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substance

nf (sub-stan-s' ; au XVIe siècle, prononcé sustance, d'après Palsgrave, p. 23)
  • 1 Terme de philosophie. Ce qui subsiste par soi-même, à la différence de l'accident qui ne subsiste que dans un sujet. Toute chose dans laquelle réside immédiatement comme dans un sujet, ou par laquelle existe quelque chose que nous apercevons, c'est-à-dire quelque propriété, qualité ou attribut dont nous avons en nous une réelle idée, s'appelle substance. [Descartes, Rép. aux secondes object. 61] Je soutiens que le temps n'est rien, parce qu'il n'a ni forme, ni substance ; que tout son être n'est que de couler, c'est-à-dire que tout son être n'est que de périr. [Bossuet, Oraisons funèbres] Nous ne connaissons la matière que par quelques phénomènes ; nous la connaissons si peu, que nous l'appelons substance ; or le mot substance veut dire ce qui est dessous ; mais ce dessous nous sera éternellement caché. [Voltaire, Dictionnaire philosophique] Leibnitz disait que les véritables substances étaient nécessairement actives. [Bonnet, Oeuvr. mêlées, t. XVIII, p. 78, dans POUGENS] Si l'on ne veut parler des choses qu'autant qu'on se représente dans chacune un sujet qui en soutient les propriétés et les modes, on n'a besoin que du mot de substance. [Condillac, Conn. hum. v] L'objet de ce philosophe [Spinosa] est de prouver qu'il n'y a qu'une seule substance, dont tous les êtres, que nous prenons pour autant de substances, ne sont que les modifications ; que tout ce qui arrive est une suite également nécessaire de la nature de la substance unique. [Condillac, Traité des syst. 10] Dès que les qualités distinguent les corps, et qu'elles en sont des manières d'être, il y a dans les corps quelque chose que ces qualités modifient, qui en est le soutien ou le sujet, que nous nous représentons dessous, et que, par cette raison, nous appelons substance. [Condillac, Gramm. Préc. des leçons prél art. 1] Quand on a voulu pénétrer plus avant dans la nature de ce qu'on appelle substance, on n'a saisi que des fantômes. [Condillac, Gramm. II, 1]
  • 2 Par une déduction du sens philosophique, il se dit, avec une épithète ou un complément, des êtres spirituels, par opposition aux êtres matériels. La substance qui pense y peut être reçue ; Mais nous en bannissons la substance étendue. [Molière, Les femmes savantes] Je me trouve fort bien d'être une substance qui pense et qui lit. [Sévigné, 216] Vous nous direz comme vous vous y trouvez [à Grignan], et comme cette pauvre substance qui pense, et qui pense si vivement, aura pu conserver sa machine si belle et si délicate. [Sévigné, 25 oct. 1688] Il [Théodose] ordonnait que par tout son empire, selon la foi du saint concile de Nicée, on reconnût une seule substance indivisible dans la Trinité. [Fléchier, Histoire de Théodose le Grand] On doit conclure de tout ceci, que les esprits créés seraient peut-être plus exactement définis, substances qui aperçoivent ce qui les touche ou les modifie, que de dire simplement que ce sont des substances qui pensent. [Malebranche, De la Recherche de la vérité] Pour de l'esprit, continua-t-il, je ne crois pas qu'une substance céleste puisse en avoir plus que votre cousine : en un mot, c'est une personne d'un mérite accompli. [Lesage, Histoire de Gil Blas de Santillane] Y a-t-il des substances dont l'essence soit de penser, qui pensent toujours, et qui pensent par elles-mêmes ? [Voltaire, Phil. ignor. 29] Qu'il y ait des substances immatérielles et intelligentes, c'est de quoi je ne doute pas. [Voltaire, Micromégas, ch. 7] Leur substance [des anges], fluide et pure comme l'air, Comme lui peut braver les atteintes du fer. [Delille, Paradis perdu]
  • 3Matière dont un corps est formé, et en vertu de laquelle il a des propriétés particulières. Substance liquide, pierreuse, métallique. Substance compacte. Les substances employées en médecine. Aux plus jeunes guerriers [ils] s'offrent pour aliment, Comme s'ils espéraient, changés en leur substance, être encore de Rome et l'âme et la défense. [Du Ryer, Scévole, II, 3] Si, dans le système de cet univers, il est nécessaire à la conservation du genre humain qu'il y ait une circulation de substance entre les hommes, les animaux et les végétaux, alors le mal particulier d'un individu contribue au bien général. [Rousseau, Correspondance] Bergman observe qu'il faut considérer comme une substance particulière celle qui a des propriétés qui lui sont spéciales et que l'on peut toujours obtenir d'une manière semblable à elle-même. [Sennebier, Ess. art d'observ. t. III, p. 101, dans POUGENS]

    On dit qu'un médicament est administré en substance, quand on le donne dans son état naturel et sans aucune préparation chimique ni pharmaceutique.

    Terme d'anatomie générale. Substances organiques ou principes immédiats, corps liquides ou solides, qui ne sont ni cristallisables, ni volatils sans décomposition ; brûlant avec peu de flamme en se boursouflant ; dégageant des produits empyreumatiques ammoniacaux, azotés et d'odeur âcre, puis laissant un charbon brillant, volumineux, difficile à incinérer.

    Substance fondamentale, voir FONDAMENTAL.

  • 4 Absolument. Ce qu'il y a de nourrissant, de succulent en quelque chose. Les plantes attirent la substance de la terre. Aliments qui ont peu de substance. La substance de la viande bouillie passe dans le bouillon.

    Fig. Qui de nous n'a pas été prodigue ? qui n'a pas dissipé sa substance par une vie déréglée et licencieuse ? [Bossuet, 1er panég. St Fr. de Paule, Préamb.]

  • 5 Fig. Ce qui nourrit l'esprit comme la substance nourrit le corps. Il y a beaucoup de paroles et peu de substance dans ce discours. Il y a plus de substance dans une de ses pages que dans tous les volumes des détracteurs de Sénèque. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque] Son langage était rapide, entrecoupé, plein de substance et de chaleur. [Marmontel, Contes moraux]
  • 6Ce qu'il y a d'essentiel, d'important dans un écrit, un acte, une affaire, etc. Laisse-moi de ce mot [billet] méditer la substance. [Rotrou, Bélisaire] Il ne me souvient peut-être pas des propres paroles ; mais je suis assuré que c'en était la substance. [Retz, Mémoires] S'ils [les dominicains] sont conformes aux jésuites par un terme qui n'a pas de sens [grâce suffisante], ils leur sont contraires et conformes aux jansénistes dans la substance de la chose. [Pascal, Les provinciales] La substance de presque tous les ordres émanés du trône était contenue dans ces mots : car tel est notre plaisir ; Louis XVI aurait pu dire : car telle est notre sagesse et notre bonté. [Voltaire, Pol. et lég. Édits de Louis XVI] Des révolutions qu'elle [la religion chrétienne] a souffertes, non dans la substance des dogmes, mais dans la manière de les enseigner. [D'alembert, Élog. Fleury.]
  • 7Ce qui est absolument nécessaire pour la subsistance. Ils consument en douleur leur substance et leurs jours. [Patru, Plaidoyers, I] On dévore la substance du pauvre, on ruine la veuve et l'orphelin. [Bourdaloue, Carême, II, Richesses, 17] Si ceux qui passent leurs jours dans les travaux rustiques, avaient le loisir de murmurer, ils s'élèveraient contre les exactions qui leur enlèvent une partie de leur substance. [Voltaire, Le siècle de Louis XIV] Tous ces vils sénateurs dont l'avarice inique Dévore sans pitié la substance publique. [Chénier M. J. Gracques, I, 2]
  • 8En substance, loc. adv. En gros, sommairement. Voici en substance de quoi il s'agit. Elle [une lettre] contenait en substance quelques particularités de la conduite de Dieu sur la vie et sur la maladie que je voudrais vous répéter ici. [Pascal, Lettres] Les mémoires [des corporations] disaient tous en substance : Conserveznous et détruisez toutes les autres. [Voltaire, Babouc.]
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