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payer

vt (pè-ié)

Je paye, tu payes, il paye ou paie, nous payons, vous payez, ils payent ou paient ; je payais, nous payions, vous payiez ; je payai ; je payerai, ou paierai, ou paîrai ; je payerais, ou paierais, ou paîrais ; paye, payons ; que je paye, que nous payions, que vous payiez ; que je payasse ; payant ; payé (on ne conçoit pas pourquoi l'Académie ne conjugue pas ce verbe exactement comme employer, et ne substitue pas partout l'i à l'y grec devant l'e muet).

  • 1Acquitter une dette. Non, en conscience ; vous en paierez cela [ce prix]. [Molière, Le médecin malgré lui] Le maréchal de Bellefond.... s'est accommodé avec ses créanciers : il leur a cédé le fonds de son bien, et donné plus de la moitié du revenu de sa charge pour achever de payer ses arrérages. [Sévigné, 29] Il [Guitaut] me paraît fort occupé de son salut.... il est possédé de l'envie de payer ses dettes.... c'est le premier pas que l'on fait dans ce chemin, quand on sait sa religion. [Sévigné, 25 août 1677]

    Faire un versement imposé. Les députés [de Copenhague] se mirent à genoux devant lui : il fit payer à la ville quatre cent mille risdales, avec ordre de faire voiturer au camp toutes sortes de provisions, qu'il promit de faire payer fidèlement. [Voltaire, Histoire de Charles XII]

  • 2Il se dit en parlant de ceux à qui on doit. Il [un médecin] s'est vanté qu'il ne voulait point faire de visite qu'on ne lui avançât une demi-pistole, et voulait être payé avant le coup, comme les bourreaux. [Patin, Lettres choisies] Je vous payerai, lui dit-elle, Avant l'oût, foi d'animal, Intérêt et principal. [La Fontaine, Fables] Monsieur paye le rôtisseur et le cuisinier, et c'est toujours chez madame qu'on a soupé. [La Bruyère, III] Les Suisses, qui depuis Charles VIII faisaient usage de leur liberté pour se vendre à qui les payait. [Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations et sur les principaux faits de l'histoire depuis Charlemagne jusqu'à Louis XIII]

    Fig. Aujourd'hui nul en vain ne paraît enflammé ; On n'attend point la récompense D'une triste persévérance ; On est payé comptant et souvent par avance. [La Fare, Ballade.]

    Se faire bien payer, vendre cher ses services, son travail.

    Se faire payer, tirer profit de services qui devraient être gratuits.

  • 3Il se dit en parlant de la chose pour laquelle on doit. Payer des marchandises. Et l'on m'a mis en main une bague à la mode, Qu'après vous payerez, si cela l'accommode. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] Et il paiera pour tous les autres ce que les autres loueront pour lui. [Molière, Le bourgeois gentilhomme] L'héritier prodigue paye de superbes funérailles, et dévore le reste. [La Bruyère, VI]

    Payer une obligation, un billet, etc. payer la somme qui y est portée.

    Payer pinte, chopine, bouteille à quelqu'un, mener quelqu'un boire au cabaret, et payer pour lui.

    Fig. et familièrement. Payer les violons, voir VIOLON.

    Fig. Payer les pots cassés, voir POT.

    Fig. et par menace. Il me le payera, c'est-à-dire je trouverai le moyen de me venger de lui. Je te pardonne ; (bas, à part) mais tu le paieras. [Molière, Le médecin malgré lui] J'ai pardonné à l'archidiacre ; j'ai oublié Fréron ; mais Omer me le payera. [Voltaire, Correspondance] J'ai de la rancune de prince ; Mon bon roi, vous me le paierez. [Béranger, Mes jours gras.]

    Il le payera plus cher qu'au marché, il me le payera au double, c'est-à-dire je lui ferai plus de mal qu'il ne m'en a fait.

    L'usage veut qu'on dise : il me le payera, et non il me la payera. Cependant on trouve la dans Molière : Fût-ce mon propre frère, il me la payerait. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps]

    Cela est à payer, se dit de ce qui est excellent en son genre. Cet homme est à payer pour son originalité.

    Fig. Payer le tribut à la nature, mourir. Tous deux [les médecins] s'étant trouvés différents pour la cure, Leur malade paya le tribut à nature. [La Fontaine, Fables]

    On dit aussi payer le droit de la nature. Avant de payer le droit de la nature. [Corneille, Inscr. mises sous des estampes (damoiselle Ranquet)] Votre mère a payé les droits à la nature. [Regnard, Démocrite]

    Fig. Payer le tribut à la faiblesse humaine, avoir quelqu'une des imperfections, faire quelqu'une des fautes auxquelles les hommes sont sujets.

  • 4 Absolument. Il refuse de payer. Grande dispute à qui la première payera. [La Fontaine, Cord.] Que quelques citoyens ne payent pas assez, le mal n'est pas grand, leur aisance revient toujours au public ; que quelques particuliers paient trop, leur ruine se tourne contre le public. [Montesquieu, L'esprit des lois] On lui apporta [à Charles XII] des vivres, parce qu'il fallait obéir ; mais on ne s'attendait guère que des vainqueurs daignassent payer.... [Voltaire, Histoire de Charles XII] Quiconque paye [il s'agit de l'amour que l'on paye], fût-il le plus aimable des hommes, par cela seul qu'il paye, ne peut être longtemps aimé. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation] Ni l'Europe ni l'Asie ne payent entièrement avec des métaux ; nous donnons en échange des draps, du fer, du plomb, du cuivre, du corail.... [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes]

    Payer bien, payer mal, être généreux, être chiche en payant. C'était un roi qui payait mal ; Il n'est pas le seul en l'histoire. [La Fontaine, Fragm. du songe de Vaux.]

    Payer ric-à-ric, voir RIC-À-RIC.

    Il ne veut ni compter ni payer, se dit d'un homme dur à la desserre.

    Payer en chats et en rats, payer par parcelles et en mauvaises denrées.

    Fig. Payer en monnaie de singe, voir SINGE.

    Fig. Payer en même monnaie, voir MONNAIE, n° 6.

    Payer pour, être puni en place de. Cette victime publique qui doit payer pour tout le monde. [Guez de Balzac, Correspondance] Un seul pour plusieurs payera. [Scarron, Virgile travesti] S'il est périlleux de tremper dans une affaire suspecte, il l'est encore davantage de s'y trouver complice d'un grand : il s'en tire, et vous laisse payer doublement, pour lui et pour vous. [La Bruyère, IX.] On est au guet pour attraper les contrevenants, et les premiers pris payeront pour les autres. [Dancourt, Déroute du phar. SC. 22]

    En un autre sens. Payer pour, être puni à cause de. C'est à nous à payer pour les crimes des nôtres. [Racine, La Thébaïde, ou Les frères ennemis]

    Terme de marine. Une pièce de bois paie pour une autre, lorsqu'elle a un excédant qui remplace le trop peu d'une autre pièce assemblée avec la première.

  • 5Être sujet, soumis à quelque impôt. Ce marchand paye cent francs de patente. L'hectolitre de vin paye tant d'entrée. Les contributions que paye un département.
  • 6Corrompre à prix d'argent. On paya ce domestique pour qu'il livrât les papiers de son maître. Payer des assassins.
  • 7 Fig. Récompenser, reconnaître. Je ne serai pas ingrat, répondis-je, je paierai votre secret d'un autre qui n'est pas si important, mais qui n'est pas peu considérable. [Retz, Mémoires] L'un est payé d'un mot, et l'autre d'un coup d'oeil. [Boileau, Satires] Lorsqu'un heureux hymen, joignant nos destinées, Peut payer en un jour les voeux de cinq années. [Racine, Bérénice] On a payé le zèle, on punira le crime. [Racine, Esther] Cette veuve inhumaine N'a payé jusqu'ici son amour que de haine. [Racine, Andromaque] La terre le payait de ses peines avec usure, et ne le laissait manquer de rien. [Fénelon, Télémaque] Envieux par nature, et brigands par métier, Ils vendent l'infamie à qui la veut payer. [Chénier M. J. la Calomn.]

    Absolument. être prompt à payer et tardif à punir. [Rotrou, Venceslas]

    Payer quelqu'un de retour, répondre à ses procédés, à ses sentiments.

    Par antiphrase. Puisse le juste ciel dignement te payer ! [Racine, Phèdre]

    Payer d'ingratitude, manquer de reconnaissance. Jérusalem, qui n'as payé mes bienfaits que d'ingratitude. [Bossuet, Sermons] Oui, dût-il me payer par son ingratitude. [Chénier M. J. Gracques, I, 1]

  • 8Dédommager. La gloire de leur mort m'a payé de leur perte. [Corneille, Horace] Quoiqu'ils [les dieux] fissent pour moi, leur funeste bonté Ne me saurait payer de ce qu'ils m'ont ôté. [Racine, Phèdre]

    Fournir l'équivalent. Nous avons ri aux larmes de cette fille qui.... nous vous mandons souvent des folies ; mais nous ne pouvons payer celle-là. [Sévigné, 12 janv. 1676]

  • 9Obtenir, acquérir quelque chose par un sacrifice. Mon père paya cher ce dangereux honneur. [Racine, Mithridate] Fais-lui payer bien cher un bonheur qu'il ignore. [Racine, Britannicus] Je payai bien l'aisance pécuniaire où me mit cette pièce par les chagrins infinis qu'elle m'attira. [Rousseau, Les confessions]
  • 10Expier. Néarque a payé son forfait. [Corneille, Polyeucte] Et ce sont ces plaisirs et ces pleurs que j'envie, Que tout autre que lui me paierait de sa vie. [Racine, Britannicus] Et ma vie Ne peut payer le sang dont ma main s'est rougie. [Voltaire, Alzire, ou Les américains] Ah ! qu'il va me payer sa fourbe abominable ! [Voltaire, Zaïre] J'avoue que j'ai vu, dans nos histoires, des exemples qu'on a payé de son bien une erreur, qu'on a cédé sa maîtresse, qu'on a préféré une mère à l'objet de son amour. [Voltaire, Zadig, ou La destinée] Albéroni affichait l'autorité la plus absolue, et déclarait aux secrétaires d'État que, s'ils s'écartaient de ses ordres, ils le payeraient de leur tête. [Duclos, Oeuvr. t. V, p. 335]

    Absolument. Et tout autre que vous, malgré cette conquête, Revenant sans mon ordre, eût payé de sa tête. [Corneille, Nicomède]

  • 11Punir. On l'a payé de son insolence.

    Il a été bien payé de l'injure qu'il a dite, il en a reçu une punition exemplaire.

    Absolument. Il a été payé, il a reçu son fait, il a été traité comme il le méritait.

  • 12Satisfaire à ce qu'on doit, à ce qu'on fait attendre. À peine ai-je.... dans le port payé l'offrande de mes voeux. [Régnier, Élégies] Il est temps de montrer cette ardeur et ce zèle Qu'au fond de votre coeur mes soins ont cultivés, Et de payer à Dieu ce que vous lui devez. [Racine, Athalie] Paul Véronèse promet beaucoup et paye ce qu'il promet ; Raphaël et le Corrége promettent peu et payent beaucoup. [Montesquieu, Goût, je ne sais quoi.]

    Payer de raison ou de raisons, donner de bonnes raisons. Vous me payez de raison, et vous le prenez sur un ton qui mérite qu'on vous pardonne. [Sévigné, 55] Il vous paye de raison ; vous voyez qu'il a fait ce qu'il a pu. [Sévigné, 596]

    En un sens contraire. Payer de mauvaises raisons.

    Payer de, donner satisfaction avec (en un sens ironique). Tantôt vous payerez de quelque maladie Qui viendra tout à coup, et voudra des délais ; Tantôt vous payerez de présages mauvais. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur] Vous nous payez ici d'excuses colorées. [Molière, Le bourgeois gentilhomme] J'ai tort, je le confesse ; et mon âme confuse Ne cherche à vous payer d'aucune vaine excuse. [Molière, Le misanthrope]

    Payer de paroles, de belles paroles, ne donner satisfaction qu'en paroles. Tous les ingrats en foule iront à votre école, Puisqu'on y devient quitte en payant de parole. [Corneille, Théodore et Héraclius]

    On dit dans le même sens : payer de mots. Vous commencez par nous payer là de mots qui ne nous donnent pas le change : les discours vagues ne font jamais preuve. [Rousseau, Correspondance]

    Payer de sa personne, s'exposer dans une occasion dangereuse. Le roi tout le premier, payant de sa personne, Nous conduit à leur camp que l'on nous abandonne. [Mairet, Sophonisbe] C'était un vrai homme à payer de sa personne, voyant que son régiment faisait mal. [Sévigné, 208] Il payait de sa personne dans les combats, où il gardait toujours son sang-froid. [Rollin, Histoire ancienne]

    Payer de sa personne, s'employer activement à quelque chose. Pour moi, j'y paierai de ma personne comme il faut. [Molière, L'impromptu de Versailles]

    Payer de sa personne, agir par soi-même dans les occasions qui le demandent.

    Payer de sa personne, se rendre agréable par ses manières, par son esprit. Mon frère six bécassines, moi le vin et le fruit ; et toi tu payeras de ta personne. [Boursault, Lett. nouv. t. III, p. 245, dans POUGENS] Quand on fait, comme vous, métier d'être railleur, Il faudrait savoir mieux payer de sa personne. [Collin D'harleville, Malice pour malice, III, 5]

  • 13Payer de, faire preuve de. Il est plus à propos D'apprivoiser la mort en payant de constance, Que de l'effaroucher en faisant résistance. [Mairet, Soliman] Certes, vous faites rage, et payez aujourd'hui D'un jugement très rare et d'un bonheur extrême. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] Enfin, ma fille, il faut payer d'obéissance. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur] N'importe, efforçons-nous et payons d'impudence. [Corneille Th. Feint astrol. II, 3] Il faut payer d'effronterie. [Racine, Les plaideurs] Vous êtes obligé de ne payer d'autorité que quand la persuasion manque. [Fénelon, Traité de l'éducation des filles]

    Payer de mine, avoir un extérieur qui prévient favorablement. Il payait de mine, s'il ne fournissait pas beaucoup à la conversation. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont]

    On dit de même : payer de maintien. Un femme prude paye de maintien et de paroles ; une femme sage paye de conduite. [La Bruyère, III]

    Il paye de bonne mine, il ne paye que de mine, se dit d'un homme de peu de mérite, mais d'une belle apparence.

    Il ne paye pas de mine, se dit d'un homme d'apparence chétive, disgracieuse.

  • 14Se payer, vpron Retenir le montant de sa créance sur ce qu'on a entre les mains. Voilà une pièce de vingt francs ; payez-vous de ce que je vous dois. Puisque tous les frais sont à couvert, et qu'ainsi je pourrai me payer par mes mains. [Genlis, Théât. d'éduc. le Libraire, SC. 4]

    Fig. Les hommes, qui, pour la plupart, ne font de bonnes actions qu'afin qu'on les sache, et s'en payent par leurs mains en les publiant eux-mêmes. [Scarron, Virgile travesti]

    Fig. Trouver en soi sa propre récompense. Un honnête homme se paye par ses mains de l'application qu'il a à son devoir par le plaisir qu'il sent à le faire, et se désintéresse sur les éloges, l'estime et la reconnaissance, qui lui manquent quelquefois. [La Bruyère, Du mérite personnel.] Tout homme qui ne se paie pas par ses mains, en recueillant dans son cabinet, par l'ivresse, par l'enthousiasme du métier, la meilleure partie de sa récompense, ferait fort bien de demeurer en repos. [Diderot, Salons de peinture]

  • 15Être payé. Cette dette s'est payée difficilement. [Nos descendants] l'estimeront-ils moins [le cardinal de Richelieu], à cause que, de son temps, les rentes sur l'hôtel de ville se seront payées un peu plus tard ? [Voiture, Lettres]

    Fig. L'amitié ne se paye que par l'amitié.

    Cela ne se peut payer, se dit de ce qui est excellent en son genre, de ce qui est impayable. Ce conte est très plaisant, il ne se peut payer. Voici ce qui ne se peut payer, c'est d'entendre Vivonne. [Sévigné, 174]

  • 16Se contenter, demeurer satisfait. Quoi ! vous voulez que je me paie d'un semblable discours ? [Molière, Dom Juan, ou le Festin de Pierre] Le monde se paye de paroles. [Pascal, Les provinciales] Eh quoi ! le Dieu des chrétiens est-ce un Dieu qui se paye de vaines grimaces, ou qui se laisse corrompre par les présents ? [Bossuet, Panégyrique] Il n'y a personne de ceux qui se payent de mines et de façons de parler, qui ne sorte d'avec lui fort satisfait. [La Bruyère, VIII] Pacheco parut se payer de cette défaite, et lia conversation avec les dames. [Lesage, Histoire de Gil Blas de Santillane] La malheureuse facilité que nous avons à nous payer de mots que nous n'entendons point commence plus tôt qu'on ne pense. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation]

    Se payer de raisons, se rendre aux raisons qu'un autre allègue.

PROVERBES

Qui répond paye, c'est-à-dire on est obligé de payer pour celui dont on s'est rendu caution.

Il faut payer ou agréer, quand on doit, il faut donner de l'argent ou du moins de bonnes paroles.

Quand on doit, il faut ou payer ou fixer un terme.

C'est la coutume de Lorris où le battu paye l'amende, voir AMENDE et BATTU.

Qui paye ses dettes s'enrichit.

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17 Absolument, donner un produit rémunérateur. On croyait alors [1851] que les mines du quartz [aurifère] ne payaient pas. [L. Simonin, Rev. des Deux-Mond. 15 nov. 1875, p. 90]
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