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moitié

nf (moi-tié)
  • 1Une des deux parties égales dans lesquelles un tout est divisé. Les deux moitiés d'un cercle. La moitié de 12 est 6. Dans les assemblées, la moitié des voix plus une fait la majorité absolue. La moitié de cette succession lui appartient. Il a moitié dans tous les meubles. Avant que de ses deux moitiés Le vers que je commence ait atteint la dernière. [Chénier, Odes et Iambes]

    Couper, partager une chose par la moitié, la couper, la partager en deux parties égales. Le diamètre coupe le cercle par la moitié.

    Partager un différend, le différend par la moitié, se relâcher des deux côtés, dans un marché, dans une contestation, sur ce qui empêche de conclure, de s'entendre. Je lui demandais mon congé et mes gages, il a partagé le différend par moitié ; il m'a donné mon congé et me retient mes gages. [Regnard, Attendez-moi sous l'orme, 3]

    Partager quelque chose par la moitié, prendre chacun la moitié d'une chose qui était à partager.

  • 2 Par extension, une part qui est à peu près la moitié. La moitié d'un pain, d'un poulet. Il n'a fait que la moitié de son ouvrage. Venez vous asseoir auprès de moi, je vous donnerai la moitié de ma place. Il fuit et le reproche et les yeux du sénat, Dont plus de la moitié piteusement étale Une indigne curée aux vautours de Pharsale. [Corneille, La mort de Pompée] Quand vous me demanderiez la moitié de mon royaume, je vous la donnerais. [Sacy, Bible, Esther, V, 6] Des enfants de Japet toujours une moitié Fournira des armes à l'autre. [La Fontaine, Fables] Quand il n'y aurait que votre barbe, c'est déjà beaucoup, et la barbe fait plus de la moitié d'un médecin. [Molière, Le malade imaginaire] Les femmes, qui font la moitié du monde. [Pascal, Les provinciales] Vous ne connaissez pas la moitié de ma tendresse pour vous. [Maintenon, Lettres] Le pain bis renfermé d'une moitié décrut. [Boileau, Satires] Il n'en fallait pas la moitié tant pour.... [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] L'intérêt de l'État fut leur suprême loi [des sultans] ; Et d'un trône si saint la moitié n'est fondée Que sur la foi promise et rarement gardée. [Racine, Bajazet] Heureux si j'avais pu ravir à la mémoire Cette indigne moitié d'une si belle histoire. [Racine, Phèdre] La moitié de la terre à son sceptre est soumise. [Racine, Esther] La moitié du genre humain périt avant l'âge de huit ans un mois, c'est-à-dire avant que le corps soit développé, et avant que l'âme ne se manifeste par la raison. [Buffon, Prob. de la vie, Oeuv. t. X, p. 241] Le plus grand usage, ou le plus grand abus que l'homme ait fait de sa force, c'est d'avoir asservi et traité souvent d'une manière tyrannique cette moitié du genre humain, faite pour partager avec lui les plaisirs et les peines de la vie. [Buffon, Oeuv. t. IV, p. 332] La moitié de Paris riait, et l'autre moitié murmurait ; les convulsionnaires protestaient que ces démêlés finiraient tragiquement. [Voltaire, Histoire du parlement de Paris] Oui, la moitié du monde a toujours mangé l'autre. [Voltaire, Marseillais et Lion.]

    La moitié du temps, pendant une bonne partie de son temps. La moitié du temps il est sans argent.

    Offrir la moitié de son lit à quelqu'un, offrir place dans son lit à quelqu'un.

    La moitié suffit, se dit pour mettre fin à des exhortations, représentations, reproches que l'on trouve inutiles ou déplacés.

    On dit, pour donner à entendre qu'un récit, un éloge, une plainte sont exagérés : il en faut rabattre la moitié.

    On dit de même : n'en croire que la moitié. La princesse n'ajouta pas foi à tout ce qu'on lui dit : elle pensa qu'elle ne devait en croire que la moitié. [Genlis, Mme de Maintenon, t. II, p. 6, dans POUGENS]

  • 3Moitié de la vie, moitié de moi-même, termes d'affection. Pleurez, pleurez, mes yeux, et fondez-vous en eau : La moitié de ma vie a mis l'autre au tombeau. [Corneille, Le Cid] En faveur de Cinna je fais ce que je puis, Et tâche à garantir de ce malheur extrême La plus belle moitié qui reste de lui-même. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] Laisser à ces tyrans la moitié de soi-même. [Voltaire, Alzire, ou Les américains] Ô moitié de ma vie ! cher époux. [Voltaire, L'orphelin de la Chine]
  • 4Femme, à l'égard de son mari, dans le style élevé et poétique. Rends-toi digne du nom de ma chaste moitié. [Corneille, Horace] Ô d'un illustre époux noble et digne moitié. [Corneille, La mort de Pompée] Ô vous, à ma douleur objet terrible et tendre, Reste du grand Pompée, écoutez sa moitié. [Corneille, La mort de Pompée] Votre digne moitié, couchée entre des fleurs, Tout près d'ici m'est apparrue. [La Fontaine, Fables] Laissez à Ménélas racheter d'un tel prix La coupable moitié dont il est trop épris. [Racine, Iphigénie en Aulide] L'usage a permis qu'en quelques occasions on puisse appeler sa femme sa moitié : " Mânes du grand Pompée, écoutez sa moitié. " Ce mot fait là un effet admirable. [Voltaire, Comm. Héraclius, V, 1] Et leurs tristes moitiés, compagnes de leurs pas, Emportent leurs enfants, gémissants dans leurs bras. [Voltaire, La Henriade]

    Hors de là, il ne se dit, aujourd'hui du moins, que dans le langage familier. Avez-vous pris la peine d'en parler à madame votre chère moitié ? [Hauteroche, Crispin médecin] ....Or c'étaient les moitiés De nos galants. [La Fontaine, Rém.] Et ce n'est pas peu d'heur que d'être sa moitié [de Tartufe]. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur] Je vous conjure de faire mes compliments à votre chère moitié. [Sévigné, à Pompone, 24 nov. 1664] Mandez-moi de vos nouvelles, si vous avez votre aimable moitié.... [Sévigné, à Guitaut, 20 avr. 1683] Et je suis convaincu que nombre de maris Voudraient de leurs moitiés se voir loin à ce prix. [Regnard, Démocrite]

  • 5La plus belle moitié du genre humain, les femmes en général. Il est capable de nous rendre ridicules à la plus belle moitié du monde. [Guez de Balzac, liv. IV, let. 19]
  • 6Moitié, pris adverbialement pour signifier à demi. Moitié sérieusement, moitié en plaisantant. Moitié par adresse, moitié par force, il se rendit le plus puissant. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Moitié vaincue par les raisons, et moitié attendrie de reconnaissance pour toute la peine que je lui voyais prendre, afin de me persuader. [Marivaux, La Vie de Marianne, ou les aventures de Madame la comtesse de ***] Chaque corps serait composé de moitié Chinois et moitié Tartares. [Montesquieu, L'esprit des lois] Je suis un pauvre vieillard, moitié poëte, moitié philosophe, et qui n'est pas à moitié persécuté, quoiqu'il ne dût être qu'un objet de pitié, étant surchargé de quatre-vingt-quatre ans et de quatre-vingt-quatre maladies. [Voltaire, Correspondance] Les Français seront toujours moitié tigres et moitié singes ; ils se réjouiront également à la Grève et aux danseurs de corde du boulevard. [Voltaire, Correspondance] Cette dynastie fondant par les mains d'un vieux et sage roi la monarchie représentative au milieu d'une cour moitié d'ancien régime, moitié de noblesse nouvelle. [Villemain, Souvenirs contemporains, les Cent-Jours, ch. 2]

    Moitié guerre, moitié marchandise, voir MARCHANDISE.

    Moitié figue, moitié raisin, voir FIGUE.

    Moitié chair, moitié poisson, voir POISSON.

  • 7À moitié, avec le nom suivant sans article et sans préposition, en partageant par moitié ce dont il s'agit. Louer une terre à moitié fruits.

    À moitié chemin, à la moitié du chemin. Elle était tombée malade dans une petite ville à moitié chemin d'Édimbourg. [Staël, Corinne, ou l'Italie]

    À moitié prix, pour la moitié du prix ordinaire.

    Dans le langage rural, à moitié, pris absolument, signifie : en partageant par moitié les produits entre le tenancier et le propriétaire. Donner, prendre des terres à moitié. Il laboure cette terre à moitié. Il fait cette vigne à moitié.

    À moitié de, dans le même sens. Une fille est une marchandise qu'on ne saurait garantir, et l'on n'en a pas plutôt fait l'emplette qu'on voudroit en être défait à moitié de perte. [Regnard, Sérénade]

    À moitié de perte et de gain, et aussi à moitié perte et gain, en partageant également soit la perte soit le gain. Prendre un marché à moitié de perte et de gain.

    À moitié, en partie, à demi. De l'argent plus d'à moitié dépensé. Un fruit à moitié pourri. [L'enfant] Prit la fronde, et du coup tua plus d'à moitié La volatile malheureuse. [La Fontaine, Fables] Seigneur, le traître est expiré, Par le peuple en fureur à moitié déchiré. [Racine, Esther] Le crime de tes mains n'est commis qu'à moitié. [Voltaire, Le fanatisme, ou Mahomet le Prophète]

    On dit plus rarement : plus qu'à moitié. De l'argent plus qu'à moitié dépensé.

  • 8Être de moitié, se mettre de moitié, être, se mettre en société avec quelqu'un, de manière que la perte et le gain se partagent par moitié. Ils sont de moitié dans cette affaire. Mettons-nous de moitié pour cette partie d'écarté.

    Fig. Être de moitié, prendre part ; mettre de moitié, faire partager. Si tu veux, avec toi je serai de moitié. [Corneille, Le menteur] Ma fille est de moitié de tout ce que je vous dis ici. [Sévigné, à Moulceau, 4 fév. 1696] Je trouve ce livre admirable [les Essais de morale de Nicole] ; personne n'a écrit sur ce ton que ces messieurs ; car je mets Pascal de moitié à tout ce qui est de beau. [Sévigné, 23 sept, 1671] Vous ne sauriez trop en parler [l'espérance d'un régiment pour le jeune Grignan], ni trop me conter toutes vos pensées, ni tous vos raisonnements pour et contre, ni le dialogue de la crainte et de l'espérance ; je suis de moitié de tout cela. [Sévigné, 598] Mon amour-propre était de moitié avec le sien, dans tous les affronts que je supposais qu'elle essuyait. [Marivaux, La Vie de Marianne, ou les aventures de Madame la comtesse de ***] Pour ton bonheur qu'ils [l'hymen et l'amour] règnent de moitié. [Béranger, Coin de l'am.]

    Être de moitié, consentir. Villeroy manda au roi qu'il obéirait avec soumission et sans se plaindre, mais qu'il n'attendît pas de lui qu'il en fût jamais de moitié. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon]

  • 9De moitié, ou de la moitié, loc. adv. signifiant de beaucoup. Le moindre bruit que l'on peut faire Est le plus sûr de la moitié. [La Fontaine, Joc.] Sa taille [de Mme de Montespan] qui n'est pas de la moitié si grosse qu'elle était, sans que son teint, ni ses yeux, ni ses lèvres en soient moins bien. [Sévigné, 29 juill. 1676] Je suis plus riche de la moitié que je ne voudrais. [Fénelon, Pittacus.] Les Caraïbes sont de la moitié plus heureux que nous. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation]

    En rabattre de moitié ou de la moitié, se dit pour exprimer qu'on diminue beaucoup l'estime qu'on avait pour une personne.

REMARQUE

Si les mots moitié, tiers, quart, etc. expriment précisément la moitié, le tiers, le quart, ils sont collectifs généraux, et le verbe s'accorde avec le collectif : La moitié des députés a voté pour, et l'autre moitié contre le projet de loi. La moitié des recrues est dirigée sur Paris, et l'autre sur Lyon. Mais, s'il ne s'agit pas d'une quantité précise, le collectif n'a en réalité d'autre valeur que celle de beaucoup, de quantité ; alors il devient collectif partitif, et c'est le nom qui suit le collectif qui est le sujet du verbe : La moitié, le tiers, le quart des fruits de ce fruitier sont gâtés. De la même façon on dira : Une douzaine d'exemplaires de cette grammaire vous coûtera quinze francs, et : Une douzaine de livres étaient épars sur son bureau. Mais cette remarque n'est point une règle absolue ; et Corneille ne l'a pas suivie dans ces vers : Maxime et la moitié s'assurent de la porte, L'autre moitié me suit, et doit l'environner [Auguste], Cinna, II, 3.

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