gueux, euse
- 1Qui est necessiteux, réduit à mendier (ce qui se dit avec un sens de dédain plutôt que de pitié). Figurez-vous l'orgueilleux Diogène qui foulait aux pieds l'orgueil de Platon, les presbytériens d'Écosse ne ressemblent pas mal à ce fier et gueux raisonneur . [Voltaire, Dictionnaire philosophique]Familièrement. Être gueux comme un rat, comme un rat d'église, comme un peintre, c'est-à-dire être fort pauvre. Chartier [l'éditeur d'Hippocrate et de Galien] est plus gueux qu'un pauvre peintre, dix mille écus ne payeront pas ses dettes . [Patin, Lettres choisies]Tous ces blondins sont agréables.... la plupart sont gueux comme des rats . [Molière, L'avare]
- 2Qui n'a pas de quoi vivre selon son état ou ses désirs. Mais il aime sa fille et voudra s'informer ; S'il apprend qu'il est gueux ? [Hauteroche, Les Bourgeoises de qualité]Il est gueux, archigueux . [Corneille Th. Comt. d'Orgueil, II, 1]Choisir un gendre gueux... ? - Taisez-vous, s'il n'a rien, Sachez que c'est par là qu'il faut qu'on le révère . [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur]Quoique ses parents ne soient point gueux . [Sévigné, 148][Ces fous] Qui, toujours assignant et toujours assignés, Souvent demeurent gueux de vingt procès gagnés . [Boileau, Epîtres]Riche, gueux, triste ou gai, je veux faire des vers . [Boileau, Satires]C'est un duc assez malhonnête homme et fort gueux . [Maintenon, Lettres]Il s'offre deux partis, vous les chassez tous deux : Le premier est trop riche et le second trop gueux . [Regnard, Le distrait]Grâce à moi [muse] qu'il rendit moins folle, D'être gueux il se consolait . [Béranger, Épitaphe.]PROVERBEUn avare est toujours gueux, un avare se refuse le nécessaire.
- 3Il se dit des choses qui attestent la gueuserie. Un équipage gueux.Fig. Terme d'architecture. Corniche gueuse, corniche dénuée d'ornements. 
- 4 nm Celui qui fait métier de demander l'aumône. Mener une vie de gueux. Il rencontra un gueux couvert de pustules, les yeux morts, le bout du nez rongé.... [Voltaire, Candide, ou L'optimiste]Sages et fous, gueux et monarques, Apprenez un fait tout nouveau . [Béranger, Parq.]Il est jaloux comme un gueux de sa besace, il est très jaloux. Fig. C'est un gueux revêtu, se dit d'un homme de rien qui a fait fortune, et qui en est devenu arrogant. Fig. [Boileau] N'est qu'un gueux revêtu des dépouilles d'Horace . [Boileau, Satires]Gueux fieffé, mendiant qui se tenait toujours à la même place. Gueux de l'ostière, mendiant qui allait de porte en porte. Au fémin. Une gueuse, une mendiante. Vieilli en cet emploi. 
- 5Celui qui est dans la gêne, dont les ressources sont au-dessous de son état. C'étaient des gueux adorés des souverains et des peuples, que les consuls et les dictateurs de ce temps-là . [Guez de Balzac, De la gloire.]Diogène là-bas est aussi riche qu'eux [ceux qui entassent], Et l'avare ici-haut, comme lui, vit en gueux . [La Fontaine, Fables]Un gueux qui, quand il vint, n'avait pas de souliers, Et dont l'habit entier valait bien six deniers . [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur]Et tout gueux, quel qu'il soit, ne peut être qu'un sot . [Corneille Th. D. César d'Avalos, I, 3]Mon maître ? fi donc ! voilà un plaisant gueux pour une fille comme Angélique ! [Lesage, Crispin rival de son maître]Je n'ai pas voulu te parler au logis, de peur que mon gueux de mari ne nous écoutât . [Brueys, Avoc. Pat. I, 2]Des gueux chantons la louange ; Que de gueux hommes de bien ! [Béranger, Chansons]Ce qui a le caractère mesquin. Non de ces gueux d'avis dont les prétentions Ne parlent que de vingt ou trente millions . [Molière, Les fâcheux]
- 6 Terme de dédain qu'on applique à des gens de mauvaise apparence ou de mauvaise conduite. Je veux le faire, moi, mourir sous le bâton, Ou le gueux dès ce soir quittera ma maison . [Destouches, Le glorieux]Mandrin, suivi de cinquante gueux, met une ville entière à contribution ; dès qu'il est entré par une porte, on dit à l'autre qu'il vient avec quatre mille combattants et du canon . [Voltaire, Dictionnaire philosophique]Les petits gueux [des enfants en haillons] quittèrent aussitôt le jeu en laissant à terre leurs palets, et tout ce qui avait servi à leur divertissement . [Voltaire, Candide, ou L'optimiste]Il se dit au féminin dans le même sens. N'est-ce pas là cette gueuse que vous chassâtes hier ? [Brueys, Grondeur, II, 16]C'est du fond d'un vieux carrosse traîné par deux chevaux étiques, que cette gueuse de marquise m'a fait insulter par des laquais tout déguenillés . [Dancourt, Le chevalier à la mode]Particulièrement. Coquin, fripon. Méfiez-vous de cet homme, c'est un gueux. Au féminin. Très familièrement, une coquine, une femme qui vit mal. Monsieur, défiez-vous des gueuses de Paris . [Hauteroche, L'Esprit follet ou La Dame invisible]La querelle [du fils aîné du comte d'Auvergne et du chevalier de Quélus] était venue pour du cabaret et des gueuses . [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon]
- 7Gueux de, dans le langage populaire, s'emploie comme diable de. Une gueuse de souris qui m'empêche de dormir. Je souffre toujours de mon gueux de rhumatisme.
- 8 nm pl. Les gueux, nom que prirent au seizième siècle les huguenots des Flandres, à l'occasion du discours peu mesuré de Marguerite de Parme, gouvernante des Pays-Bas, qui avait dit en parlant des seigneurs calvinistes que c'était des gueux qu'elle ne redoutait pas.Gueux de mer, s'est dit des marins hollandais qui armèrent à la Brielle, en 1572, pour faire la course contre les Espagnols. Gueux des bois, s'est dit, à la même époque, des paysans armés qui commencèrent à faire la guerre en partisans, pour fonder l'indépendance des Provinces-Unies. 
- 9 nm Espèce d'oiseau de mer.
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On a retrouvé une de ces chaufferettes en terre rouge dite gueux, et l'on suppose que la pauvre vieille s'était endormie dans son fauteuil ayant sous les pieds ce gueux qui a mis le feu à ses vêtements. le Droit, 10 nov. 1871]
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