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valoir

vi (va-loir), je vaux, tu vaux, il vaut, nous valons, vous valez, ils valent ; je valais ; je valus, nous valûmes ; je vaudrai ; je vaudrais ; valons, valez, qu'ils vaillent ; que je vaille, que nous valions, que vous valiez, qu'ils vaillent ; que je valusse ; valant ; valu
  • 1Être d'un certain mérite, en parlant des personnes (sens le plus rapproché du sens latin de valere, être fort). Croyez que.... tant que je vaudrai quelque chose, je ne puis manquer d'être votre serviteur. [Voiture, Lettres] Je te connais, Léonce, et mieux que tu ne crois ; Je sais ce que tu vaux, et ce que je te dois. [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Comme tu m'as souvent dit que je ne valais pas grand'chose. [Boursault, Lett. nouv. t. III, p. 247, dans POUGENS] C'est par là que je vaux, si je vaux quelque chose. [Boileau, Satires] ....Si je vaux quelque chose C'est par là que je vaux, et par ma belle humeur. [Regnard, Le distrait] Ma foi, quand je parcours tout ce qui le compose [le monde], Je ne trouve que nous qui valions quelque chose. [Gresset, Le méchant] Chacun des deux est présentement ce qu'il faut à l'autre ; il m'éclaire, et je l'anime ; nous en valons mieux réunis. [Rousseau, Julie, ou la Nouvelle Héloïse] Obligé de valoir, mon fils en vaudra mieux. [Saurin, Beverlei, I, 1] Sans vanité l'on peut sentir ce que l'on vaut. [Picard, L'entrée dans le monde]

    Valoir beaucoup, avoir beaucoup de mérite ; valoir trop, avoir trop de mérite. Tu vaux trop ; c'est ainsi qu'il faut, quand on se moque, Que le moqué surtout sorte fort satisfait. [Corneille, La veuve] Je sais qu'il [votre fils] vaut beaucoup, étant sorti de vous. [Corneille, Le menteur] Cette femme ambitieuse et vaine croit valoir beaucoup quand elle s'est chargée d'or et de pierreries. [Bossuet, Oraisons funèbres]

    Absolument, valoir, avoir de la fortune, du crédit, etc. On ne vaut et l'on n'est heureux qu'autant qu'on se voit à son aise et bien pourvu. [Bourdaloue, Exhort. sur le reniem. de St Pierre, t. I, p. 463]

    Ne valoir pas, être au-dessous de. Le reste [des conjurés] ne vaut pas l'honneur d'être nommé. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] Les hommes ne valent pas la peine qu'on prend pour les éclairer ; et ceux même qui pensent comme nous, nous persécutent. [D'alembert, Lett. à Voltaire, 22 déc. 1765]

    Il ne vaut pas la peine qu'on lui réponde, se dit, par mépris, d'un homme avec qui on ne veut point entrer en contestation.

    Ne valoir pas que, avec le subjonctif, même sens. Lâche, tu ne vaux pas que, pour te démentir, Je daigne m'abaisser jusqu'à te repartir. [Corneille, Othon] Allez, de tels soupçons méritent ma colère ; Et vous ne valez pas que l'on vous considère. [Molière, Le misanthrope]

    Cet homme en vaut bien un autre, cet homme mérite autant d'estime qu'aucun autre. Mais je crois qu'après tout ses soeurs la valent bien. [Corneille, Oedipe] Vous et moi nous en valons deux autres. [Regnard, Le joueur] Les femmes valent bien messieurs les beaux esprits. [Destouches, Le philosophe marié] Un lion mort ne vaut pas Un moucheron qui respire. [Voltaire, Ecclés. Précis.] Je crois valoir au moins les rois que j'ai vaincus. [Voltaire, La méroppe française] Si Virgile était janséniste, Horace, qui le valait bien, était moliniste. [D'alembert, Oeuv. t. v, p. 183]

    Monsieur vaut bien madame, voir MONSIEUR.

  • 2Il se dit du mérite qu'ont les choses. Aussi n'appartient-il qu'aux Romains seulement De m'accorder un don qui vaille infiniment. [Mairet, Sophonisbe] Mais commander ici vaut bien servir ailleurs. [Corneille, La toison d'or] Et d'autres lieux de cette mer, Qui ne valent pas le nommer. [Scarron, Virgile travesti] Nous n'estimons pas que toute la philosophie vaille une heure de peine. [Pascal, Pensées] Il me semble qu'elle [cette peinture que je viens de vous faire] ne vaut guère. [Sévigné, 6 août 1680] Dans les premiers temps, la poésie et la philosophie étaient la même chose, toute sagesse était renfermée dans les poëmes ; ce n'est pas que par cette alliance la poésie en valût mieux, mais la philosophie en valait moins. [Fontenelle, Histoire des oracles] N'estimez votre état que ce qu'il vaut, et vous en vaudrez davantage. [Rousseau, Correspondance] Personne ne donnait un avis qui valût le sien, soit pour l'ameublement, soit pour la toilette. [Reybaud, Jér. Paturot, II, 17]

    Cette chose, cette affaire ne vaut pas la peine d'y penser, d'en parler, cette chose, cette affaire est de peu de conséquence.

    Dans le sens contraire : Cette chose, cette affaire vaut bien la peine d'y penser, la peine qu'on y pense.

    Ironiquement. Cela ne vaut pas la peine d'en parler. Monsieur mon frère aîné, car, Dieu merci, vous l'êtes D'une vingtaine d'ans, à ne vous rien celer ; Et cela ne vaut pas la peine d'en parler. [Molière, L'école des maris]

    Absolument, cela ne vaut pas la peine, n'en vaut pas la peine.

    Fig. Le jeu ne vaut pas la chandelle, voir CHANDELLE, n° 1.

    Rien qui vaille, chose sans mérite ni valeur. Ils [les comédiens] ont un privilége, c'est de ne faire rien qui vaille parce qu'ils sont seuls, de mal jouer les anciennes pièces, et de n'en point donner de nouvelles qui ne soient mauvaises. [Dancourt, Com. des coméd. I, 5]

    Substantivement. Un rien qui vaille, une personne sans mérite, sans valeur. Je vous assure qu'à force de ne trouver que des riens qui vaille en son chemin, on devient rien qui vaille soi-même. [Bussy-rabutin, Lett. t. II, p. 97, dans POUGENS] Cet infant qu'on me baille, N'en déplaise aux baillants, n'est qu'un vrai rien qui vaille. [Corneille Th. Geôl. de soi-même, v, 7]

    N'avoir rien qui vaille, n'avoir rien de bon. Ce marchand n'a rien qui vaille. J'étais lundi passé chez mon libraire Caille Qui dans son magasin n'a souvent rien qui vaille. [Voltaire, la Tactique.]

    Ne faire rien qui vaille, ne faire rien de bon, d'utile. Vous ne feriez jamais rien qui vaille. [Pascal, Les provinciales] En se dépêchant trop, on ne fait rien qui vaille. [Voltaire, Correspondance] Selon lui, les Anglais n'avaient plus rien fait qui vaille, depuis qu'ils avaient renoncé au grec et à l'arabe pour la géométrie et la physique. [D'alembert, Éloges, Alary.]

    Ne valoir pas que, ne pas mériter que. L'occasion ici fort peu vous favorise, Et ce faible bonheur ne vaut pas qu'on le prise. [Corneille, Le menteur]

  • 3Valoir suivi d'un infinitif (tournure excellente, peu usitée aujourd'hui, mais qui mérite de l'être beaucoup). Vous n'y trouveriez rien [dans des vers], à mon avis, qui vaille les désirer. [Malherbe, Lettres, II, 33] Que les combats qu'avait faits Minutius en Ligurie n'étaient que simples rencontres, et encore si légères qu'elles ne valaient pas en parler. [Malherbe, le XXXe livre de Tite Live, ch. 22] Le peu que j'y perdrai ne vaut pas m'en fâcher. [Corneille, La veuve] L'offre n'est pas mauvaise, et vaut bien y penser. [Corneille, Galer. IV, 14] La vie est peu de chose, et le peu qui t'en reste Ne vaut pas l'acheter par un prix si funeste. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste]
  • 4Être d'un certain prix. Cette étoffe vaut cinq francs l'aune. L'honneur qui se vend, si peu qu'on en donne, est toujours payé plus qu'il ne vaut. [Duclos, Oeuv. t. v, p. 78]

    Familièrement. Cette chose vaut de l'argent, elle est d'un prix considérable.

    Fig. Ce petit Coulanges vaut trop d'argent, je garde toutes ses lettres. [Sévigné, 29 janvier 1685]

    Cette chose vaut son pesant d'or, est très bonne dans son genre.

    Cet homme vaut son pesant d'or, il est rempli de bonnes qualités. Je vous dis qu'il [M. de Sévigné] vaut son pesant d'or. [Sévigné, 43]

    Chaque chose vaut son prix, chacun vaut son prix, chaque chose, chaque personne a ses qualités. Quelque rare que soit le mérite des belles, Je pense, Dieu merci, qu'on vaut son prix comme elles. [Molière, Le misanthrope] Je valais dans mon temps mon prix tout comme un autre. [Regnard, Le légataire universel]

    Fig. Savoir ce qu'en vaut l'aune, voir AUNE.

    Fig. et familièrement. Cela ne vaut pas le diable, ne vaut pas un sou, ne vaut pas un clou à soufflet, ne vaut pas le ramasser, cela n'est bon à rien, ne vaut rien. Cela [une comédie de Legrand] ne vaut pas le diable ; mais cela réussira, parce qu'il y a des danses et de petits enfants. [Voltaire, Correspondance]

  • 5Valoir bien que avec le subjonctif, être digne que. La gloire de mon nom vaut bien qu'on la retienne. [Corneille, Don Sanche] Qui d'eux aimait le mieux ; que t'en semble, lecteur ? Cette difficulté vaut bien qu'on la propose. [La Fontaine, Fables] Je vaux bien que de moi l'on fasse plus de cas ; Et je baise les mains à qui ne me veut pas. [Molière, Les femmes savantes]

    Impersonnellement, avec bien et inversion, il est avantageux. Pour lors bien m'en valut. [Régnier, Satires] [Louis XI] Non, je sais que je n'y suis pas [au Plessis-lez-Tours], et bien vous en vaut [à vous, la Balue]. [Fénelon, t. XIX, p. 364]

  • 6Valoir mieux, avoir plus de qualités, en parlant de personnes. La cavalerie carthaginoise valait mieux que la romaine. [Montesquieu, Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence] Il y en a bien peu [Anglais] qui ressemblent à Bolingbroke ; celui-là valait mieux que ses livres ; mais, pour les autres Anglais, leurs livres valent mieux qu'eux. [Voltaire, Correspondance]

    Cet homme ne vaut pas mieux que son frère, ce sont tous deux des gens mauvais. Il [un thaumaturge] avait ajouté les chrétiens aux épicuriens, parce qu'à son égard ils ne valaient pas mieux les uns que les autres. [Fontenelle, Histoire des oracles]

    Être meilleur, être préférable, en parlant de choses. Ma montre vaut mieux que la vôtre. À quelque prix qu'on mette une telle fumée, L'obscurité vaut mieux que tant de renommée. [Corneille, Horace] C'est toujours quelqu'un à qui on peut faire un tour quand on sera de mauvaise humeur, et cela vaut mieux que rien. [Fontenelle, Lett. gal. II, 34] La paix vaut encore mieux que la vérité ; je n'ai guère connu ni l'une ni l'autre en ce monde. [Voltaire, Correspondance]

    Cette chose-là vaut mieux pistole qu'elle ne valait écu, voir PISTOLE.

    Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras, voir TENIR.Impersonnellement. Il vaut mieux, il est plus avantageux, il est préférable. Il vaut mieux qu'il en soit ainsi. Mais, tyran pour tyran, il vaut mieux vivre à Rome. [Corneille, Sertorius] Il leur vaudrait bien mieux, les pauvres animaux [des chevaux], de travailler beaucoup, de manger de même. [Molière, L'avare]

    Avec suppression de il et inversion. Mieux vaut goujat debout qu'empereur enterré. [La Fontaine, Matrone.]

    Autrefois cette inversion de mieux n'était pas obligatoire. Mais il faut le vouloir, et vaut mieux se résoudre, En aspirant au ciel, être frappé de foudre.... [Malherbe, V, 30]

  • 7Ne rien valoir, en parlant des personnes, être méchant, vicieux, dangereux. Tout le monde me prend pour un homme de bien ; Mais la vérité pure est que je ne vaux rien. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur] Mon Dieu ! que les hommes ont de talent pour ne rien valoir ! [Marivaux, La Vie de Marianne, ou les aventures de Madame la comtesse de ***] Chassé de la maison de son père, parce qu'il ne voulait rien valoir. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation]

    Il se dit des choses en un sens analogue. La Puisieux s'en est épanoui la rate [d'une petite méchanceté faite par Mme de Sévigné] ; Mademoiselle n'osait lever les yeux ; et moi, j'avais une mine qui ne valait rien. [Sévigné, 27] Son grand benêt d'amant ne l'aime guère, il trouve Marie bien jolie, bien douce ; ma fille, cela ne vaut rien.... [Sévigné, 144]

    Cette chose ne vaut rien, elle n'a presque aucun mérite, presque aucune valeur. Le cheval qu'il a vendu ne valait rien. Cette comédie ne vaut rien du tout. L'étoffe que j'ai achetée ne vaut rien.

    Cette chose ne vaut rien, se dit aussi d'une chose usée et devenue hors d'usage. Cet habit ne vaut plus rien.

    Cela ne vaut rien, cela est mauvais, nuisible. Le temps humide ne me vaut rien. La raison ne me vaut rien ; car elle m'a ôté tout ce que j'avais d'agréments. [Genlis, Ad. et Th. t. II, p. 170, dans POUGENS]

    Cela ne vaut rien, signifie aussi, cela n'annonce rien de bon, est de mauvais augure. Il s'endort dès qu'il a mangé, cela ne vaut rien.

  • 8Rapporter, donner du profit. Cet emploi vaut tant.

    Tant vaut l'homme, tant vaut la terre, voir TERRE.

  • 9Faire valoir quelqu'un, lui donner crédit, puissance, occasion de paraître à son avantage. Les rois font des hommes comme des pièces de monnaie ; ils les font donc valoir ce qu'ils veulent ; et l'on est forcé de les recevoir selon leur cours, et non pas selon leur véritable prix. [La Rochefoucauld, Prem. pens. 50] Il est moins rare de trouver de l'esprit que des gens qui se servent du leur, ou qui fassent valoir celui des autres, en le mettant à quelque usage. [La Bruyère, II] Là se trouvait dans toute sa perfection l'art... de faire valoir les autres sans prétendre les protéger. [Genlis, Mém. t. II, p. 204]

    Se faire valoir, soutenir sa dignité, ses droits. Vous négligez les droits de votre place, vous ne vous faites point assez valoir.

    Se faire valoir, se montrer à son avantage. Rien ne devrait plus humilier les hommes qui ont mérité de grandes louanges, que le soin qu'ils prennent encore de se faire valoir par de petites choses. [La Rochefoucauld, Maximes et Réflexions morales] Se faire valoir par des choses qui ne dépendent point des autres, mais de soi seul, ou renoncer à se faire valoir : maxime inestimable et d'une ressource infinie dans la pratique. [La Bruyère, II]

    S'attribuer plus qu'on n'a. Je trouve qu'on se faisait peut-être un peu trop valoir dans le siècle passé, quoique avec justice, et qu'on ne se fait peut-être pas assez valoir dans celui-ci. [Voltaire, Correspondance] L'art de se faire valoir et de conduire une intrigue. [Genlis, Parvenus, t. I, p. 65, dans POUGENS]

    Un homme ne vaut que ce qu'il se fait valoir, un homme n'obtient de crédit, etc. qu'autant qu'il saisit les occasions et les moyens de faire ressortir son mérite.

    Se faire valoir de, se donner de l'importance au moyen de. Je me suis fait valoir ici des nouvelles du combat naval [que j'ai apprises par vous]. [Sévigné, 26 mai 1676]

    Terme de chasse. Se faire valoir, se dit d'un animal qui, dans un terrain gras, a imprimé son pied et sa jambe, de manière à le faire juger plus fort qu'il ne l'est en effet.

  • 10Faire valoir une chose, lui donner force, puissance. Faire valoir son droit, ses droits. Jamais Ferdinand n'eut plus de puissance, et ne la fit plus valoir. [Voltaire, Annales de l'Empire depuis Charlemagne]

    Faire valoir une chose, lui donner du prix, la faire paraître meilleure, plus belle. Je me suis engagé de faire valoir la pièce, et l'auteur m'en est venu prier encore ce matin. [Molière, Les précieuses ridicules] Nous lisons la vie de Théodose ; mon fils la fait encore valoir ; car vous savez comme mes enfants savent lire. [Sévigné, 601] Les choses ne valent que ce qu'on les fait valoir. [Fénelon, Dialogues des morts] Quand de bons acteurs les font valoir [les pièces de théâtre]. [Voltaire, Comm. Corn. Rem. Essex, v, 3] En général, l'art de faire valoir une idée consiste à la mettre dans la place où elle doit frapper davantage. [Condillac, Art d'écr. II, 14]

    Terme de peinture. Une figure en fait valoir une autre, lorsque, placée auprès, elle a moins de force, moins de fini, moins de beauté.

    Faire valoir une chose, en relever l'importance, le mérite. Je ne sais point, seigneur, faire valoir les choses. [Corneille, Othon] Et de tant de mortels à toute heure empressés à nous faire valoir leurs soins intéressés.... [Racine, Esther] Un premier esclave qui, espérant d'obtenir sa liberté, accusait sans cesse les autres, pour faire valoir à son maître son zèle et son attachement à ses intérêts. [Fénelon, Télémaque]

    Faire valoir sa marchandise, se dit du marchand qui fait ressortir les qualités de ce qu'il veut vendre.

    Fig. Faire valoir sa marchandise, louer beaucoup ce qu'on a, ce qu'on dit, ce qu'on fait. Si nous trouvions quelque chose de bon pour votre enfant, nous ne manquerions pas de faire valoir notre marchandise. [Sévigné, 527]

    Faire valoir des motifs, en faire ressortir la force. Je sais bien que vous êtes en couche ; je fais valoir cette raison qui est bonne. [Sévigné, 259] Il [d'Hacqueville] fera valoir vos raisons à M. de Pompone. [Sévigné, 29 déc. 1675]

    Faire valoir que, avec l'indicatif, ou faire valoir de, avec l'infinitif. Je lui fais valoir [à Mme de Chaulnes] d'être demeurée pour elle [en Bretagne]. [Sévigné, 22 juill. 1671] Et vous venez nous faire valoir que vous aimez votre frère, et qu'il ne vous reste aucune aigreur contre lui, tandis que sa seule présence vous déplaît et vous irrite ! [Massillon, Carême, Pardon des off.]

    Faire valoir, signifie aussi opposer, objecter. Faire valoir une objection contre quelqu'un. Je n'avais point voulu que la princesse [de Tarente] vînt ici ; je lui avais fait valoir nos dévotions de jeudi.... [Sévigné, 450] Je crois vous avoir fait entendre que depuis longtemps on faisait valoir les minuties [contre Pompone] ; et cela avait formé une disposition qui était toujours fomentée dans la pensée d'en profiter. [Sévigné, 13 déc. 1679]

  • 11Faire valoir une chose, en tirer le profit, l'avantage qu'elle peut rapporter. Pour faire valoir la somme par votre industrie. [Pascal, Les provinciales] Ceux qui sont les plus vigilants et les plus industrieux pour faire valoir leurs biens. [Fénelon, Télémaque] Chacun est obligé, en conscience, de faire valoir ses talents. [Brueys, Muet, II, 3] Il [Charlemagne] fit valoir ses domaines avec sagesse, avec attention, avec économie. [Montesquieu, L'esprit des lois]

    Par extension. Respirer, me promener en long, faire un peu d'exercice, c'est ce qui me fera valoir et profiter tous mes remèdes. [Sévigné, 7 oct. 1687]

    Absolument. Faire valoir, exploiter soi-même sa terre.

    Terme de chasse. On dit que les chiens font valoir le change, quand ils abandonnent la voie de la bête de meute, pour suivre celle du change.

  • 12Tenir lieu de, avoir la signification de. L'as au piquet vaut onze. Une blanche, en musique, vaut deux noires. L'M en chiffres romains vaut mille.

    Faire un acte, remplir une formalité pour valoir ce que de raison, faire un acte, remplir une formalité par pure précaution, et pour servir dans l'occasion comme il sera juste et raisonnable.

    Cela vaut fait, assurez-vous que cela ne manquera pas de se faire. Cela vaut fait, monsieur. [Corneille, Mélite]

    Autant vaut, même sens. Autant vaut que Valère s'en aille. [Goldoni, Bourru bienfais. II, 15]

    Autant vaut, locution elliptique, peu s'en faut. Ismène : Est-il mort ? - Cléanthes : Autant vaut : depuis vingt ans et plus Qu'il a pris son parti, nous ne nous sommes vus. [Regnard, Démocrite] Merlin : On donne ici le bal ! l'affaire est donc finie ? - Lisette : Autant vaut, mon enfant. [Regnard, Le bal] Notre boussole est trouvée, ou autant vaut, nous voilà dans la physique. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation]

    Vaut est quelquefois sous-entendu. Autant faire cela sur-le-champ que de différer.

    Autant vaut traîné que porté, voir PORTÉ.

    Autant vaut être mordu du chien que de la chienne, voir CHIEN.

    PROVERBE

    Un bon averti en vaut deux, voir AVERTI.
  • 13Peser d'un certain poids. Ces considérations, qui valent pour votre cause, valent aussi pour la sienne.
  • 14 vt Procurer, produire, faire obtenir. Ses succès lui ont valu le surnom de Grand. Cette terre lui vaut dix mille francs de rente. La gloire immortelle que lui ont value ses exploits. Les honneurs que mon habit m'a valus. Vous lui faites [à Pauline] un bien extrême de vous amuser à sa petite raison naissante ; cette application à la cultiver lui vaudra beaucoup. [Sévigné, 5 août 1676] J'ai travaillé jusqu'à mes derniers jours ; cela m'a valu des ennemis ; mais aussi cela m'a valu votre amitié ; ainsi je n'ai point à me plaindre. [Voltaire, Correspondance] Oui, je dormais sur un petit volume Qui me vaudra d'être encore étrillé. [Béranger, Gohier.]
  • 15À valoir, terme de commerce et de finance signifiant ce qu'on donne à compte d'une plus forte somme qu'on doit fournir, soit argent, soit marchandise. Je vous envoie vingt balles de café dont vous retirerez le prix à valoir sur ce que je vous dois.

    J'ai reçu telle chose ou telle somme à valoir sur..., je l'ai reçue en déduction de....

  • 16Vaille que vaille, loc. adv. Passablement, tant bien que mal. Il faut me laisser vivre ; après, vaille que vaille, Si j'ai quelque pistole, on me la trouvera. [Hauteroche, Le deuil] On me donnait le soin De fournir la maison de chandelle et de foin ; Mais je n'y perdais rien ; enfin, vaille que vaille, J'aurais sur le marché fort bien fourni la paille. [Racine, Les plaideurs] Enfin, vaille que vaille, L'ennemi se soumet, j'ai gagné la bataille. [Destouches, Le glorieux] Je suis raccommodé, vaille que vaille, avec Mme du Deffant. [D'alembert, Lett. à Voltaire, 18 oct. 1760]
  • 17Tout coup vaille, loc. adv. qui signifie, à de certains jeux, qu'en attendant la décision de ce qui est en contestation, on ne laissera pas de jouer.

    Fig. À tout hasard. Ma foi, tout coup vaille, voyons où la chose ira. [Hauteroche, Le Cocher supposé] Je me divertis toujours, tout coup vaille. [Dancourt, Cur. Compiègne, sc. 2] Allons donc, tout coup vaille, épousons sans amour. [Destouches, Irrésolu, IV, 1]

  • 18Valant, part. présent. Deux maisons valant cent mille francs. Le tout ci-dessus mentionné valant loyalement plus de quatre mille cinq cents livres, et rabaissé à la valeur de mille écus par la discrétion du prêteur. [Molière, L'avare]

    PROVERBE

    Donner et retenir ne vaut, il faut se dessaisir de la propriété d'une chose qu'on donne.

REMARQUE

1. Valoir ne prend point de avec un infinitif. Cependant, avec il vaut mieux, mieux vaut, on peut mettre de : Il me vaudrait bien mieux d'être au diable que d'être à lui. [Molière, Dom Juan, ou le Festin de Pierre] Mieux vaut encor de penser que de lire. [Thomas, Épît. à Mme D.] On dirait aussi sans de : Mieux vaut encore penser que lire.

2. Dans ces phrases : Cette étoffe vaut dix francs ; cet homme sait ce qu'il vaut, on comprend que le régime n'est régime direct qu'en apparence, et qu'il y a une ellipse : Cette étoffe vaut [pour] dix francs ; cet homme sait ce qu'il [pour ce qu'il] vaut.

3. Le participe passé fait difficulté comme coûté pour l'accord. On le traitera de même (voir COÛTER, aux Remarques), et l'on dira : La somme qu'a valu il y a dix ans ce domaine. Mais quand valoir est actif, signifiant procurer, alors il suit la règle des verbes actifs : Les honneurs que lui a valus cette action. L'Académie ne s'explique ni pour l'un ni pour l'autre cas.

4. Quand il s'agit d'exprimer une valeur, on dit valant : Il a une bonne terre valant dix mille écus ; et, dans ce sens, valant est le véritable participe du verbe valoir. Mais, pour exprimer qu'il les a en sa possession, on dit alors : Cet homme a dix mille écus vaillant ; et dans ce cas vaillant est un substantif masculin employé adverbialement.

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