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plier

vt (pli-é), je pliais, nous pliions, vous pliiez ; que je plie, que nous pliions, que vous pliiez
  • 1Mettre en un ou plusieurs doubles et avec un certain soin du linge, des étoffes, du papier. Plier des serviettes, des hardes, une lettre. J'ouvrirai la valise, et vous, sans le plier, Tout du long au-dessus vous mettrez le papier. [Hauteroche, L'Esprit follet ou La Dame invisible]

    Plier les étoffes, faire un pli au milieu dans toute leur longueur, et en faire ensuite plusieurs dans la largeur également distants les uns des autres, qu'on range alternativement en dedans et en dehors. Les femmes ne cessent jamais, ou de filer les laines, ou de faire des dessins de broderie, ou de plier les riches étoffes. [Fénelon, Télémaque]

    Il se dit aussi pour remettre une étoffe en ses premiers plis.

    Plier sur la main, faire tenir les mains en l'air et un peu éloignées l'une de l'autre, et faire passer tout autour du fil, de la soie, du galon. Plier un écheveau.

    Plier des soies, mettre les écheveaux de soie, au sortir de la teinture, en deux ou en trois suivant la longueur qu'on veut donner aux bottes.

    Plier un éventail, le monter et y mettre le bois.

  • 2Serrer, fermer ce qui était étendu, déployé. La Nuit, qu'il me faut avertir, N'a plus qu'à plier tous ses voiles. [Molière, L'amphytrion]

    Plier bagage, serrer les tentes, les bagages, et, par suite, décamper, se retirer, en parlant d'un corps de troupes.

    Fig. Plier bagage, s'en aller, fuir à la hâte, furtivement. Tout est perdu, Cliton, il faut plier bagage. [Corneille, Le menteur]

    Populairement. Plier bagage, mourir.

    On dit aussi : plier son paquet, mourir.

    Plier la toilette, faire un paquet de la toilette, et, par suite, voler, emporter toutes les hardes d'une personne. Il y avait chez elle la plus grande liberté du monde... il y en a même qui lui ont volé tantôt sa bourse, tantôt sa pelotte d'argent... et jamais il n'y eut demoiselle du Marais à qui on ait si souvent plié la toilette. [Tallemant, Historiettes, t. IX, p. 92]

    On a dit aussi : plier la serviette. Il la défend [une fille] dans ce métier Du commissaire du quartier, Et qu'un filou ne la maltraite, Ou n'aille plier sa serviette. le Voyage de Mercure, p. 92, dans FR. MICHEL, Argot]

    Plier toilette, s'est dit aussi dans le sens de plier bagage. Didon... Que la tyrannie et la haine De son frère Pygmalion... Contraignit de plier toilette, Et de déloger sans trompette. [Scarron, Virgile travesti] Tous les dieux, de Paphos délogeant sans trompette, S'en vinrent habiter ces lieux ; Et même les Amours plièrent la toilette Avec ce que leur mère eut de plus précieux. [Rousseau J.-b. Vers à Mme la comtesse de B***]

  • 3Fléchir, courber. Plier les genoux. Plier le bras. Je pousse mon cheval et par haut et par bas, Qui pliait des gaulis aussi gros que le bras. [Molière, Les fâcheux]

    Fig. Il faut plier les épaules, il faut se soumettre.

    Fig. Plier les genoux devant le veau d'or, voir VEAU.

    Terme de manége. Plier un cheval, plier le cou d'un cheval, lui amener la tête en dedans ou en dehors, afin de lui rendre l'encolure souple.

    Plier les jarrets, manier sur les jarrets.

    Plier les reins, se dit du cheval qui aplatit sa croupe en galopant.

  • 4 Fig. Assujettir, faire céder, accoutumer. Tant Bucer avait réussi par ses discours ambigus à plier les esprits, de sorte qu'ils pussent se tourner de tous côtés. [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes] Ces âmes inflexibles qu'on ne peut plier, et qui n'ont de l'état religieux que la clôture et que l'habit. [Bourdaloue, Exhort. sur l'obéiss. relig. t. I, p. 272] Elle le plia avec douceur sous le joug de l'autorité maternelle. [Fléchier, Oraisons funèbres] Etes-vous en état de discerner, entre vos conseillers, ceux qui suivent religieusement les règles, d'avec ceux qui voudraient les plier selon leurs vues ? [Fénelon, t. XXII, p. 269] Tu dois à ton état plier ton caractère. [Voltaire, Alzire, ou Les américains] Elles plient à leur gré la volonté de leur amant. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque] Un règne absolu de soixante-douze ans [de Louis XIV] avait plié deux ou trois générations à l'obéissance et à la crainte. [Duclos, Oeuv. t. v, p. 337] Qu'il plie, en approchant de ces superbes fronts, Sa tête à la prière et son âme aux affronts. [Chénier, Élégies]

    Accommoder. Il [l'homme] plia jusqu'aux métaux à son usage. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] C'est la langue qui plie en tons articulés les sons vagues qui ne seraient que des chants ou des cris. [Buffon, Oiseaux]

    Porter, engager. Il n'y a ni poste, ni crédit, ni richesses, ni titres, ni autorité, ni faveur qui aient pu vous plier à faire ce choix [choisir la Bruyère]. [La Bruyère, Disc. à l'Acad. franç.]

  • 5 vi Devenir courbe. Faire plier un are. Une lame d'épée qui plie jusqu'à la garde. Les vents me sont moins qu'à vous redoutables ; Je plie et ne romps pas. [La Fontaine, Fables] L'arbre tient bon ; le roseau plie. [La Fontaine, ib.] Et sous les pas nombreux de leur danse légère Faire à peine plier la mousse et la fougère. [Perrault, dans RICHELET] À cinq heures 39 minutes, la pièce [de bois] n'avait encore plié que de deux pouces, quoique chargée de seize milliers. [Buffon, Histoire naturelle générale et particulière]

    Fig. C'est un roseau qui plie à tout vent, se dit d'une personne qui n'a point de fermeté, qui cède à toute personne ou à toute chose.

    Terme de marine. Incliner sur un côté, en parlant d'un navire que le poids du vent dans ses voiles fait pencher plus que de raison.

  • 6S'affaisser, ne pas pouvoir porter. Le plancher pliait sous le faix. Cet arbre plie sous le poids de ses fruits.

    Fig. Contemplez-le [un heureux] dans le jour même où il a été nommé à un nouveau poste... voyez... comme il plie sous le poids de son bonheur. [La Bruyère, VIII] Ces gens lisent toutes les histoires, et ignorent l'histoire... ils plient sous le faix, leur mémoire en est accablée. [La Bruyère, XIII] On voit tous les jours plier sous les maux des hommes que le ciel n'épargne pas. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque]

    Fig. Plier sous le poids des années, être accablé par l'âge.

  • 7 Fig. Céder, se soumettre. Tout plia devant la cour : Mme de Longueville se sauva par mer en Hollande. [Retz, Mémoires] Louis, en une infinité de rencontres, est contraint de plier sous les coups de sa mauvaise fortune. [Bossuet, 2e panég. St Franç. de P. I] Qui ne veut jamais plier casse tout à coup. [Bossuet, Politique tirée des propres paroles de l'Écriture sainte] A-t-il plié [Montausier] sous la grandeur, lorsqu'elle s'est trouvée injuste ? [Fléchier, Oraisons funèbres] C'en est fait, mon orgueil est forcé de plier. [Racine, Esther] Dans la société, c'est la raison qui plie la première ; les plus sages sont souvent menés par le plus fou et le plus bizarre. [La Bruyère, V] Vous dites qu'il faut être modeste... faites seulement que les hommes n'empiètent pas sur ceux qui cèdent par modestie, et ne brisent pas ceux qui plient. [La Bruyère, XI] Il fallut que le pape pliât : il fut forcé d'envoyer son neveu, le cardinal Chigi, en qualité de légat à latere, faire satisfaction au roi. [Voltaire, Le siècle de Louis XIV] Il est impossible de rompre en visière aux gens qui plient. [Mirabeau, Lett. orig. t. III, p. 554] Il est temps que les lois prohibitives plient sous l'impérieuse loi de la nécessité. [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes]
  • 8En parlant des troupes, reculer dans un combat. La cavalerie ennemie, fondant sur la nôtre, la fit plier. [Pellisson, Lettres historiques] Ils avaient en tête Aristide et Thémistocle, qui les soutinrent longtemps avec un courage intrépide, mais qui furent enfin obligés de plier. [Rollin, Histoire ancienne]

    En termes de marine, on dit qu'un bâtiment de guerre plie lorsqu'il quitte le combat, qu'il fuit le champ de bataille. Le combat commença par les deux vaisseaux de la tête des deux avant-gardes ; Ruyter agit en homme qui voulait faire plier la nôtre, à quelque prix que ce fût. Mém. de Villette, 1676, dans JAL]

  • 9Se plier, vpron Se courber, être fléchi. Le bois se plie peu à peu. [Bossuet, Traité de la connaissance de Dieu et de soi-même] Les monnaies, qui ne doivent ni se plier, ni s'effacer, ni s'étendre, auraient tous ces inconvénients si elles étaient fabriquées d'or pur. [Buffon, Minéralogie] J'étais comme un arbre qu'on transporterait d'une forêt dans un jardin, et dont les branches ne pourraient qu'à la longue se plier au gré du jardinier. [Barthélemy, L'atlas du Voyage du jeune Anacharsis]

    Fig. La croyance des hommes s'est pliée par là. [Pascal, Miracles, 30, éd. FAUGÈRE.] Un homme d'esprit qui saurait se tourner et se plier en mille manières agréables et réjouissantes. [La Bruyère, IX.] Les uns à un certain âge ne peuvent plus se plier eux-mêmes contre certaines habitudes qui ont vieilli avec eux. [Fénelon, Télémaque]

  • 10 Fig. S'accommoder, déférer à. Il se plie sans cesse au gré des passions d'autrui. [Massillon, Mystères, Passion.] Tout se plie à mes principes. [Montesquieu, L'esprit des lois] Il faut donc [pour le théâtre] se plier au goût d'une nation d'autant plus difficile qu'elle est depuis longtemps rassasiée de chefs-d'oeuvre. [Voltaire, La méroppe française] La grande âme de ce digne homme, toute républicaine et fière, ne pouvait se plier que sous le joug de l'amitié. [Rousseau, Les confessions] La raison sans guide assuré, se pliant toujours vers l'intérêt personnel dans les choses douteuses. [Rousseau, Paix perp.] Les Tartares, qui s'étaient pliés aux moeurs et au gouvernement de la Chine. [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes]

    PROVERBE

    Il vaut mieux plier que rompre, c'est-à-dire il vaut mieux obéir, céder, que s'exposer à être maltraité, à tout perdre.

REMARQUE

Des grammairiens ont essayé de distinguer plier et ployer. Le fait est que ces deux mots sont identiques, n'étant que deux variétés de prononciation, l'i, dans la langue du moyen âge, se changeant souvent en oi, suivant les dialectes : lier, loier, prier, proier, etc. L'usage aurait pu y introduire des différences ; mais il ne l'a pas fait ; tout se réduit à ce que, en certaines locutions, plier est plus usité que ployer, et ployer que plier.

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