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majesté

nf (ma-jè-sté)
  • 1Caractère extérieur de grandeur, apparence auguste. Un prince épouvanté De voir tant de colère et tant de majesté. [Corneille, La mort de Pompée] Une majesté douce épand sur son visage De quoi s'assujettir le plus noble courage. [Corneille, ib. III, 3] On dit que le cardinal [de Richelieu], le voyant [Vaugelas] entrer dans sa chambre, s'avança vers lui avec cette majesté douce et riante, qui l'accompagnait presque toujours. [Pellisson, Histoire de l'Académie française] Une reine portant sur son visage la majesté de tant de rois, conservant dans son coeur l'humilité du fils de Dieu. [Fléchier, Oraisons funèbres] Seigneur, je n'ai jamais contemplé qu'avec crainte L'Auguste majesté sur votre front empreinte. [Racine, Esther] Quel ton, quel ascendant ne prennent-ils pas [les riches] sur les savants ? quelle majesté n'observent-ils pas à l'égard de ces hommes chétifs que leur mérite n'a ni placés ni enrichis ! [La Bruyère, VI] Il est nécessaire que vous ayez une certaine majesté dans votre extérieur. [Fénelon, Télémaque]
  • 2 Fig. Grandeur imprimant le respect. La majesté du peuple romain. La majesté du sénat. Ont-ils [les rois] rendu l'esprit, ce n'est plus que poussière Que cette majesté si pompeuse et si fière, Dont l'éclat orgueilleux étonnait l'univers. [Malherbe, I, 3] Il [Dieu] leur [aux rois] fait voir en leur retirant sa puissance que toute leur majesté est empruntée. [Bossuet, Oraisons funèbres] Il [Charles 1er] a montré qu'il n'est pas permis aux rebelles de faire perdre la majesté à un roi qui sait se connaître. [Bossuet, ib.] La majesté est l'image de la grandeur de Dieu dans le prince. [Bossuet, Politique tirée des propres paroles de l'Écriture sainte] Les rois, non plus que le soleil, n'ont pas reçu en vain l'éclat qui les environne ; il est nécessaire au genre humain ; et ils doivent, pour le repos autant que pour la décoration de l'univers, soutenir une majesté qui n'est qu'un rayon de celle de Dieu. [Bossuet, Oraisons funèbres] Il [Condé] apprit à l'Espagne, trop dédaigneuse, quelle était cette majesté que la mauvaise fortune ne pouvait ravir à de si grands princes [les Stuarts détrônés]. [Bossuet, Oraisons funèbres] C'est l'esprit du christianisme de faire respecter les rois avec une espèce de religion que le même Tertullien appelle très bien la religion de la seconde majesté ; cette seconde majesté n'est qu'un écoulement de la première, c'est-à-dire de la divine. [Bossuet, Politique tirée des propres paroles de l'Écriture sainte] La majesté des rois inspire plus de respect que de tendresse ; c'est une espèce de religion civile et de culte politique, qui nous fait révérer ces traits que la main de Dieu a gravés sur le front de ceux à qui il daigne communiquer sa puissance. [Fléchier, Oraisons funèbres] Au fond de leur palais leur majesté terrible [des rois de Perse] Affecte à leurs sujets de se rendre invisible. [Racine, Esther] Être heureux comme un roi, dit le peuple hébété ; Hélas ! pour le bonheur que fait la majesté ? [Voltaire, 1er disc.]

    Il se dit de Dieu. Dieu y parut dans sa majesté. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Elle voudrait disparaître tout entière devant la majesté du roi des rois. [Bossuet, Oraisons funèbres] Celui qui règne dans les cieux, à qui seul appartient la gloire, la majesté, l'indépendance. [Bossuet, Oraisons funèbres] Le terme de majesté n'est attribué à Jésus-Christ dans l'Évangile que lorsqu'il s'agit du jugement universel. [Bourdaloue, Jugem. dern. 1er avent, p. 47] Il ordonnait [à ceux qui n'étaient pas suffisamment respectueux durant le service divin] qu'on fléchît le genou et qu'on se tût devant la majesté présente qui, pour être cachée, n'en était pas moins redoutable. [Fléchier, Oraisons funèbres] Et vous, sous sa majesté sainte, Cieux, abaissez-vous. [Racine, Esther] Viens-tu du Dieu vivant braver la majesté ? [Racine, Athalie] Lorsque, prosternée sous la majesté de ses regards [de Dieu], la vile créature reconnaît qu'elle n'est que cendre et poussière en sa présence. [Massillon, Carême, Prière 2]

    Il se dit aussi des choses qui impriment le respect. La majesté du trône. La majesté de l'empire romain. [La paix] Donne aux champs les moissons fertiles, Et, de la majesté des lois Appuyant les pouvoirs suprêmes, Fait demeurer les diadèmes Fermes sur la tête des rois. [Malherbe, III, 2] Les bassesses de la flatterie, indignes de la majesté du lieu où je parle, et du ministère sacré que j'exerce. [Bossuet, Gornay.] Ainsi puisse être rendue la majesté à vos tribunaux ! [Bossuet, Oraisons funèbres] Les prêtres de l'Oratoire.... y donnèrent [dans la chapelle royale] par leur piété, aux autels leur véritable décoration, et au service divin sa majesté naturelle. [Bossuet, Oraisons funèbres] Quoi ! vous pourriez, seigneur, par cette indignité De l'empire à vos pieds fouler la majesté ? [Racine, Bérénice] Ô grandeur des Romains, ô majesté flétrie ! [Voltaire, Catilina, ou Rome sauvée]

  • 3Le pouvoir royal même. La majesté des rois d'Angleterre serait demeurée plus inviolable, si, contente de ses droits sacrés, elle n'avait point voulu attirer à soi les droits et l'autorité de l'Église. [Bossuet, Oraisons funèbres] Il ne faut point s'étonner s'ils [les Anglais] perdirent le respect de la majesté et des lois, et s'ils devinrent factieux, rebelles et opiniâtres. [Bossuet, ib.] [Dans la révolution anglaise] nul frein à la licence, la majesté violée par des attentats jusqu'alors inconnus. [Bossuet, ib.]
  • 4Titre particulier qui se donne aux empereurs, aux rois et à leurs épouses (avec une M majuscule). Votre Majesté, Sire, a ordonné. Je rendrai compte à Sa Majesté. Le zèle que vous [religieuses du Val-de-Grâce] avez pour votre Époux, vous faisait voir avec plaisir ces Majestés [Anne et Marie-Thérèse] humiliées en sa présence. [Fléchier, Oraisons funèbres] Le prince d'Orange ne se mêla point aux compliments, parce qu'il n'aurait point eu de Sire, ni de Majesté. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon] Louis XI fut le premier roi de France à qui on donna quelquefois le titre de Majesté, que jusque-là l'empereur seul avait porté. [Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations et sur les principaux faits de l'histoire depuis Charlemagne jusqu'à Louis XIII] Il n'y avait autrefois que l'empereur qui eût le titre de Majesté ; les autres rois s'appelaient Votre Altesse, Votre Sérénité, Votre Grâce. [Voltaire, Dictionnaire philosophique] Ce n'est que depuis 1741 que la chancellerie impériale traite les rois de Majestés dans le protocole de l'empire. [Voltaire, Suppl. au Siècle de Louis XIV, 1re part.] L'empereur ne voulait point donner le titre de Majesté aux rois ses vainqueurs ; son ministre Lutzau, dans le premier acte de 1641, qui établissait les saufs-conduits et les conférences, parle des préliminaires entre sa sacrée Majesté césarienne et le sérénissime roi très chrétien. [Voltaire, Annales de l'Empire depuis Charlemagne]

    Votre Majesté se dit quand on adresse la parole au souverain ou à la souveraine. Sa Majesté se dit quand on parle du souverain ou de la souveraine. Vos Majestés se dit quand on parle à plusieurs têtes couronnées. Leurs Majestés se dit quand on parle de plusieurs têtes couronnées.

    Par abréviation on écrit V. M. [Votre Majesté], VV. MM. [Vos Majestés], S. M. [Sa Majesté], LL. MM. [Leurs Majestés].

    Sa Majesté impériale, l'empereur des Français, l'empereur d'Autriche, que l'on qualifie aussi de Sacrée Majesté, mais seulement quand on lui parle, l'empereur de Russie, l'empereur du Brésil. Sa Majesté très chrétienne, le roi de France. Sa Majesté catholique, le roi d'Espagne. Sa Majesté très fidèle, le roi de Portugal. Sa Majesté britannique, le roi d'Angleterre. Sa Majesté suédoise, Sa Majesté danoise, le roi de Suède, le roi de Danemark.

    On dit aussi Sa Majesté le roi d'Angleterre. Sa Majesté le roi de Suède, etc.

    Fig. Voilà comme les hommes sont ballottés par la fortune ; Sa Sacrée Majesté le hasard décide de tout. [Voltaire, Correspondance]

  • 5Dans les temps anciens, Majesté n'était pas particulier aux souverains, et se disait d'autres grands personnages. Il y a encore une lettre de lui [Charles IV] au cardinal Colombier, doyen du sacré collége, datée de l'an 1355, dans laquelle il appelle ce doyen Votre Majesté. [Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations et sur les principaux faits de l'histoire depuis Charlemagne jusqu'à Louis XIII]
  • 6 Terme de littérature. Caractère de pompe et de grandeur. La majesté du style. On a pris pour de la majesté la pesanteur des vers qui se tiennent comme enchaînés deux à deux, et qui se retardent l'un l'autre ; mais la majesté consiste dans le nombre, le coloris, l'éclat et la pompe du style. [Marmontel, Éléments de littérature]
  • 7 Terme d'histoire romaine. Loi de majesté, loi punissant tout attentat contre le peuple romain, et appliquée par les empereurs à tout délit contre le prince. Il y avait une loi de majesté contre ceux qui commettaient quelque attentat contre le peuple romain ; Tibère se saisit de cette loi et l'appliqua, non pas aux cas pour lesquels elle avait été faite, mais à tout ce qui put servir sa haine ou ses défiances. [Montesquieu, Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence]

    Jugement de majesté, jugement prononcé en vertu de la loi de majesté.

  • 8 Terme de diplomatique. Sceau de majesté, sceau des empereurs d'Allemagne.

    S'est dit aussi du grand sceau féodal de l'électeur de Mayence.

REMARQUE

1. Faut-il dire, en parlant à un roi : Votre Majesté est maître ou maîtresse ? Quand il s'agit d'un adjectif, la règle n'est pas douteuse, l'adjectif s'accorde avec Majesté : Votre Majesté peut être assurée.... Mais avec des substantifs, lors même que les substantifs ont des féminins, il vaut mieux donner le genre masculin. Du moins tel est l'usage constaté par Bouhours dans ses Nouvelles remarques : Je l'ai assuré que Votre Majesté était le maître, DUC DE SAVOIE, dans BOUHOURS ; Cette acquisition ne donnerait à Sa Majesté aucun avantage solide, puisqu'aussi bien elle serait maître de ses États, MAZARIN, dans BOUHOURS.

2. Faut-il dire : Votre Majesté est le plus éclairé des rois ou la plus éclairée des rois ? Il serait mieux de changer de tournure ; mais, si on tenait à suivre celle-ci, on dirait, vu que l'idée de roi et du masculin est celle qui domine : Votre majesté est le plus éclairé des rois.

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