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pardonner

(par-do-né)
  • 1 vt Remettre la punition ou la vengeance de quelque chose. Pardonner une offense. Tes péchés te sont pardonnés. Je lui pardonne ses torts. Dieu pardonne plus aisément les crimes que les vices. [Maintenon, Lettres] Quelque délicat qu'on soit en amour, on pardonne plus de fautes que dans l'amitié. [La Bruyère, IV] On pardonne les maux, mais non pas les injures. [Delille, Paradis perdu]

    Neutralement, même signification. Je lui pardonne de m'avoir offensé. On pardonne aisément aux personnes qu'on aime. [Hauteroche, Le Cocher supposé] Ô ciel ! pardonne-lui comme je lui pardonne. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur] Pardonnez-vous sans peine à tous vos ennemis ? [Boileau, Epîtres] Il est pénible à un homme fier de pardonner à celui qui le surprend en faute, et qui se plaint de lui avec raison. [La Bruyère, IV] Les rois pardonnent rarement à ceux qu'ils craignent. [Duclos, Oeuv. t. III, p. 38] On ne pardonne point à qui nous fait rougir. [La Harpe, Mélanie, III, 1]

    Il s'applique quelquefois à un nom de chose personnifiée. Et qui pardonne au crime en devient le complice. [Voltaire, Brutus]

    Absolument. On dit que pardonner est une oeuvre divine. [Régnier, Satires] Pardonner à demi, c'est ne pardonner pas. [Mairet, La mort d'Asdrubal] Qui pardonne aisément invite à l'offenser. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] On pardonne tant que l'on aime. [La Rochefoucauld, Maximes et Réflexions morales] Dire qu'on ne saurait haïr N'est-ce pas dire qu'on pardonne ? [Molière, L'amphytrion] Les rois comme les dieux sont faits pour pardonner. [Boursault, Ésope à la cour, V, 7] Peut-être l'on préfère avec quelque plaisir L'orgueil de pardonner à l'orgueil de punir. [La Harpe, Warwick, IV, 4]

    Familièrement. Dieu me pardonne, espèce d'excuse ou d'adoucissement à ce qu'on dit. Dieu me pardonne ! madame, je crois que vous n'avez point de chemise ! [Voltaire, Dialogue de Pégase et du vieillard]

    Faire grâce. Le roi lui pardonna. Cet écolier avait mérité une punition, le maître lui a pardonné.

  • 2Excuser, tolérer. Lynx envers nos pareils, et taupes envers nous, Nous nous pardonnons tout et rien aux autres hommes. [La Fontaine, Fables] Les plus expérimentés dans les affaires font des fautes capitales ; mais que nous nous pardonnons aisément nos fautes, quand la fortune nous les pardonne ! [Bossuet, Oraisons funèbres] M. de Montausier n'a-t-il pas eu, dans la licence de la guerre, une scrupuleuse retenue dans un temps où l'on pardonnait un peu d'avarice, pour entretenir le courage et la bonne humeur des gens de guerre ! [Fléchier, Oraisons funèbres] En faveur de Titus vous pardonnez le reste. [Racine, Bérénice] Pardonnez à l'éclat d'une illustre fortune Ce reste de fierté qui craint d'être importune. [Racine, Andromaque] L'on ne peut aller loin dans l'amitié, si l'on n'est pas disposé à se pardonner les uns aux autres les petits défauts. [La Bruyère, V] Si quelquefois une femme survient qui n'est pas de leurs plaisirs [des gens d'une coterie]..., ils ne lui pardonneront ni son ton de voix, ni son silence, ni sa taille, ni son visage, ni son habillement, ni son entrée, ni la manière dont elle est sortie. [La Bruyère, VII] Elle nous a amenées, et elle ne nous le pardonnerait pas si nous restions. [Marivaux, La Vie de Marianne, ou les aventures de Madame la comtesse de ***] Ô mes rois, pardonnez mes larmes paternelles. [Voltaire, L'orphelin de la Chine]

    Neutralement, même signification. Nous pardonnons souvent à ceux qui nous ennuient ; mais nous ne pardonnons pas à ceux que nous ennuyons. [La Rochefoucauld, dans GIRAULT-DUVIVIER] Pardonne, cher Hector, à ma crédulité. [Racine, Andromaque] Je lui pardonne De préférer les beautés De Palès et de Pomone Au tumulte des cités. [Rousseau J.-b. dans GIRAULT-DUVIVIER] Ah ! seigneur, pardonnez à son impatience. [Voltaire, Le fanatisme, ou Mahomet le Prophète]

    Terme de civilité. Pardonnez-moi la liberté que je prends d'être d'une autre opinion que vous.

    On dit de même : pardonnez-moi ce langage, ces expressions. Représentons-nous ce jeune prince que les Grâces semblaient elles-mêmes avoir formé de leurs mains ; pardonnez-moi ces expressions ; il me semble que je vois encore tomber cette fleur. [Bossuet, Oraisons funèbres]

    Il s'emploie aussi absolument dans des formules analogues de civilité. Pardonnez-moi, ou, simplement, pardonnez si je vous contredis. Vous me pardonnerez si je rectifie ce que vous venez de dire.

    Dans cette acception, on dit quelquefois simplement et sans rien ajouter : Pardonnez-moi, vous me pardonnerez, pour exprimer civilement qu'on n'est pas d'accord de ce qu'un autre dit.

  • 3Ne point pardonner, juger sévèrement, condamner. Il ne pardonne point les endroits négligés. [Boileau, L'art poétique]

    vi Même signification. Il ne pardonne pas aux vers de la Pucelle. [Boileau, Satires]

  • 4Voir sans dépit, sans jalousie. On lui pardonne ses succès à cause de sa modestie. Il [Antoine Arnauld] plaida cette cause avec une véhémence et un éclat que les jésuites ne lui ont jamais pardonnés. [Racine, Hist. Port-Royal.] Les grands surtout ne pouvaient pardonner à César la vie qu'il leur avait donnée dans les plaines de Pharsale. [Vertot, Histoire des révolutions arrivées dans le gouvernement de la République romaine]

    vi Même signification. Des droits de ses enfants une mère jalouse Pardonne rarement au fils d'une autre épouse. [Racine, Phèdre]

  • 5 vi Épargner, excepter (en cet emploi, il ne se dit qu'avec ne et à). La mort ne pardonne à personne. On ne pardonne ni à âge, ni à sexe, à lieu sacré ni à profane. [Perrot, Tacite, 42]

    Absolument. Cette maladie ne pardonne point, on y succombe tôt ou tard.

  • 6Se pardonner, vpron Être pardonné. Perfide, cet affront se peut-il pardonner ? [Racine, Iphigénie en Aulide]

REMARQUE

Quand ce verbe a pour régime un nom de personne, c'est toujours le régime indirect qu'il faut employer : pardonner à quelqu'un, et non pardonner quelqu'un. Cependant le passif s'emploie quelquefois ; voyez ce qui est noté au participe.

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