soûl, oûle
- 1Pleinement repu, extrêmement rassasié.
Laisse-les [des mouches], je te prie, achever leur repas, Ces animaux sont soûls ; une troupe nouvelle Viendrait fondre sur moi, plus âpre et plus cruelle
. [La Fontaine, Fables]Quand j'ai bien mangé, je veux que tout le monde soit soûl dans ma maison
. [Molière, Le médecin malgré lui]Familièrement. Être soûl de quelque chose, en être rassasié jusqu'au dégoût.
M'en voilà soûl, reprit le sire, Et quoi toujours pâtés au bec !
[La Fontaine, Pâté d'anguille.]Fig. Être soûl de quelque chose, en être rebuté, ennuyé. Je suis si soûl de cet homme-là, que je ne puis le souffrir.
Je suis soûl de servir le chapeau dans le poing
. [Régnier, Épîtres]Si leurs désirs [des d'Albret] n'en sont contents, Et que plus haut leur âme aspire, Je serai le premier à dire Qu'ils auront tort, et que les coeurs Ne sont jamais soûls de grandeurs
. [La Fontaine, Poés. mêl. 33]Jamais je n'ai été si soûl de sottises
. [Molière, Monsieur de Pourceaugnac]Absolument.
[Messaline] Lasse, dis-je, et non soûle enfin s'est retirée
. [Régnier, Satires]Bon dieu ! combien sont-ils [certains favoris] ingénieux à inventer de nouveaux plaisirs à une âme soûle et dégoutée !
[Guez de Balzac, Ariste, ou De la cour] - 2Plein de vin, ivre.
...les centaures soûls au bourg Atracien....
[Régnier, Satires]Bref, je jure ce dieu qui naquit d'une cuisse, Un jour que Jupiter était soûl comme un Suisse
. [Maître Adam Billaut, Oeuvr. p. 223, dans POUGENS]Être soûl comme une grive, être très soûl.
- 3Substantivement, avec mon, ton, son, leur, autant qu'on veut, autant que cela est suffisant.
Par une générosité inouïe en une maîtresse de tripot, [elle] permit au charretier de faire manger ses bêtes tout leur soûl
. [Scarron, Le Roman comique]Au bout de la semaine, ayant dîné son soûl, Elle entend quelque bruit, veut sortir par le trou
. [La Fontaine, Fables]Un vieux ladre, un vieux fou Qui ne mangeait du pain que le quart de son soûl
. [Boursault, Lett. nouv. t. II, p. 131, dans POUGENS]Est-il permis de boire et de manger tout son soûl sans nécessité et pour la seule volupté ?
[Pascal, Les provinciales]Horace a bu son soûl lorsqu'il voit les Ménades
. [Boileau, L'art poétique]Fig. Dans le langage familier, et alors il se met quelquefois avec l'article le. Il a eu du mal, de la peine tout le soûl, tout son soûl.
Nous pouvons de la sorte Nous battre tout le soûl, si le coeur vous en dit
. [Scarron, Le Jodelet, ou Le maître valet]" Dieu merci, on ne se plaindra pas qu'on ne l'ait laissé parler tout son soûl, " que dites-vous de ces belles paroles [d'un juge de Fouquet] ? ne sont-elles pas d'un fort bon juge ?
[Sévigné, Lett. à Pompone, 1er déc. 1664]Villars ne s'était pas contraint de dire, en parlant des puissances, que, s'il ne leur fallait que du plat de la langue, il leur en donnerait tout leur soûl
. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon]N'ayant plus de maîtresse, et n'ayant pas un sou, Nous philosopherons maintenant tout le soûl
. [Regnard, Le joueur]PROVERBE
Il n'est pas soûl qui n'a rien mangé.
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