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conjurer

vt (kon-ju-ré)
  • 1Projeter par complot, par ligue. Les Juifs virent mille fois.... tout l'univers conjurer leur ruine. [Massillon, Car. Vérité de la religion.] Dès qu'ils se sentirent de la force, on a vu qu'ils conjurèrent sa perte, et que ce fut de l'avis de leurs docteurs. [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes] Mille embûches toujours certaines Semblent conjurer vos malheurs. [Rousseau J.-b. Cantate, 14]

    vi Les ennemis de Rome conjuraient contre elle, ou elle conjurait contre ses ennemis. Cet ambitieux était toujours prêt à conjurer. [Dictionnaire de l'Académie Française] La France et l'Espagne, par manière de dire, sont conjurées contre lui seul. [Voiture, Lettres]

    Par extension. Conjurer contre quelqu'un, se concerter avec d'autres contre les intérêts de quelqu'un. Le monde entier conjure contre eux, et ils sont plus forts que le monde. [Massillon, Confér. Zèle contre les scandales]

  • 2 vt Exorciser. L'on ne voyait que des prêtres qui conjuraient des démons. [Voltaire, Le siècle de Louis XIV]
  • 3Détourner soit par des cérémonies religieuses soit par des pratiques magiques. Va porter tes présents aux autels des Furies, Conjure leurs serpents prêts à te déchirer. [Voltaire, Œdipe] Tout le peuple avec lui, conduit par le grand prêtre, Vient des dieux irrités conjurer les rigueurs. [Voltaire, ib. I, 1] Cet airain résonnant qui, balancé dans l'air, Intercédait le ciel et conjurait l'orage. [Masson, Helvétiens, v] Des prières.... Pour conjurer des sorcières L'oeil malfaisant tourné vers nous. [Béranger, Chev. et lait.] Un homme enfin sort de nos rangs ; Il dit : je suis le dieu du monde. L'on voit soudain les rois errants Conjurer sa foudre qui gronde. [Béranger, Ch. d'asile]

    Fig. Conjurer l'orage, détourner un péril, un malheur qui menace. C'est loin d'ici qu'il faut conjurer un orage. [Voltaire, Sémiramis] Quand par des soins prudents j'ai conjuré l'orage. [Voltaire, Octave et le jeune Pompée, ou Le triumvirat]

    On dit dans le même sens conjurer la colère céleste. Il ne put conjurer sa destinée.

  • 4Prier avec beaucoup d'instance. Je l'eusse conjuré de se donner la vie. [Corneille, La mort de Pompée] Pour la dernière fois, ingrat, je t'en conjure. [Corneille, Horace] Ils conjuraient ce Dieu de veiller sur vos jours. [Racine, Esther] Elle me conjurait de me donner à vous. [Racine, Bajazet] J'ose vous conjurer de ne vous perdre pas. [Corneille Th. Le comte d'Essex] Sa mère.... La conjure en tremblant de presser son départ. [Voltaire, Mariamne, III, 1]
  • 5 Terme de féodalité. Adresser à ses vassaux l'invitation dite semonce et conjure.
  • 6Se conjurer, se liguer. Les deux partis se conjurèrent pour renverser sa puissance.

REMARQUE

Conjurer, vi se conjugue avec l'auxiliaire avoir, quand on veut marquer l'action : ces deux puissances ont conjuré de le perdre ; avec l'auxiliaire être, quand on veut marquer l'état : ces deux puissances sont conjurées contre lui.

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7Conjurer de, s'entendre par conjuration pour. Quand tout ce qu'il y a d'hommes au monde auraient conjuré de vous servir, il n'y en aura jamais un qui le fasse avec plus d'affection. [Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne]
8Conjurer à, former une conjuration contre (peu usité). Assassiner sa patrie et conjurer à sa ruine sont les marques de grandeur et d'autorité. [Malherbe, ib.]
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