire espérer. Il y a longtemps que vous me menacez de venir dîner chez moi ; venez-y donc demain.

  • 2 Fig. Il se dit des choses qui semblent menacer comme font les personnes. Là, sur une charrette, une poutre branlante Vient menaçant de loin la foule qu'elle augmente. [Boileau, Satires] Tel qu'un roc suspendu menace, au haut d'un mont, La terre de sa chute et le ciel de son front. [Masson, Helvét. III]
  • 3Avec un nom de chose pour sujet, il se dit des choses qui sont à craindre. Pour garantir le public et sa propre conscience des maux dont les menaçait l'infirmité de son âge. [Bossuet, Oraisons funèbres] Songez-vous aux malheurs qui nous menacent tous ? [Racine, Iphigénie en Aulide] Il s'est plaint d'un péril qui menaçait ses jours. [Racine, Esther] Rien ne menace tant d'une chute qu'une autorité qu'on pousse trop loin. [Fénelon, Télémaque]

    Être menacé de fièvre, d'apoplexie, dephthisie, etc. avoir à craindre d'être attaqué prochainement par une de ces maladies.

    On dit dans un sens analogue : être menacé d'une disgrâce, d'une banqueroute, etc.

    Menacer ruine, se dit d'un bâtiment qui est près de tomber. Une maison qu'il appelait son château et qui n'était, à parler proprement, qu'une masure, tant elle menaçait ruine de toutes parts ! [Lesage, Le diable boiteux]

    Fig. Cet empire, cet établissement menace ruine.

    Fig. Menacer ruine, se dit aussi des personnes malades ou vieilles dont la fin paraît prochaine. Nous avons bien des confrères qui menacent ruine, l'abbé Alary, le président Hénault, Paradis de Moncrif, qui sera bientôt Moncrif de Paradis. [D'alembert, Lett. à Voltaire, 25 janv. 1778]

    Il se construit, en cet emploi, avec de et un infinitif. Le choléra menaçait de gagner Paris. La discorde en ces lieux menace de s'accroître. [Boileau, Le lutrin]

    Fig. et poétiquement. Menacer le ciel, les cieux, se dit de certains objets fort élevés. Ces montagnes, ces arbres menacent le ciel.

  • 4Se menacer, vpron Faire des menaces l'un à l'autre. [Deux taureaux] à l'aspect l'un de l'autre embrasés, furieux, Déjà le front baissé, se menacent des yeux. [Boileau, Le lutrin] Le fatal sacrifice est encor suspendu ; On se menace, on court, l'air gémit, le fer brille. [Racine, Iphigénie en Aulide]

PROVERBE

Tel menace qui tremble, ou tel menace qui a grand'peur, c'est-à-dire celui qui menace a souvent plus de peur que celui qu'il menace. Tel tremble qui menace. [Mairet, Soliman]

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