Voir les citations avec "presser"

presser

vt (prè-sé)
  • 1Serrer avec plus ou moins de force. S'étant levé de grand matin, il pressa la toison, et remplit une tasse de la rosée qui en sortit. [Sacy, Bible, Juges, VI, 38] Il veut parler, l'écorce a sa langue pressée. [La Fontaine, Phil. et Bauc.] Et, la faux à la main, parmi vos marécages, Allez couper vos joncs et presser vos laitages. [Boileau, Epîtres] De ses bras innocents [d'un enfant] je me sentis presser. [Racine, Athalie] Il [la Métrie] m'a juré qu'en parlant au roi, ces jours passés, de ma prétendue faveur et de la petite jalousie qu'elle excite, le roi lui avait répondu : J'aurai besoin de lui un an, tout au plus ; on presse l'orange, et on en jette l'écorce. [Voltaire, Correspondance] Je vois bien qu'on a pressé l'orange ; il faut penser à sauver l'écorce. [Voltaire, ib. 18 déc. 1752]

    Fig. Pressez-les, tordez-les, ils dégouttent l'orgueil, l'arrogance, la présomption. [La Bruyère, VIII] On se nourrit des anciens et des habiles modernes ; on les presse, on en tire le plus qu'on peut, on en renfle ses ouvrages. [La Bruyère, I]

    Fig. Presser une éponge, tirer de l'argent de quelqu'un. Ce serait une éponge à presser au besoin. [Regnard, Le joueur]

    Fig. Il ne faut pas trop presser cette comparaison, ce bon mot, etc. il ne faut pas en examiner de trop près la justesse. Je veux que ce soit là une de ces expressions qu'il ne faut pas trop presser, quoique les paroles des saints soient toujours respectables. [Massillon, Carême, Pet. nombre des élus.] Il ne faudrait pas presser cette comparaison ; car le bouton végétal n'est proprement qu'une enveloppe. [Bonnet, 1er mém. reprod. salamandres.]

    Fig. Il ne faut pas trop presser cette maxime, il ne faut pas la pousser à la dernière rigueur. Julie : être jeune !... Être belle !... oui, c'est un double crime Dont....Clitandre : Non ; il ne faut pas trop presser ma maxime. [Lanoue, Coquette corr. III, 3]

    Fig. Presser le vrai, le bien, les examiner dans leur essence. Prendre le vrai et le bien sur la première apparence, sans les presser, parce qu'ils sont si peu solides, que, quelque peu qu'on serre les mains, ils s'échappent entre les doigts et les laissent vides. [Pascal, Entret. avec M. de Saci.] La vertu ! Eh bien ! pressons ce mot jusqu'à ce qu'il se brise. [Lamartine, Harold]

  • 2Peser sur. La moindre force est capable de les séparer [les deux moitiés de la sphère d'Otto de Guericke], lorsque l'air, étant rentré dans la sphère de cuivre, pousse les surfaces concaves et intérieures, autant que l'air de dehors presse les surfaces extérieures et convexes. [Malebranche, De la Recherche de la vérité] Le sommeil du tombeau pressera ma paupière.... [Chénier, Odes et Iambes]
  • 3Soumettre à l'action d'une presse. Presser le marc d'huile.

    Fig. Il fallut presser cent quintaux de mensonges pour en extraire une once de vérité. [Voltaire, Fragm. sur l'hist. v.]

  • 4Approcher une personne, une chose contre une autre. Il faut presser les rangs. Pressez un peu votre écriture. Il ne faut pas être pressé à table.

    Fig. Serrer, rapprocher, condenser. Je ne puis dénier que la règle des vingt-quatre heures presse trop les incidents de cette pièce. [Corneille, Le Cid] Je sais bien que Sylla, dont je parle tant dans ce poëme, était mort six ans avant Sertorius ; mais, à le prendre à la rigueur, il est permis de presser les temps pour faire l'unité de jour. [Corneille, Sertorius] Je ne pense pas que dans la comédie le poëte ait cette liberté de presser son action par la nécessité de la réduire dans l'unité de jour. [Corneille, 2e disc.] Mon petit colonel [le jeune Grignan] m'a écrit.... il nous parle de la manière dont ses dernières années ont été pressées.... [Sévigné, 11 déc. 1689]

    Presser ses raisonnements, ses idées, ses expressions, leur donner une forme serrée.

    Presser son style, s'exprimer avec concision.

  • 5Dans la marine anglaise, obliger les équipages des vaisseaux marchands et les bateliers de la Tamise à servir sur les vaisseaux de l'État.
  • 6 Fig. Poursuivre sans relâche, attaquer avec ardeur. Nous les pressons sur l'eau, nous les pressons sur terre. [Corneille, Le Cid] Quand, des Parthes vaincus pressant l'adroite fuite, Il tomba dans leurs fers au bout de sa poursuite. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] Un seul vit des voleurs, et, se sentant presser, Il mit entre eux et lui cette onde menaçante. [La Fontaine, Fables] Oxathrès, frère de Darius, voyant qu'Alexandre pressait vivement ce prince, se jeta devant son chariot avec la cavalerie qu'il commandait. [Rollin, Histoire ancienne] Pendant qu'il [Henri IV] pressait Paris, les moines armés faisaient des processions, le mousquet et le crucifix à la main. [Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations et sur les principaux faits de l'histoire depuis Charlemagne jusqu'à Louis XIII]

    Fig. On sait ce qui se passa dans la conversion de Henri IV : quand il pressait ses théologiens, ils lui avouaient qu'avec eux.... [Bossuet, 3e avert. 16] Le théologien vous pressera et vous dira : Si vous croyez la matière éternelle.... [Voltaire, Dictionnaire philosophique]

  • 7 Fig. Exercer une pression, une gêne. Un tas d'hommes perdus de dettes et de crimes, Que pressent de mes lois les ordres légitimes. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] Le bonheur du roi a fait repasser la Meuse au duc de Lorraine et au prince d'Orange ; M. de Turenne a ses coudées franches ; de sorte que nous ne sommes plus pressés d'aucun endroit. [Sévigné, 28 juin 1675] On en fit autant à Spire, ville appartenant à l'électeur de Trèves, comme évêque de Spire, parce qu'on trouvait qu'elle pressait trop l'Alsace. [La Fayette, Mém. cour de France, Oeuv. t. III, p. 32, dans POUGENS.] Tandis que.... Valois pressait l'État du fardeau des subsides. [Voltaire, La Henriade]

    Absolument. L'on devrait bien sentir l'état où l'on s'est mis, qui presse et qui contraint, et qui ôte la liberté. [Sévigné, 13 mars 1680]

  • 8 Fig. Exercer dès réclamations d'argent. Je dis une vérité sur le malheur d'avoir des dettes : ceux qui nous pressent sont pressants ; ceux qui ne nous pressent point, le sont encore davantage. [Sévigné, 591] Un généreux ami dont la belle âme et le beau procédé me presseraient plus que tous les sergents du monde. [Sévigné, 12 oct. 1689] Il vaut mieux qu'il les ait perdus [mille écus] contre moi que contre un autre ; du moins je ne le presserai pas. [Genlis, Théât. d'éduc. les Faux amis, II, 6]
  • 9Insister auprès de quelqu'un pour. Il ne faut pas me presser pour écrire sur l'oraison. [Bossuet, Lett. abb. 156] Pour savoir mon secret tu me pressais toi-même. [Racine, Mithridate] Calypso n'osa le presser davantage. [Fénelon, Télémaque] J'ai des raisons qui m'obligent à ne vous presser pas davantage sur cela. [Brueys, Muet. IV, 13]

    Presser quelqu'un de, avec un substantif, l'engager instamment à. Vous l'avez fait renaître [mon amour] en me pressant d'un choix Qui rompt de vos traités les favorables lois. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] Toute la courtoisie enfin dont je vous presse, C'est que je puisse voir votre belle maîtresse. [Molière, L'école des femmes] Vivez, c'est moi qui vous en presse. [Voltaire, Œdipe]

    Presser de, avec un infinitif. Un jour, il m'en souvient, le sénat équitable Vous pressait de souscrire à la mort d'un coupable. [Racine, Britannicus] Vous savez que c'est Protésilas qui vous a pressé d'envoyer Philoclès contre les Carpathiens. [Fénelon, Télémaque] Dans sa jeunesse [de Thalès] sa mère le pressa de se marier ; elle l'en pressa de nouveau plusieurs années après.... [Barthélemy, L'atlas du Voyage du jeune Anacharsis]

    Absolument. Faire de vives instances. ....un vieillard demande à vous parler ; Il se dit de Corinthe, et presse.... [Corneille, Oedipe] Allez, parlez, pressez ; vous obtiendrez sa grâce. [Lamotte, Inès de Castro, IV, 6]

    Presser quelqu'un de questions, lui faire des interrogations vives et répétées.

    Presser une femme, la courtiser vivement. Un magistrat pressait avec vivacité une veuve. [Voltaire, Babouc.]

  • 10Recommander avec instance l'accomplissement de. Ces personnes bizarres qui se scandalisent quand on presse les devoirs de la religion. [Saurin, Disc. de saint Paul à Félix et à Drusille] Prêche-t-on en la présence d'une cour effrénée, on pressera la liberté évangélique et les miséricordes divines. [Saurin, ib.]
  • 11Contraindre à une restitution. Morstein s'était fort enrichi et avait excité l'envie de ses compatriotes [les Polonais] ; la peur qu'il eut d'être pressé le fit retirer en France. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon]
  • 12Il se dit des besoins physiques qui se font sentir impérieusement. Le jour même il assiégea la citadelle, où Aristion et ceux qui s'y étaient réfugiés furent bientôt tellement pressés de la soif et de la faim, qu'ils furent contraints de se rendre. [Rollin, Histoire ancienne]

    Il se dit, dans un sens analogue, des passions, des sentiments, etc. Suivrai-je contre vous la fureur qui me presse ? [Corneille, Galerie, IV, 5] Les indignes frayeurs dont je me sens presser... [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] L'ambition, qui presse mon courage. [Corneille, Sertorius] À ces dernières paroles de Claudia, je fus si pressée de ma juste douleur.... que je m'évanouis encore. [Scarron, Le Roman comique] Toutes les pensées qui me pressent le coeur. [Sévigné, 27 mai, 1675] Où peut être Médor ? le désespoir le presse. [Quinault, Rol. II, 11] Je laisse Jésus-Christ sur le Thabor, pour arrêter ma vue sur un autre objet qui nous presse plus fortement à la pénitence. [Bossuet, Sermons] Le désir qui vous presse pour la religion est un grand bien. [Bossuet, Lett. Corn. 52] Un désir curieux plus que l'amour me presse. [Regnard, Les Ménechmes] Je sens que Dieu me presse et qu'il m'appelle à lui. [Lamartine, Jocelyn]

  • 13Il se dit des dangers, de la mort qui sont imminents. Le danger le presse de toutes parts. Déclarons le péril dont son frère est pressé. [Racine, Bajazet] Non, mon ami, je me sens bien : la mort me presse, il faut nous quitter. [Rousseau, Julie, ou la Nouvelle Héloïse]

    En un sens analogue. Alix malade et se sentant presser. [La Fontaine, Alix.]

  • 14Obliger à se diligenter. Il n'y en a point qui pressent tant les autres que les paresseux, lorsqu'ils ont satisfait leur paresse, afin de paraître diligents. [La Rochefoucauld, Prem. pens. 110] Diantre soit de votre impatience ! vous pressez si fort les personnes, que je me suis donné un grand coup à la tête contre la carne d'un volet. [Molière, Le malade imaginaire] Travaillez à loisir, quelque ordre qui vous presse. [Boileau, L'art poétique]

    Presser le pas, presser la marche, rendre le pas, la marche plus rapide.

    Terme de manége. Presser un cheval, le faire aller très vite ; l'empêcher de ralentir son allure. Comme il pressait extrêmement son cheval dans un chemin creux et fort étroit. [Scarron, Le Roman comique] On dit qu'on a vu même, en ce désordre affreux, Un dieu qui d'aiguillons pressait leurs flancs poudreux [des chevaux d'Hippolyte]. [Racine, Phèdre]

    S'efforcer de rendre prochain, hâter, accélérer. Quel autre a mieux pressé les secours nécessaires ? [Corneille, Nicomède] Et quand tes trahisons pressent leur noir effet. [Corneille, La toison d'or] J'attends l'occasion de m'offrir hautement, Et de tous mes souhaits j'en presse le moment. [Molière, Le misanthrope] La cicatrice fait une fort bonne mine de vouloir s'avancer ; et, pour la presser encore davantage.... [Sévigné, 4 fév. 1685] Nous pressions notre départ. [Fénelon, Télémaque] Les assiégeants pressèrent leurs ouvrages avec activité. [Voltaire, Histoire de Charles XII] Tel que, dans les combats, maître de son courage, Tranquille il arrêtait ou pressait le carnage. [Id. Henr. II] Je presse la nouvelle édition du Siècle de Louis XIV. [Voltaire, Correspondance]

    Terme de musique. Presser la mesure, rendre le mouvement plus rapide, ou trop rapide.

    On dit de même : presser le mouvement. M'interrompant à chaque minute, pour dire : cela est faux, vous pressez le mouvement. [Genlis, Ad. et Théod. t. III, p. 426, dans POUGENS]

    Fig. Presser la mesure, suivre une affaire de près, la faire marcher.

  • 15Pousser en avant. Du ruisseau qui murmure ou du torrent qui gronde Les flots pressent les flots et l'onde pousse l'onde. [Delille, Paradis perdu]
  • 16 vi Ne souffrir aucun délai, en parlant des choses. J'écris à ma soeur Cornuau, dont la lettre presse. [Bossuet, Lett. abb. 245] Le temps presse ; que faire en ce doute funeste ? [Racine, Bajazet] Le péril des Juifs presse et veut un prompt secours. [Racine, Esther] Elle [une dame] se fit habiller pour y aller [au bal de l'Opéra], et, en attendant l'heure, elle se mit à lire le nouveau roman [l'Héloïse].... ses gens, voyant qu'elle s'oubliait, vinrent l'avertir qu'il était deux heures ; rien ne presse encore, dit-elle, en lisant toujours. [Rousseau, Les confessions]

    La douleur presse, elle est aiguë et violente.

    Impersonnellement. Il presse, il est urgent. Je vous en donne avis, de peur d'une surprise ; Il presse fort. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] Si vous croyez qu'il presse de faire quelque réponse. [Bossuet, Proj. de réunion, 2e partie, lett. X]

  • 17Se presser, vpron Se serrer les uns contre les autres. Pressez-vous un peu, il y aura place pour tous. Voyez ces nouveaux convertis, avec quel zèle ils vendent leurs biens, et comme ils se pressent autour des apôtres. [Bossuet, Sermons] Le peuple.... Vole de toutes parts, se presse, l'environne. [Racine, Britannicus]

    Être serré l'un contre l'autre, en parlant de choses. Les morceaux trop hâtés se pressent dans sa bouche. [Boileau, Le lutrin]

  • 18Se hâter. Elle a une douceur et une modestie qui me charme ; elle ne se presse jamais de faire voir qu'elle a plus d'esprit que les autres. [Sévigné, 19 mai 1677] Va, fais dire à Mathan qu'il vienne, qu'il se presse. [Racine, Athalie] Pourquoi vous pressez-vous de répondre pour lui ? [Racine, Athalie] J'étais historiographe de France, lorsque je commençai le Siècle de Louis XIV ; je dois finir ce que j'ai commencé.... enfin je dois me presser, ayant peu de temps à vivre. [Voltaire, Correspondance] Je me presse de rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer. [Beaumarchais, Le barbier de Séville, ou La précaution inutile]

    Avec ellipse du pronom personnel. Ce qui m'a fait presser de vous dire tout ceci. [Sévigné, le jour des Rois 1687]

  • 19 Fig. Être serré par la douleur. Vos larmes vont couler, et votre coeur se presse : Consumez avec lui toute cette faiblesse. [Corneille, Horace] M. de Coulanges que j'adore, parce qu'il me parle de vous : mais vous savez ce qui m'arrive, c'est que je pleure, et mon coeur se presse si étrangement, que je lui fais signe de la main de se taire, et il se tait. [Sévigné, 105]
  • 20Se combattre l'un l'autre avec des arguments serrés. On aurait vu ces nouveaux docteurs, qui tous donnaient l'Écriture pour si claire, se presser mutuellement par son autorité, sans jamais pouvoir convenir de rien. [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes]
  • rechercher