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renvoyer

vt (ran-vo-ié, quelques-uns prononcent ran-voi-ié)

Il se conjugue comme envoyer.

  • 1Envoyer de nouveau. Quelques biens toutefois que le ciel me renvoie, Mon coeur épouvanté se refuse à la joie. [Corneille, Nicomède]
  • 2Faire reporter à quelqu'un une chose qu'il avait envoyée, oubliée, prêtée, etc. On lui avait envoyé un présent, il l'a renvoyé. Je vous renverrai incessamment le livre que vous m'avez prêté. Je vous renvoie votre canne que vous avez oubliée.

    Renvoyer des lettres, envoyer à une personne les lettres écrites par elle. Son premier mouvement fut de lui renvoyer ses lettres. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont]

  • 3Ne pas accepter. Renvoyer un présent. Il [le philosophe] leur renvoie [à ses lecteurs] tous leurs éloges, qu'il n'a pas cherchés par son travail et par ses veilles. [La Bruyère, I]
  • 4Faire retourner quelqu'un au lieu d'où il était envoyé, d'où il était parti. On a renvoyé le courrier deux heures après son arrivée. Renvoyer une escorte. Renvoyer son équipage. Que je crains que sa mort, enlevant votre appui, Nous renvoie à l'exil où vous seriez sans lui ! [Corneille, Suréna] Le seul Agamemnon refusant la victoire.... Ne commande les Grecs que pour les renvoyer. [Racine, Iphigénie en Aulide] Il le faut à son roi renvoyer sans l'entendre [un ambassadeur]. [Voltaire, Brutus] Laissez-le au bout du monde, puisque aussi bien je l'y veux renvoyer. [Rousseau, Julie, ou la Nouvelle Héloïse]

    Absolument. Le livre que j'avais envoyé querir en Angleterre est imparfait ; j'y renvoie, pour avoir ce qui reste. [Malherbe, Lett. II, 25]

  • 5Repousser, répercuter, réfléchir. Une plaque de cheminée qui renvoie la chaleur dans la chambre. Ce mur, ce joueur renvoie bien la balle. L'opale étincelante à la perle mêlée Renvoie un jour pompeux vers la voûte étoilée. [Corneille, La toison d'or] Les cris que les rochers renvoyaient plus affreux. [Racine, Mithridate] Ce sont les surfaces solides des corps qui nous renvoient les rayons. [Voltaire, Eléments de la philosophie de Newton mis à la portée de tout le monde] L'or, les pierres précieuses, renvoyaient et multipliaient l'éclat des flambeaux. [Chateaubriand, les Mart. XX]

    Fig. et familièrement. Renvoyer la balle à quelqu'un, lui riposter, lui répliquer vivement.

    Se renvoyer la balle, se dit de deux personnes qui veulent se décharger l'une sur l'autre de l'embarras d'une affaire, d'un travail, etc.

  • 6 Fig. Reporter à, faire honneur à. Industrieux à se cacher dans les actions éclatantes, il en renvoyait la gloire au ministre, sans craindre dans le même temps de se charger des refus que l'intérêt de l'État rendait nécessaires. [Bossuet, Oraisons funèbres] C'était en ces occasions que M. de Turenne, se dépouillant de lui-même, renvoyait toute la gloire à celui à qui seul elle appartient légitimement. [Fléchier, Oraisons funèbres] Non, non, le temps n'est plus que Néron, jeune encore, Me renvoyait les voeux d'une cour qui l'adore. [Racine, Britannicus]

    Se renvoyer, renvoyer l'un à l'autre. Ils se sont renvoyé les reproches les plus vifs et les injures les plus piquantes.

  • 7Congédier. Je renvoie Hermione, et je mets sur son front, Au lieu de ma couronne, un éternel affront. [Racine, Andromaque] Le sénat répondit obligeamment à tous ces chefs, et renvoya Apollonius comblé d'honneurs et de présents. [Rollin, Histoire ancienne] Ce plaisir si doux au coeur de l'homme, d'en renvoyer un autre content de nous. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation] Il s'agit de renvoyer son auditoire plus instruit et surtout meilleur, de consoler, d'encourager les uns, de modérer et d'adoucir les autres. [Marmontel, Oeuv. t. VI, p. 43]

    Donner à quelqu'un son congé. Il est pourtant vrai que vous me renvoyez, Madame ; d'où vient ma disgrâce ? [Marivaux, Les fausses confidences] Cléon : Il [un domestique] est parti, je l'ai renvoyé ce matin. - Valère : Vous l'avez renvoyé : moi, je l'ai pris ; qu'il vienne. [Gresset, Le méchant] La marquise de Pompadour, qui avait fait renvoyer le comte de Maurepas, fit renvoyer de même le garde des sceaux Machaut et le comte d'Argenson. [Voltaire, Histoire du parlement de Paris] Le roi ne me regarde [moi, Mme de Maintenon] que comme une personne attachée à Mme de Montespan ; n'a-t-il pas dit : Si elle vous déplaît, renvoyez-la ? [Genlis, Mme de Maintenon, t. I, p. 18, dans POUGENS]

    Redonner à un novice ses habits du monde et le mettre hors du couvent, parce qu'on ne le trouve pas propre à demeurer en religion.

    Fig. et familièrement. Renvoyer quelqu'un bien loin, le refuser sèchement. J'allai lui proposer un tour de promenade, il me renvoya bien loin. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation]

    On dit quelquefois absolument, renvoyer, dans le même sens. Je l'ai renvoyé.

  • 8Adresser une personne à quelqu'un, en quelque lieu, ou à quelque chose, pour qu'elle s'éclaire, apprenne, se règle. Ces chiffres renvoient le lecteur aux notes placées à la fin du volume. C'est à vous à ordonner, ma chère madame ; car je les renvoie [des fermiers] tous à vos ordres. [Sévigné, à Mme de Guitaut, 5 févr. 1693] Après avoir considéré la lettre à laquelle vous me renvoyez. [Bossuet, Lett. 219] Vit-on jamais affaiblir la justice en faveur des juges, et livrer la bonne cause à leurs passions, sous prétexte de la renvoyer à leur conscience ? [Fléchier, Oraisons funèbres] C'est là [aux Écritures] que Jésus-Christ les avait souvent renvoyés, comme au témoignage le moins suspect de la vérité de son ministère. [Massillon, Myst. Passion, 2] Vous direz que l'esprit des femmes est moins propre à réfléchir qu'à saisir ; mais je vous renvoie au traité italien des études des dames et à la liste que M. Ménage a faite des femmes philosophes. [Dumars. Oeuv. t. III, p. 329] J'ai pour moi ma conscience, et vous renvoie à la vôtre. [Rousseau, Les confessions] Les observateurs de Lusace et celui du Palatinat m'ont pris pour juge de leurs différents ; je les ai tous renvoyés à la nature. [Bonnet, Lett. div. Oeuv. t. XII, p. 167, dans POUGENS]

    Fig. Renvoyer de Caïphe à Pilate, se dit des personnes qui, ayant à leur disposition une affaire, une grâce, se renvoient l'une à l'autre celui qui sollicite.

  • 9Faire entrer dans la classe de. Ce sont ceux que les grands et le vulgaire confondent avec les savants, et que les sages renvoient au pédantisme. [La Bruyère, I]

    Renvoyer aux mille et une nuits, refuser toute créance. Il [M. Simon] renvoie aux mille et une nuits la prétendue reine abeille avec son sérail. [Voltaire, Singul. nat. 6]

  • 10Remettre à un autre temps. Vous êtes imprudent de renvoyer l'affaire de votre salut à un temps que Dieu ne vous a point promis. [Massillon, Carême, Impén. fin.] Si vous renvoyez votre conversion à la mort, vous mourrez dans votre péché. [Massillon, ib.] Sous prétexte de l'absence de quelques personnes on renvoya encore une fois cette affaire. [Montesquieu, L'esprit des lois]

    Absolument. Notre prodigue touché ne renvoie pas à l'avenir ; il ne loue pas la vertu dans la vaine espérance d'en suivre un jour les règles saintes. [Massillon, Carême, Enf. prod.] Ne renvoyez pas à un autre temps. [Massillon, Carême, Samarit.] Et comme Archias, ils renvoyèrent au lendemain. [Condillac, Hist. anc. II, 8]

    Renvoyer aux calendes grecques, voir CALENDES.

  • 11Reconnaître comme étant du domaine de, de la compétence de. Le naturaliste, en traitant des minéraux, doit se borner aux objets que lui présente la nature, et renvoyer aux artistes tout ce que l'art a produit. [Buffon, Minéralogie]

    Ne trouver bon que pour. On renvoie les gémissements aux commençants. [Bossuet, Nouv. myst. 9]

  • 12Renvoyer une pétition, une proposition, etc. l'adresser à ceux qui doivent l'examiner, y faire droit, ou en rendre compte. La chambre a renvoyé la pétition au ministre de la guerre.
  • 13 Terme de jurisprudence. Ordonner qu'une partie se pourvoira ou qu'un accusé sera traduit devant tel ou tel juge. La chambre d'accusation l'a renvoyé devant les assises. Quand Tullus Hostilius renvoya le jugement d'Horace au peuple, il eut des raisons particulières que l'on trouve dans Denys d'Halicarnasse. [Montesquieu, L'esprit des lois] Le parlement renvoya l'affaire [de Lalli] au Châtelet en première instance ; et, bientôt après, des lettres patentes du roi renvoyèrent à la grand' chambre et à la Tournelle la connaissance de tous les délits commis dans l'Inde. [Voltaire, Pol. et lég. Fragm. hist. sur l'Inde, 18]

    Renvoyer un accusé, le renvoyer absous, quitte et absous, le renvoyer d'accusation, le décharger de l'accusation portée contre lui.

    On dit de même : Il a été renvoyé de la plainte.

    Renvoyer les parties à se pourvoir, se déclarer incompétent.

    Renvoyer un plaideur de sa demande, la lui refuser par jugement.

    Renvoyer deux plaideurs dos à dos, les débouter l'un et l'autre de leur prétention.

  • 14 Terme de marine. Renvoyer de bord, se dit quelquefois au lieu de virer de bord, vent devant.

REMARQUE

J. J. Rousseau a dit renvoyer pour dans le sens de remettre à ; cela n'est pas correct : Je n'ai pas écrit la moitié de ce que j'avais à écrire ; la moitié de la relation et le reste sera renvoyé pour lundi prochain, à Mme de Warens, 23 oct. 1737.

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