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douter

vi (dou-té)
  • 1Ne savoir si l'on doit croire ou ne pas croire quelque chose. Je doute qu'il vienne. Je ne doute pas qu'il ne vienne. Doutez-vous que je sois malade ? S'il y a quelque justice dans le ciel, comme personne n'en doute.... [Guez de Balzac, Correspondance] Ils n'osent plus douter de nous avoir surpris. [Corneille, Le Cid] Et je doute comment vous portez cette mort. [Corneille, Horace] Je doute quel rival s'en fait mieux écouter. [Corneille, Suréna] Il ne faut point douter qu'il fera ce qu'il peut. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] Et je ne doute point, quoi qu'il n'en ait rien dit, Que tu ne sois de tout le complice maudit. [Molière, Le bourgeois gentilhomme] A vous dire vrai, je doute fort que vous puissiez réussir. [Molière, La princesse d'Élide] Je ne doute point que la vraie dévotion ne soit la source du repos. [La Bruyère, XIV] Ne doutez point, seigneur, que ce coup ne la frappe, Qu'en reproches bientôt sa douleur ne s'échappe. [Racine, Britannicus] Doutez-vous que l'Euxin ne me porte en deux jours Aux lieux où le Danube y vient finir son cours ? [Racine, Mithridate] Thésée est mort, madame, et vous seule en doutez. [Racine, Phèdre] Je doute que le ris excessif convienne aux hommes qui sont mortels. [La Bruyère, XI] Je doute que ce fût toi qui serais en reste. [Rousseau, Julie, ou la Nouvelle Héloïse]

    Douter si. Je doute si je serai en mesure d'accomplir ma promesse. Dorante : Et quel est ce portrait ? - Lise : Le faut-il demander, Et doutez-vous si c'est ma maîtresse elle-même ? [Corneille, Le menteur] Ingrat, je doute encor si je ne t'aime point. [Racine, Andromaque] Livrer Psyché aux désirs d'un monstre ? y avait-il de la justice à cela ? aussi les parents de la belle doutèrent longtemps s'ils obéiraient. [La Fontaine, Psyché, I, p. 30]

    Douter qui, quels, ne pas savoir qui.... quels.... Ce sage inébranlable [Caton], avant que de Pompée Il eût vu la vaillance injustement trompée, Doutant à qui l'État devait être soumis, Dans l'un et l'autre chef voyait ses ennemis. [Brébeuf, Phars. IX] Ainsi, de tous côtés lorsque souffle l'orage, La mer doute à quels vents doit obéir sa rage. [Delille, Les trois règles de la Nature]

    Douter où, ne pas savoir en quel lieu. Que les Romains, pressés de l'un à l'autre bout, Doutent où vous serez et vous trouvent partout. [Racine, Mithridate]

  • 2Douter de quelqu'un, n'avoir pas confiance en lui. Cet homme est suspect ; on doute de lui dans son parti. On doutait de sa probité. Et l'on doute d'un coeur qui n'a point combattu. [Corneille, Polyeucte] Je me fais de sa peine une image charmante, Et je l'ai vu douter du coeur de son amante. [Racine, Britannicus] Il doute de sa fille et de ses sentiments. [Voltaire, Zaïre] Par la fortune Athènes détrônée Maudit Philippe et douta de ses dieux. [Béranger, Waterl.]
  • 3Être dans le scepticisme soit à l'égard des dogmes de la révélation, soit à l'égard des propositions de la philosophie. Il n'a jamais douté des mystères de la religion.

    Absolument. C'est avoir beaucoup avancé que d'avoir seulement appris à douter. Non que j'imitasse pour cela les sceptiques, qui ne doutent que pour douter, et affectent d'être toujours irrésolus. [Descartes, Discours de la méthode] C'est une partie de bien juger que de douter quand il faut. [Bossuet, Traité de la connaissance de Dieu et de soi-même] Et qu'aux derniers moments les beaux esprits qui doutent Ne sont pas assurés que les dieux les écoutent. [Boursault, Ésope à la cour, III, 3] Leibnitz ne savait pas douter assez. [Bonnet, Oeuvres mêlées, t. XVIII, p. 93, note 7, dans POUGENS.]

  • 4Hésiter. Il ne douta pas un seul instant. Il doutait de recevoir un tel présent. Que ferez-vous ? - J'en doute. [Corneille, Suréna] Pourriez-vous un moment douter de l'accepter ? [Racine, Athalie] Et vous doutez encor d'asservir ses fureurs. [Voltaire, L'orphelin de la Chine]

    Ne douter de rien, trancher les questions qu'on ne connaît pas bien, se jeter sans réflexion dans des entreprises hasardeuses. Les grands, une fois corrompus, ne doutent de rien. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque]

    Ne douter de rien signifie aussi se faire illusion, voir tout du beau côté.

    Il ne doute jamais, il ne suspend jamais son jugement, sa décision.

  • 5N'être pas sûr de conserver. Elle s'était trouvée malade jusqu'à faire douter de sa vie. [Scarron, Le Roman comique]
  • 6Se douter, vpron Conjecturer, soupçonner. Je ne me doutais pas qu'il vînt. Pouvais-je me douter qu'il dût venir si tôt ? Je me doutais qu'il viendrait. Elle s'est doutée de ce qui se faisait. Je me doute qu'il viendra me voir. Je me doute à peu près quel est le gouverneur. [Tristan, Panthée] ....Je m'en doutais, seigneur, que ma couronne Vous charmait bien du moins autant que ma personne. [Corneille, Nicomède] Je me doutais bien aussi que les prophéties auraient été entièrement fausses à l'égard de Vardes. [Sévigné, Lett. 27 mars 1671]

    Ne pas se douter, ignorer, ne pas soupçonner. Moi qui.... Pour mourir, d'aucun mal ne me fusse douté. [Régnier, Satires] Il y voit des choses qui lui sont nouvelles dont il ne se doutait pas. [La Bruyère, XI]

REMARQUE

1. Douter suivi de que veut toujours le subjonctif : Je doute que cela soit vrai.

2. Lorsque la phrase est négative, le verbe au subjonctif prend ne. Oui, je ne doute point que l'hymen ne vous plaise. [Molière, L'école des femmes] Je ne crois pas qu'on puisse douter que Ninus ne se soit attaché à l'Orient. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Tous eurent le courage de lui être fidèles ; et lui, de ne pas douter qu'ils ne le fussent. [D'alembert, Éloges, milord Maréchal] Cependant on peut supprimer le ne : Je ne doute pas que cela soit vrai.

3. Si la phrase est interrogative, en met ordinairement ne : Doutez-vous que cela ne soit vrai ? cependant ne peut être supprimé : Doutez-vous que cela soit vrai ?

4. En cet emploi, douter peut se tourner par révoquer en doute ; et alors on peut, s'il s'agit d'une action qui n'est pas encore faite, mettre le futur de l'indicatif : Je ne doute pas qu'il fera tout ce qu'il pourra.

5. Corneille a dit : Outre que le succès est encore à douter, Héracl. III, 1. Là-dessus Voltaire remarque : (r) Le succès est à douter est un solécisme. On ne doute pas une chose, elle n'est pas doutée. Le verbe douter exige toujours la préposition de. " Cela est incontestable dans l'usage actuel. Mais dans l'usage ancien il en était autrement ; et Corneille a seulement usé d'un archaïsme : douter, dans l'ancien français, est actif et signifie craindre, tenir pour suspect. Cet archaïsme se trouve aussi dans Molière : Sous couleur de changer de l'or que l'on doutait, l'Étour. II, 7.

6. Douter dans l'ancienne langue signifiait redouter ; se douter signifia d'abord avoir peur, puis, par une extension facile, imaginer, soupçonner. Se douter rentre donc dans la catégorie des verbes se connaître, s'apercevoir, s'entendre, voy. S'APERCEVOIR, Remarque 2.

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