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saisir

vt (sé-zir)
  • 1Prendre avec vigueur, avec effort et tout d'un coup. Saisir quelqu'un par le bras. Mon ordre porte encor de saisir votre épée. [Rotrou, Bélisaire] Je suis une ombre à ton service, Et non pas un corps qu'on saisisse. [Scarron, Virgile travesti] Qu'on le saisisse, Oui, lui-même, Pharnace, allez ; et de ce pas Qu'enfermé dans la tour on ne le quitte pas. [Racine, Mithridate] [Lors de l'enterrement de Henri IV] les gardes saisirent un conseiller qui faisait résistance [le parlement voulait précéder les évêques] ; c'était Paul Scarron, le père du fameux poëte burlesque Paul Scarron, plus célèbre encore par sa femme. [Voltaire, Histoire du parlement de Paris] L'athlète Cléomède entra dans une école destinée à l'éducation de la jeunesse, saisit une colonne qui soutenait le toit et la renversa. [Barthélemy, L'atlas du Voyage du jeune Anacharsis]

    Fig. Je suis homme à saisir les gens par leurs paroles, Et j'ai présentement besoin de cent pistoles. [Molière, L'école des femmes]

  • 2Prendre un objet pour le tenir, pour s'en servir ou pour le porter. Le manche de cet outil est trop gros, on ne peut le saisir. Saisir une marmite par les anses.

    Fig. Saisir le moment, l'occasion favorable, en profiter. Les Romains, saisissant l'occasion de leur ressentiment [des Étoliens] ou plutôt de leur folie, firent alliance avec eux. [Montesquieu, Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence] Je saisis cette occasion pour apprendre à cinq ou six lecteurs qui ne s'en soucient guère, que l'article Messie, imprimé dans le grand dictionnaire encyclopédique.... n'est pas mon ouvrage.... [Voltaire, Mél. litt. à M. de la Harpe.] Pour étouffer les révolutions, il est un premier moment qu'il faut saisir. [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes]

    On dit dans le même sens : saisir un avantage. Je suis vaincu ; Pompée a saisi l'avantage D'une nuit qui laissait peu de place au courage. [Racine, Mithridate]

    Saisir un prétexte, s'en servir, s'en autoriser.

  • 3S'emparer de, occuper en force. Envoyez des soldats à chaque coin des rues ; Saisissez l'Hippodrome avec ses avenues. [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Nous saisissons la porte, et les gardes se rendent. [Corneille, ib. V, 7] Pendant deux nuits il avait fait une incroyable diligence pour faire le tour d'une montagne presque inaccessible dont les alliés avaient saisi presque tous les passages. [Fénelon, Télémaque]
  • 4Unir, agglutiner. De gros sables qui furent saisis et agglutinés par la pâte d'argile. [Buffon, Minéralogie]

    Terme de marine. Lier étroitement deux objets par des cordages ou de toute autre façon.

  • 5 Fig. Embrasser par le regard, s'emparer par le coup d'oeil. La peinture saisit son objet en action, mais ne le présente jamais qu'en repos. [Marmontel, Éléments de littérature] Ses yeux ont d'un regard saisi le monde entier. [Delille, Paradis perdu]
  • 6 Fig. Comprendre, discerner. Le traducteur a mal saisi le sens de son auteur. Ce qu'on doit ne point voir, qu'un récit nous l'expose ; Les yeux en le voyant saisiraient mieux la chose ; Mais il est des objets que l'art judicieux Doit offrir à l'oreille et reculer des yeux. [Boileau, L'art poétique] Comme nous saisissons aisément ce qui est simple et bien ordonné et que nous apercevons sans peine les rapports des parties qui font l'ensemble.... [Dumarsais, Oeuvr. t. V, p. 38] La plupart des jeunes gens, les plus vifs et les moins pensants, qui ne voient que par les yeux du corps, saisissent cependant merveilleusement le ridicule des figures. [Buffon, Disc. nat. anim. Oeuv. t. V, p. 364] Il y a un âge pour bien saisir l'usage du monde. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation] Il [Dieu] est le principe de tout ; il est impassible, invisible, incorruptible, il n'y a que l'entendement qui le saisisse. [Diderot, Opinions des anciens philosophes] On entend par visible ce qui est fait pour être aperçu par l'oeil, et M. Hutcheson entend par beau ce qui est fait pour être saisi par le sens interne du beau. [Diderot, Oeuv. t. II, p. 413, dans POUGENS] Il n'a pas saisi ce principe si bien développé par Locke, Hobbes, Condillac, que nous recevons nos idées par nos sensations ; mais il l'entrevoit. [Champagne, Instit. Mém. sc. mor. et pol. t. III, p. 88]
  • 7Il se dit d'une attaque vive de maladie, d'une impression sur les sens. Un parfum saisit agréablement notre odorat quand nous y pensons le moins. [Fénelon, t. III, p. 282] À ces dernières paroles [d'une harangue au roi] la voix lui manqua [à l'avocat général Servin] ; une apoplexie le saisit, et on l'emporta expirant. [Voltaire, Histoire du parlement de Paris] Le soir la fièvre me saisit ; mon domestique se sentit frappé en même temps que moi. [Marmontel, Mémoires d'un père pour servir à l'instruction de ses enfants]

    Fig. Un vertige soudain saisit les éléments. [Delavigne, Le paria]

    Il se dit de l'impression soudaine du froid. Le grand air l'aura saisi. [Beaumarchais, Le barbier de Séville, ou La précaution inutile]

  • 8 Fig. Mettre sous l'impression vive et soudaine de quelque sentiment, de quelque passion, de quelque vue. L'impérieuse aigreur de l'âpre jalousie, Dont en secret dès lors mon âme fut saisie. [Corneille, Sertorius] Fuyez donc les fureurs qui saisissent mon âme. [Corneille, Nicomède] Considérez la pieuse reine devant les autels ; voyez comme elle est saisie de la présence de Dieu. [Bossuet, Oraisons funèbres] Les coeurs sont saisis d'une joie soudaine par la grâce inespérée d'un beau jour d'hiver. [Bossuet, ib.] Une sainte frayeur des jugements de Dieu le saisissait ; on voyait sa foi dans ses yeux et dans ses paroles. [Fléchier, Oraisons funèbres] C'est lui ! d'horreur encor tous mes sens sont saisis. [Racine, Athalie] Que malgré la pitié dont je me sens saisir, Dans le sang d'un enfant je me baigne à loisir ? [Racine, Andromaque] Va voir si la douleur ne l'a point trop saisie. [Racine, Bérénice] L'épouvante saisit les coeurs. [Fénelon, Télémaque] Veut-il [Homère] peindre deux hommes que personne ne puisse méconnaître et qui saisissent le spectateur, il vous met devant les yeux la folie incorrigible de Pâris et la colère implacable d'Achille. [Fénelon, t. XXI, p. 208] Il y a de certaines idées d'uniformité qui saisissent quelquefois les grands esprits. [Montesquieu, L'esprit des lois] Cette formule criminelle digne tout au plus de Grégoire VII ou de Boniface VIII, et dont la seule lecture nous saisit d'indignation : Nous réhabilitons Henri dans sa royauté [Henri IV]. [Voltaire, Frag.sur l'hist. XVI] Tout ce qui saisit l'imagination des hommes ne leur permet pas une justice si exacte. [Duclos, Consid. moeurs, 14] Je n'avais point encore été saisie par une affection qui pût me dominer. [Staël, Corinne, ou l'Italie]

    Absolument. Voilà ce qui surprend, frappe, saisit, attache. [Boileau, L'art poétique] Se précipitant entre les hommes et les chevaux, ils [les montagnards écossais, à Preston-Pans] tuent les chevaux à coups de poignards, et attaquent les hommes le sabre à la main ; tout ce qui est nouveau et inattendu saisit toujours. [Voltaire, Précis du siècle de Louis XV]

  • 9Être saisi, être frappé subitement de douleur ou de plaisir ou d'étonnement. Je suis encore tout saisi de cette nouvelle. Elle a été si excessivement saisie de ce procédé, qu'elle en est devenue une image de Benoît. [Sévigné, 400] Mme de Chaulnes fut saisie du refus de ma mère ; elle se tut, elle rougit, elle s'appuya. [Sévigné Ch. dans SÉV. 25 juill. 1689]
  • 10Faire une saisie, retenir par voie de saisie. L'huissier a saisi son mobilier. Ce fut alors que ce roi, le vainqueur et le père de ses sujets [Henri IV], ordonna qu'on ne saisirait plus, sous quelque prétexte que ce fût, les bestiaux des laboureurs et les instruments de labourage. [Voltaire, Pol. lég. Diatribe à l'aut. des Éph.] M. l'abbé Terrai me saisit tout le bien libre que j'avais en rescriptions, les seuls effets dont je pusse disposer. [Voltaire, Correspondance] Aucun livre ne peut entrer en France sans être saisi par les commis, qui se font depuis quelque temps une assez jolie bibliothèque. [Voltaire, Correspondance] J'apprends par une lettre de mon père que ma malle a été saisie et confisquée aux Rousses, bureau de France sur les frontières de Suisse. [Rousseau, Les confessions] On s'était attendu, en saisissant les biens des jésuites dans cette province [Buenos-Ayres], de trouver dans leurs maisons des sommes considérables ; on en a néanmoins trouvé fort peu. [Bougainville, Voir t. I, p. 201] J'ai de la fraude en pacotille Qu'à la barrière on saisirait. [Béranger, Portrait.]

    Absolument. Permis de saisir. Pour vendre, chez le vieux Remi On saisissait avant l'aurore. [Béranger, Jacques.]

  • 11Mettre en possession de. Vous régnez en ma place, et les dieux l'ont souffert ; Je dis plus, ils vous ont saisi de ma couronne. [Corneille, Oedipe] Et ceux qu'aura ma mort saisis de mon emploi, S'instruiront contre vous, comme vous contre moi. [Corneille, Sertorius]

    Terme de jurisprudence. Le mort saisit le vif, l'héritier est immédiatement investi des biens du défunt.

  • 12Saisir un tribunal d'une affaire, la porter devant lui. Ils [les jésuites] disaient pour se défendre, que l'Eglise universelle était saisie de leur cause par l'appel qu'ils avaient fait au futur concile. [D'alembert, Destr. des jés. Oeuv. t. V, p. 77, dans POUGENS]
  • 13Se saisir, vpron S'empoigner l'un l'autre. Nous nous saisîmes l'un l'autre ; nous nous serrâmes à perdre la respiration. [Fénelon, Télémaque]
  • 14S'emparer, se rendre maître d'une personne ou d'une chose. Il se saisit du port, il se saisit des portes, Met des gardes partout. [Corneille, La mort de Pompée] Vous vous saisissez par vos mains De plus que votre récompense. [Corneille, Agésilas] César m'a commandé de me saisir de vous. [Rotrou, Bélisaire] À dix heures du soir, ils [des partisans ennemis qui s'étaient avancés jusque près de Versailles] aperçurent sur le pont de Sèvres un carrosse à six chevaux, aux armes du roi [Louis XIV] et des gens avec sa livrée ; c'était M. de Beringhen, premier écuyer, dont ils se saisirent, croyant que c'était M. le Dauphin. [Saint-foix, Ess. Paris, Oeuv. t. III, p. 72, dans POUGENS] L'ordre fut donné de se saisir d'Avignon et de tout le comtat Venaissin. [Voltaire, Précis du siècle de Louis XV]

    Fig. Et vous vous saisissez d'un prétexte frivole Pour vous autoriser à manquer de parole. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur]

  • 15 Fig. Il se dit dans un sens analogue avec un nom de chose pour sujet. Tu n'as fait, lui dit-il [à Dieu], que détourner ta face, Et le trouble aussitôt s'est saisi de mon coeur. [Corneille, L'imitation de Jésus-Christ] Qui ne voit que l'esprit de séduction s'est saisi de leur coeur ? [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Afin que la séduction se saisisse à la fois des sens, de l'esprit et de l'âme. [Marmontel, Oeuv. t. VIII, p. 275]
  • 16Évoquer devant soi une affaire. On se divisa, et le parlement d'Angleterre se saisit de la contestation. [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes]
  • 17S'émouvoir, être saisi. Cet homme se saisit au moindre contre-temps qui lui arrive. Ne t'étonne donc point de cette jalousie Dont à ce froid abord mon âme s'est saisie. [Corneille, Sophonisbe] Le beau vous touche, et ne seriez d'humeur à vous saisir pour une baliverne. [Racine, Épig. sur la Judith de Boyer.]

+

SAISIR.
1Ajoutez :

Saisir quelqu'un dans ses biens, exercer une saisie sur ses biens. Comme les tribunaux ne pourraient pas faire saisir le préfet par corps ni dans ses biens pour la non-exécution du contrat. Corresp. de Napoléon 1er, t. XIX, n° 15880]

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