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défaire

vt (dé-fê-r'), je défais, tu défais, il défait, nous défaisons, vous défaites, ils défont ; je défaisais ; je défis ; je déferai ; je déferais ; défais, qu'il défasse, défaisons, défaites, qu'ils défassent ; que je défasse, que nous défassions ; que je défisse ; défaisant, défait
  • 1Changer l'état d'une chose, de manière qu'elle ne soit plus ce qu'elle était. Défaire un portemanteau. Cette couture est mal faite, il faut la défaire. Défaire un lit, en déranger les couvertures, les draps. Ayant fait plusieurs efforts pour défaire les noeuds, il les coupa. [Vaugelas, Q. C. liv. III, ch. 1] Il a droit de régner sur les âmes communes, Non sur celles qui font et défont les fortunes. [Corneille, Attila] Lubin : Mais, monsieur, j'ai fait mon paquet. - Le chevalier : Eh bien ! tu n'as qu'à le défaire. [Marivaux, La surprise de l'amour] Moi, te voyant en peine, je défais ton lacet. [Favart, Annette et Lubin, sc. VII]

    Par extension. Défaire un mariage, un marché, le rompre. Un prêtre audacieux fait et défait les rois. [Chénier M. J. Charles IX, III, 2]

    Absolument. Ils ne songent pas, les bonnes gens qui veulent maintenir toutes choses intactes, qu'à Dieu seul appartient de créer ; qu'on ne fait point sans défaire ; que ne jamais détruire, c'est ne jamais renouveler. [Courier, Lettres de France et d'Italie]

  • 2Abattre, affaiblir, amaigrir. La maladie a bien défait cet homme.
  • 3Mettre en déroute, tailler en pièces, vaincre. César défit Pompée à Pharsale. Il défit trois préteurs, il gagna dix batailles. [Corneille, Sertorius] Il n'a défait Tryphon que pour prendre sa place. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes]
  • 4Effacer par plus d'éclat : en ce sens il vieillit. Quand elle arrive au bal, elle défait toutes les autres femmes. Une fille à seize ans défait bien une mère, J'ai beau par mille soins tâcher de rétablir Ce que de mes appas l'âge peut affaiblir. [Quinault, Mère coquette, II, 1] Le rebut de la cour est reçu à la ville, où il défait le magistrat. [La Bruyère, III]
  • 5Faire mourir. Cette malheureuse a défait son fruit, son enfant.
  • 6Débarrasser de personnes qui gênent. Défaites-moi de cet importun. On le défit de son adversaire qui fut mis à la Bastille. Ne voulez-vous pas me défaire de votre marquis extravagant ? [Molière, Critique de l'école des femmes] J'attends M. Remy, que j'ai envoyé chercher, et, s'il ne nous défait pas de cet homme-là, ma fille saura qu'il ose l'aimer. [Marivaux, Les fausses confidences]

    Plus particulièrement, débarrasser par la mort ou le meurtre. Je t'ai défait d'un père, et d'un frère et de moi. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] Et le premier arrêt qu'ils lui feront donner Les défera d'Othon qui les peut détrôner. [Corneille, Othon] Le lendemain Constantin gagna cette célèbre bataille qui défit Rome d'un tyran, et l'Église d'un persécuteur. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Il ne faut pas s'étonner que, parmi tant de gens d'exécution dont le parti était plein, il se soit trouvé des hommes qui crussent rendre service à Dieu, en défaisant la Réforme d'un tel ennemi. [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes] La guerre m'a défait d'un frère heureusement. [Regnard, Les Ménechmes] Ce jeune inconnu.... Me répondez-vous bien qu'il m'ait défait d'Égisthe ? [Voltaire, La méroppe française]

    Débarrasser de choses qui gênent. Si vous en consultiez des personnes sensées, Elles vous déferaient de ces belles pensées. [Corneille, Nicomède] Elle est ravie que je la défasse d'un tel embarras. [Sévigné, 445] Le dévot politique P.... a condamné au carcan et aux galères un pauvre diable, qui est mort de désespoir le lendemain de l'exécution, pour avoir prié un libraire de le défaire de quelques volumes qu'il ne connaissait pas et qu'on lui avait donnés en payement. [D'alembert, Lett. à Voltaire, 22 oct. 1678]

  • 7Se défaire, vpron Être défait, en parlant de ce qui était fait, arrangé. Ma coiffure s'est défaite. Ce noeud s'est défait. Sa cravate s'est défaite. Le mariage s'est défait.
  • 8Se décomposer, s'affaiblir. Ce vin se défait aisément.
  • 9Se déconcerter, perdre contenance. Courage, seigneur.... ne vous défaites pas. [Molière, La princesse d'Élide]

    0° Se défaire de, se tirer de ce qui serre, enlace. Il s'est défait de ses liens. Ragotin se défit de ceux qui le tenaient, et s'alla jeter, regardant derrière lui d'un oeil égaré, dans une grosse touffe de rosiers. [Scarron, Le Roman comique]

  • 10Se désaccoutumer, se corriger d'une chose. De ces chimères-là vous devez vous défaire. [Molière, Les femmes savantes] Ceux-là se défont des fausses religions et même de la vraie s'ils ne trouvent pas de discours solides. [Pascal, dans COUSIN] Qu'ils se défassent de cette pitoyable maxime. [Bossuet, Oraisons funèbres] Il n'est pas possible que j'entre jamais dans la voie de Dieu ou que je m'y établisse, si je ne me défais de cette honte mondaine. [Bourdaloue, Exhort. sur la flagel. de J. C.] Voilà de tous les vices le dernier dont nous travaillons à nous défaire et dont nous croyons devoir nous défaire. [Bourdaloue, Exhort. sur le soufflet donné à J. C.] J'ai été théologien, et on ne se défait pas tout d'un coup de ses habitudes. [Voltaire, Oreilles de Chest. 2]

    Se défaire de, avec un infinitif. Défaisons-nous de croire que.... [Sévigné, 150]

  • 11Se défaire d'une chose, s'en débarrasser. Ne demandez point à vous défaire des charges que vous avez. [Bossuet, Lett. Corn. 6] Ceux qui n'avaient pas voulu se défaire de leur argent comptant en faveur des frères Hiéronymites. [Voltaire, Voir de Scarmentado.] J'ai brûlé depuis quelques jours la lettre des Carmélites de Rome ; je ne prévoyais pas qu'elle pût me servir ; et j'aime à me défaire des papiers. [Maintenon, Lettres] On se défait des idées tristes le plus tôt qu'on peut. [Maintenon, ib. 22 août 1699] Le germe de l'insecte qui se métamorphose contient actuellement toutes les enveloppes dont cet insecte doit se défaire et tous les organes qui l'accompagnent. [Bonnet, Considérations sur les corps organisés]

    Se défaire d'une personne, faire qu'elle nous quitte, et aussi rompre les rapports habituels qu'on avait avec elle. Je me défais de toi, j'y cours, je le rejoins. [Corneille, Le menteur] Il y a deux manières de congédier son monde et de se défaire des gens : se fâcher contre eux ou faire si bien qu'ils se fâchent contre vous. [La Bruyère, VIII] Aussitôt qu'on est parvenu à rendre les favoris suspects, les princes ne cherchent plus qu'à s'en défaire. [Fénelon, Télémaque] Le divan résolut de le renvoyer, non plus comme un roi qu'on voulait secourir, mais comme un hôte dont on voulait se défaire. [Voltaire, Histoire de Charles XII]

    Se défaire d'un domestique, le mettre dehors, le congédier. Un seul valet restait.... il fallut s'en défaire. [Boileau, Satires] Je n'avais que trop d'envie de m'en défaire [d'une femme de chambre], mais je suis femme d'habitude et je n'aime point les nouveaux visages. [Lesage, Turcaret]

  • 12Renoncer à la possession d'une chose par vente, échange ou autrement. Vous êtes orfévre, monsieur Josse, et votre conseil sent son homme qui a envie de se défaire de sa marchandise. [Molière, L'amour médecin] Le berger s'en défait [du bon chien], il prend trois chiens de taille à lui dépenser moins, mais à fuir la bataille. [La Fontaine, Fables] L'envie qu'il avait de se défaire de sa charge. [Sévigné, 445] Ma fille, je vais bien vous surprendre et vous fâcher : M. de Pompone est disgracié ; il eut ordre samedi au soir, comme il revenait de Pompone, de se défaire de sa charge. [Sévigné, 386] Mon père eut les capitaineries de St-Germain et de Versailles, dont il se défit au président de Maisons. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon] Il eut peine à se défaire de son tableau à un prix modique. [Diderot, Pensées sur la peinture]
  • 13Abandonner, renoncer à. Croyez-vous que ces hommes ambitieux, qui ont usurpé un pouvoir tyrannique, et qui, au préjudice de nos lois, refusent si opiniâtrément de se défaire des faisceaux, mettent facilement les armes bas ? [Vertot, Histoire des révolutions arrivées dans le gouvernement de la République romaine] Il le [l'empire] peut à son choix garder ou s'en défaire. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] Vous vous défaites bien de quelques droits d'aînesse ; Mais vous défaites-vous du coeur de la princesse ? [Corneille, Nicomède]
  • 14Écarter, faire disparaître. Il l'a marié à une riche veuve et s'est ainsi défait de son rival. On se défit de lui en le mettant à la Bastille.

    Plus particulièrement, faire mourir. Depuis on fit courir le bruit qu'il avait fait mourir les deux consuls, afin qu'ayant défait Antoine et s'étant défait d'eux, il eût seul les armes victorieuses en sa puissance, COEFFETEAU, dans VAUGELAS, Allusion de mots. Si tu prétends régner, défais-toi de nous deux. [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Ceux-ci voulurent se défaire de moi. [Fénelon, Télémaque] Vous vous étiez défait des deux Guises à Blois, mais vous ne pouviez jamais vous défaire de tous ceux qui avaient horreur de vos fourberies. [Fénelon, Dialogues des morts] On l'accusait [Persée, roi de Macédoine] d'avoir tué sa femme de sa propre main depuis la mort de son père, de s'être défait secrètement d'Apelle, du ministère duquel il s'était servi pour faire périr son frère. [Rollin, Histoire ancienne]

  • 15Se donner la mort. Mon père dans l'excès de sa douleur me dit : ne va pas répandre le bruit que ton frère s'est défait lui-même ; sauve au moins l'honneur de ta misérable famille. [Voltaire, Correspondance] Dire qu'il était mort d'apoplexie, lorsqu'il était évident qu'il s'était défait lui-même. [Voltaire, Correspondance] Pourquoi le désespoir les porte-t-il [les nègres esclaves] à se défaire ou à vous empoisonner ? [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes] Tandis qu'il fait courir le bruit que sa mère, convaincue d'un attentat sur sa personne sacrée, s'est défaite elle-même, il voit son image, il en est poursuivi. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque] Plusieurs de ses disciples se défirent au sortir de son école. [Diderot, Opinions des anciens philosophes] Jean Choinart trouve sa récolte trop belle [il avait spéculé sur la hausse des grains], rentre chez lui et se défait. [Courier, Lettres de France et d'Italie] On sait de son esprit se servir à propos, Revenir, s'apaiser, se remettre en colère, Faire bien le jaloux et vouloir se défaire. [Regnard, Démocrite]

    Il est fâcheux que ce sens du verbe défaire vieillisse, et qu'on y ait substitué ou bien se tuer qui est plus vague, puisqu'on peut se tuer par accident, ou bien se suicider qui est un mot suspect et d'un alloi douteux.

REMARQUE

J. J. Rousseau a dit : Épée que j'ai portée jusqu'à Turin, où le besoin m'en fit défaire, Conf. I. Il serait plus correct de dire : me fit m'en défaire. Cependant on peut considérer que défaire est pris, par ellipse, pour me défaire, comme cela arrive bien souvent avec les verbes réfléchis.

+

DÉFAIRE.
2Ajoutez :

Diminuer la bonne mine, la bonne apparence du visage. Celles [manières de se coiffer] qui défont toutes les autres femmes la parent, et celles qui ne conviennent jamais à une même tête sont également bien sur la sienne. Lettre sur Mme la duchesse de Mazarin, dans Mélange curieux des meilleures pièces attribuées à M. de St-Evremond, t. I, p. 247, Cologne, 1708]

17 vi Se détacher. Attache-le d'un noeud qui jamais ne défait. [Corneille, Lexique, éd. Marty-Laveaux] (emploi qui n'est plus usité).
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