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fuir

(fuir), je fuis, nous fuyons, vous fuyez, ils fuient ; je fuyais, nous fuyions, vous fuyiez ; je fuis, nous fuîmes ; je fuirai ; je fuirais ; fuis, qu'il fuie, fuyons, fuyez ; que je fuie, que nous fuyions, que vous fuyiez ; que je fuisse, que nous fuissions ; fuyant ; fui.
  • 1 vi Se soustraire hâtivement à un péril, à une menace, à quelque chose ou à quelqu'un. Fuir de son pays. Fuir hors de sa patrie. Il fuit, lui qui, toujours triomphant et vainqueur, Vit ses prospérités égaler son grand coeur, Il fuit.... [Corneille, La mort de Pompée] Il fuit pour mieux combattre. [Corneille, Horace] Prince, il est temps de fuir quand on se défend mal. [Corneille, Oedipe] Enfin je l'ai fait fuir, et sous ce traitement De beaucoup d'actions il a reçu la peine. [Molière, L'amphytrion] Sa fierté l'abandonne, il tremble, il cède, il fuit. [Boileau, Le lutrin] Le roi vient ; fuyez, prince, et partez promptement. [Racine, Phèdre] Quiconque ne sait pas dévorer un affront.... Loin de l'aspect des rois, qu'il s'écarte, qu'il fuie. [Racine, Esther] Fuyez dans l'instant même, ou l'on va vous arracher la vie. [Voltaire, Zadig, ou La destinée] Charles le Téméraire périt devant Nancy, trahi par le Napolitain Campo Basso, et tué, en fuyant après la bataille, par Bausemont, gentilhomme lorrain. [Voltaire, Annales de l'Empire depuis Charlemagne] Fuyons ensemble au fond des forets ; il vaut encore mieux se fier aux tigres qu'aux hommes. [Bernardin de Saint-pierre, La chaumière indienne] Ce repos [dans une ville] et la honte de paraître fuir enflammèrent son imagination [de Napoléon] ; on l'entendit dicter des ordres... [Ségur, Histoire de Napoléon et de la Grande-Armée pendant l'année 1812]

    Quitter son pays, s'éloigner. Ce coup d'État, cette révolution a fait fuir bien des citoyens.

    Terme de chasse. Fuir, aller fuyant, galoper, courir, en parlant du daim, du cerf, etc.

    Terme de marine. Fuir devant le temps, fuir vent arrière, se dit d'un bâtiment qui, pris par un très gros temps, court avec une très grande vitesse en se laissant aller au vent. Fuir à cordes et à mâts, courir sans aucune voile dehors.

    Fuir, construit avec en, voir ENFUIR, à la remarque.

  • 2S'éloigner de, s'écarter de. Où fuirais-je de vous après tant de furie ? [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] Fuis plutôt de ses yeux, fuis de sa violence ; à ses premiers transports dérobe ta présence. [Corneille, Le Cid] Quel malheureux destin vous conduit à présent Dedans cette vallée effroyable et profonde, Où, pour fuïr de vous, je fuis de tout le monde ? [Racan, Berger. IV, 3] Je sais qu'il nous faut tous fuir de ces objets Qui laissent dans nos coeurs l'impression du vice. [Racan, Psaume C.] Tout fuit, tout se refuse à mes embrassements. [Racine, Phèdre]

    Fig. Il semble pourtant que, si Corneille avait voulu choisir des sujets plus dignes du théâtre tragique, il les aurait peut-être traités convenablement ; il aurait pu rappeler son génie qui fuyait de lui, on en peut juger par le début de Pulchérie. [Voltaire, Comment. sur Corn. Rem. Pulchérie, Préf.]

  • 3 Fig. Éluder, différer, échapper à une conclusion. Je ne puis terminer avec cet homme ; il fuit toujours.
  • 4En parlant des choses, passer, s'éloigner rapidement. Pareille à ces éclairs qui, dans le fort des ombres, Poussent un jour qui fuit et rend les nuits plus sombres. [Corneille, Horace] Que d'yeux étincelants, sous d'horribles paupières, Mêlent au jour qui fuit d'effroyables lumières ! [Corneille, La toison d'or] Je m'en vais, je suis emporté par une force inévitable ; tout fuit, tout diminue, tout disparaît à mes yeux. [Bossuet, Oraisons funèbres] Quand pourrai-je au travers d'une noble poussière Suivre de l'oeil un char fuyant dans la carrière ? [Racine, Phèdre] Au seul son de sa voix la mer fuit, le ciel tremble. [Racine, Esther] Sa patrie semble fuir devant lui. [Fénelon, Télémaque] Le port semblait fuir derrière nous. [Fénelon, Télémaque]

    Terme de menuisier. Outil qui fuit, outil échappant à la main qui ne le tient pas assez ferme en le poussant.

  • 5Il se dit du temps qui s'écoule rapidement. L'hiver a fui. Hâtons-nous, le temps fuit et nous traîne avec soi. [Boileau, Epîtres]
  • 6Ne pas échoir. Cette succession ne peut lui fuir.
  • 7Fuir de, avec un infinitif, avoir de la répugnance pour, éviter de.... Et fuirai, tant que je pourrai, de parler à lui. [D'urfé, Astrée, I, 9] Et, bornant tes désirs à ces dons éternels, Fuis d'être connu des mortels. [Corneille, L'imitation de Jésus-Christ] Si votre âme les suit et fuit d'être coquette. [Molière, L'école des femmes] Prince, je monte au trône ; et vous m'abandonnez ! Fuir d'en être témoin, est-ce chérir ma gloire ? [Corneille Th. Antioch. I, 3] La véritable vertu ne fuit pas toujours de se faire voir, mais jamais elle ne se montre qu'avec sa simple parure. [Bossuet, Sermons] Il fuyait d'entendre les vérités dont il eût eu droit de se glorifier. [Bourdaloue, 4e dim. après Pâq. Dominic. t. II, p. 168]

    Fuir à, avec un infinitif, éviter de ; locution qui a vieilli. Ne désire donc pas, fuis même à regarder Tout ce que sans péché tu ne peux posséder. [Corneille, L'imitation de Jésus-Christ]

  • 8Se dérober sous les pas. Le terrain qu'ils traversèrent fuyait sous leurs pas. [Staël, Corinne, ou l'Italie]
  • 9 Terme de peinture. Il se dit des parties du tableau qui paraissent s'enfoncer dans le lointain. Ce fond fuit très bien.

    Par analogie. Le front du nègre fuit en arrière.

    Terme de marine. La côte fuit dans telle aire de vent, son gisement a la direction de cette aire de vent.

  • 10Il se dit d'un vase ou tonneau qui laisse échapper le liquide. Le tonneau fuit.
  • 11 vt Éviter par crainte ou par aversion, se soustraire à. On ne vous oblige pas à fuir le monde en général ; mais on vous oblige à fuir un monde particulier qui vous pervertit. [Bourdaloue, Myst. conc. de la Vierge, t. II, p. 46] Leur sombre inimitié ne fuit point mon visage. [Racine, Britannicus] En fuyant mon rival, fuirez-vous ma présence ? [Racine, Mithridate] C'est peu de t'avoir fui, cruel, je t'ai chassé ; Pour mieux te résister, j'ai recherché ta haine. [Racine, Phèdre]

    Terme de manége. On dit d'un cheval, qui craint l'éperon : il fuit les talons.

    Faire fuir les jambes, les talons, apprendre au cheval à éviter la jambe que le cavalier approche de son flanc.

  • 12S'éloigner de, en parlant des personnes. ....J'ai fui la ville aux muses si contraire Et l'écho fatigué des clameurs du vulgaire. [Chénier, Élégies]

    Fig. Fuir le vice, le travail, l'occasion du péché. La paix a fui ce séjour. Je ne te puis blâmer d'avoir fui l'infamie. [Corneille, Le Cid] Il fuit plus que la mort la honte de servir. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] Il ne fuit rien tant tous les jours que d'exercer les merveilleux talents qu'il a eus du ciel pour la médecine. [Molière, Le médecin malgré lui] Ceux qui ne fuient rien tant que d'être hérétiques. [Pascal, Les provinciales] Ma muse tremblante fuit d'un si grand fardeau la charge trop pesante. [Boileau, Disc. au roi.]

    Il se dit dans un sens analogue des choses qui, métaphoriquement, s'éloignent. Je me vois réduit à chercher dans vos yeux une mort qui me fuit. [Racine, Andromaque] Aussitôt dans son sein il plonge son épée ; Mais la mort fuit encor sa grande âme trompée. [Racine, Mithridate] L'amour fuit la contrainte. [Racine, Bérénice] La santé que j'appelle et qui fuit mes douleurs, Bien sans qui tous les biens n'ont aucunes douceurs. [Chénier, Élégies]

  • 13Dépasser l'intelligence, la conception. Vous qui devez savoir les choses de la vie, Et que rien ne doit fuir en cet âge avancé. [La Fontaine, Fables] Entre les deux infinis qui l'enferment et qui le fuient. [Pascal, dans COUSIN]
  • 14Ne pas se présenter à l'esprit. Je trouve au coin d'un bois le mot qui m'avait fui. [Boileau, Epîtres]
  • 15Se fuir, vpron Fuir loin l'un de l'autre. Autrefois ils se recherchaient, aujourd'hui ils se fuient.

    Se distraire d'un remords, d'une peine. Il se tourmente, il s'agite pour fuir la mort qui le saisit, ou du moins pour se fuir lui-même. [Massillon, Avent, Mort du péch.] Irai-je, errant encore, et me fuyant moi-même.... ? [Voltaire, Œdipe]

REMARQUE

Fuir, qui est présentement monosyllabe, ne l'a pas été d'une manière constante ; Malherbe l'a fait de deux syllabes : Est-il courage si brave Qui pût avecque raison Fuïr d'être son esclave ? V, 3. Racan aussi, dans les exemples notés plus haut (n° 2). Elle [l'Académie] m'approuvera sans doute quand je dis que fuir est d'une seule syllabe, quoiqu'on ait décidé autrefois qu'il était de deux. [Voltaire, Correspondance]

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