Voir les citations avec "enfler"

enfler

vt (an-flé)
  • 1Remplir de souffle, d'air. Viendrai-je, en une églogue entouré de troupeaux, Au milieu de Paris enfler mes chalumeaux ? [Boileau, Satires]

    Grossir, en remplissant d'air, de gaz. Enfler un ballon. Enfler ses joues. De tels bienfaits enflent la bouche de la renommée. [Voltaire, Correspondance]

    Le vent enfle les voiles, il les rend tendues par le souffle. Le génie qui m'inspirait m'abandonna ; mon esprit et mon âme tombèrent languissants comme les voiles d'un navire auquel tout à coup manque le vent qui les enflait. [Marmontel, Mémoires d'un père pour servir à l'instruction de ses enfants] Il voit les passions, sur une onde incertaine, De leur souffle orageux enfler la voile humaine. [Lamartine, Méditations poétiques]

    Fig. Enfler les voiles, se dit de ce qui favorise, fait avancer. Le vent de la faveur enflait leurs voiles.

    Grossir en remplissant d'un liquide. L'eau enfle le ventre d'un hydropique. Les efforts que le petit homme avait faits pour tirer son pied hors du pot l'avaient enflé. [Scarron, Le Roman comique] Tes prés [de la France] enflent de lait la féconde génisse. [Chénier, Hymne à la France.]

  • 2 Fig. Faire paraître plus grand par une sorte d'enflure. Bien différent de ceux qui rassemblent le plus de titres qu'ils peuvent et qui croient augmenter leur mérite à force d'enfler leur nom. [Fontenelle, Hartsoeker.] Aussitôt.... tu verras poëtes, orateurs.... De tes titres pompeux enfler leurs dédicaces. [Boileau, Satires]
  • 3Enfler la voix, un son, les renforcer. Chasseur, tu rapportes ta bête, Et de ton cor enfles le son. [Béranger, D. chasse.]
  • 4Augmenter par l'afflux d'un liquide. Les pluies ont enflé la rivière.

    Fig. De mille exploits fameux enfler ma renommée. [Corneille, Le menteur] Qu'importe de mon coeur, si je suis mon devoir, Et si mon hyménée enfle votre pouvoir ? [Corneille, Sertorius] Dès l'abord il sut vaincre, et j'ai vu la victoire Enfler de jour en jour sa puissance et sa gloire. [Corneille, ib. v, 1] Ma voix, depuis dix ans qu'il commande une armée. A-t-elle refusé d'enfler sa renommée ? [Corneille, Nicomède] Nous avons beau enfler nos conceptions, nous n'enfantons que des atomes. [Pascal, dans COUSIN] La pluralité des titres que vous possédez et qui enflent si fort votre revenu. [Massillon, Confér. Reven. ecclésiast.]

  • 5Exagérer, surfaire. Enfler la dépense. On leur exagère toujours les inconvénients d'un état où l'intérêt d'une maison ne les demande pas ; on leur enfle les avantages et les agréments de celui auquel on les destine. [Massillon, Car. Vocat.] Pas davantage, suivant notre calcul, que j'ai un peu enflé. [Voltaire, L'homme aux quarante écus] Il y a apparence que ce prince [l'empereur Macrin] enflait les choses. [Montesquieu, Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence] M. Adam ignorait et cachait son mérite avec le même soin que tant d'autres se donnent pour étaler et pour enfler le leur. [D'alembert, Éloges, Jacq. Adam.] On ne m'accusera pas d'enfler mes mémoires. [Picard, Duhautcours]

    Terme de pratique. Enfler le cahier, les rôles, y mettre des choses inutiles, afin de les allonger et de se faire payer plus cher.

  • 6Donner plus de force à certains sentiments. Ses satrapes enflaient ses espérances. [Vaugelas, Q. C. liv. III, dans RICHELET] Cela enfle le courage des Tyriens. [Vaugelas, ib. IV, dans RICHELET] Ne porter qu'un faux jour dans son obscurité, C'était de ce prodige enfler la cruauté. [Corneille, Oedipe] Non, j'ai peint votre coeur dans une indifférence Qui n'enfle d'aucun d'eux, ni n'abat l'espérance. [Corneille, Le Cid] L'orgueil de ma naissance enfle encor mon courage. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] [Il] Enfle l'avidité de mes ressentiments. [Corneille, Attila]

    Inspirer de l'orgueil, de la confiance, de la présomption. Ce nouvel éclat de votre dignité Lui doit enfler le coeur d'une autre vanité. [Corneille, Le Cid] La gloire de ce choix m'enfle d'un juste orgueil. [Corneille, Horace] Quand la gloire nous enfle, il sait bien comme il faut Confondre notre orgueil qui s'élève trop haut. [Corneille, ib. v, 1] Cette haute vertu dont le ciel et le sang Enflent toujours les coeurs de ceux de notre rang. [Corneille, La mort de Pompée] Les bons succès nous enflent. [Fléchier, Oraisons funèbres] Les richesses qu'ils ont acquises par le commerce et la force de l'imprenable ville de Tyr, située dans la mer, avaient enflé le coeur de ces peuples. [Fénelon, Télémaque] Les sciences nous enflent, l'ignorance nous égare. [Massillon, Carême, Prière 2]

    Absolument. Vous allez donc voir.... la force confondue par la faiblesse, la science qui enfle céder à la simplicité qui édifie. [Massillon, Panég. St Franç. de P.]

  • 7Enfler son style, écrire d'une manière ampoulée.
  • 8 Terme d'orfévrerie. Agrandir au marteau, sur la bigorne, les parties inférieures des pièces d'argenterie qui doivent former le ventre, comme aux pots à l'eau, aux cafetières.
  • 9 vi Devenir plus gros. Avec de l'eau bouillante on fait enfler l'orge d'un tiers. Le bras piqué enflait à vue d'oeil. Sa gorge enfle, et du sang dont le cours s'épaissit Le passage se ferme ou du moins s'étrécit. [Corneille, Attila] Mais qui fait enfler la Sambre Sous les jumeaux effrayés ? [Boileau, Ode I]

    Le lait enfle, il se soulève par l'action de la chaleur.

  • 10S'enfler, vpron Devenir enflé. Le ballon s'enfla lentement. Une grenouille vit un boeuf Qui lui sembla de belle taille ; Elle qui n'était pas grosse en tout comme un oeuf, Envieuse, s'étend, et s'enfle et se travaille. [La Fontaine, Fables] Il y a dans l'esprit comme un levain d'orgueil qui s'enfle et se dilate par la science. [Fléchier, Panég. II, 233] Les voiles s'enflent d'un vent favorable. [Fénelon, Télémaque]

    Devenir tuméfié. Il se donna une entorse, et son pied s'enfla beaucoup. Cette gorge qui s'enfle. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes]

    Être soulevé. L'onde s'enfle dessous [les vaisseaux], et d'un commun effort Les Maures et la mer montent jusques au port. [Corneille, Le Cid]

    Devenir plus gros, plus ample. Par qui le monde entier.... L'a vu [le peuple de Rome] cent fois marcher sur la tête des rois, Son épargne s'enfler du sac de leurs provinces. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] Leur trésor n'a pas besoin de s'enfler des faibles débris d'une famille malheureuse. [Voltaire, Précis du siècle de Louis XV] Tout à coup la flamme engourdie S'enfle, déborde ; et l'incendie Embrase un immense horizon. [Lamartine, Méditations poétiques]

  • 11S'enorgueillir. Voyez comme elle s'enfle et d'orgueil et d'audace. [Corneille, Médée] Certes, si je m'enflais de ces vaines fumées Dont on voit à la cour tant d'âmes si charmées. [Corneille, Théodore et Héraclius] Que veraient-ils en eux qu'ils pussent estimer, S'ils voyaient devant toi ce qu'est leur chair fragile ? Comment souffriraient-ils qu'une masse d'argile S'enflât contre la main qui vient de la former ? [Corneille, L'imitation de Jésus-Christ] Ne vous enflez donc pas d'une si grande gloire. [Molière, Le misanthrope] Le zèle qui prend sa source dans la charité, c'est un zèle doux et patient : il ne s'irrite point, il ne s'enfle point. [Massillon, Confér. Zèle p. le sal. des âmes.] Nous autres juges, [nous] ne nous enflons pas d'une vaine science. [Montesquieu, Lettres persanes] Il était impossible que la plupart des jésuites ne s'enflassent du vent de ces deux hommes [le P. de la Chaise et le P. le Tellier], et qu'ils ne fussent aussi insolents que les laquais du marquis de Louvois. [Voltaire, Dictionnaire philosophique]

    Être exagéré. Il y a tant d'hommes naturellement outrés et dans la bouche desquels tout s'enfle, tout grossit, tout sort de la vérité simple et naturelle. [Massillon, Car Pard. des off.]

    Prendre un ton, un style ampoulé. Un poëte s'enfle, se guinde, Et se croit au sommet du Pinde Pour de grands mots vides de sens. [Lamotte, Odes, t. I, p. 421, dans POUGENS]

  • rechercher