de

prépos. (de)
  • 1Suivi de l'article le, de se contracte en du avant un nom qui commence par une consonne ou une h aspirée ; suivi de l'article les, il se contracte en des ; devant une voyelle ou une h muette, l'e de de s'élide. Les sens de la préposition de, comme ceux de la préposition à, sont très nombreux et passent par des nuances que l'on saisit mieux en la considérant dans ses constructions avec les espèces de mots qu'en essayant de les rendre par des périphrases. En conséquence ces constructions seront rangées en dix classes ainsi qu'il suit : A. De entre un substantif et un autre mot ; B. de entre un adjectif et un autre mot ; C. de construit avec un pronom personnel ; D. de construit avec un pronom interrogatif ; de construit avec le pronom démonstratif celui ; E. de entre un nom de nombre et un autre mot ; F. de entre un verbe et un verbe ou un autre mot ; G. de avec un adverbe ; H. de avec une préposition ; I. de construit avec une conjonction ; J. conjonction composée avec de.

    A. De entre un substantif et un autre substantif. 1° Il marque un rapport d'appartenance. Le livre de Pierre. Les fables de la Fontaine. Les malheurs de la guerre. J'ai suivi en cela l'avis de tous les jurisconsultes et de la plupart des casuistes. Pour vous voir renoncer par l'hymen d'une reine à la part qu'ils avaient à la grandeur romaine. [Corneille, Nicomède] Lui même en diverses formes Range les troncs coupés des chênes et des ormes. [Rotrou, Hercules mourant] Jusqu'ici de l'amour dédaignant la puissance, Je n'ai connu d'ardeur que celle des combats. [Rotrou, Bélisaire] Le cardinal Charles de Lorraine, archevêque de Reims.... grand génie, grand homme d'État, d'une vive et agréable éloquence, savant même pour un homme de sa qualité et de ses emplois. [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes] Il paraît que Quintilien est né la seconde année de l'empereur Claude, qui est la quarante-deuxième de Jésus-Christ. [Rollin, Histoire ancienne] Ô muses, accourez, solitaires divines, Amantes des ruisseaux. [Chénier, Élégies]

    Il exprime le sentiment qu'on a pour quelqu'un ou quelque chose. Antoine sur sa tête attira notre haine En se déshonorant par l'amour d'une reine. [Corneille, Cinna, ou La clémence d'Auguste] L'horreur que tu fais voir d'un mari vertueux.... [Corneille, Horace] Quelle reconnaissance, ingrate, tu me rends Des bienfaits.... [Corneille, Héraclius, empereur d'Orient] Grâce à ce conquérant, à ce preneur de ville ! Grâce.... - De quoi, madame ? est-ce d'avoir conquis Trois sceptres.... [Corneille, Nicomède] Le respect des autels, la présence des dieux. [Corneille, Théodore et Héraclius] C'est elle [la foi] qui a produit dans les patriarches l'amour de Dieu, la confiance en ses bontés, le zèle de sa religion, l'espérance de ses promesses. [Fléchier, Panég. II, 473] Sans respect des aïeux dont elle est descendue. [Boileau, Satires] Du zèle de ma loi que sert de se parer ? [Racine, Athalie] Est-ce que de Baal le zèle vous transporte ? [Racine, ib. III, 3] À l'amour de Pharnace on impute mes pleurs. [Racine, Mithridate]

    Il exprime un rapport d'origine, de dérivation. Le vent du nord. Les peuples du midi. Les productions des colonies.

    Il marque l'objet, le but, la fin, la nature, la qualité ; dans ce sens il forme avec le terme qui le suit une expression adjective. Acte de vente. Un homme de génie. Un homme de rien. Il est certain que les oeuvres de miséricorde ne sont pas seulement de conseil, mais de précepte dans le christianisme. [Bourdaloue, Exhort. char. env. les nouv. cath. t. I, p. 134] Des conseillers d'iniquité, des ministres de la volupté. [Massillon, Car. Dang. des prosp. temp.] Pour aller consulter l'homme de Dieu. [Massillon, ib. Inconstance.] Tout pécheur est donc un enfant de mort et de colère. [Massillon, ib. Empl. du temps.] Hélas ! ils sont des enfants de lumière pour les affaires du siècle. [Massillon, ib. Pet. nombre des élus.] Dieu à qui il n'est pas plus difficile de faire naître l'enfant de la promesse d'une vieillesse stérile que d'un âge plus fécond. [Massillon, ib. Fausse confiance.] Le crime, cet enfant de ténèbres, ne craint pas la lumière. [Massillon, ib. Resp. hum.] Lorsque nous vous exhortons à fuir les spectacles lubriques, les assemblées de péché. [Massillon, ib. Fausse conf.] La malignité de l'ennemi, dit saint Augustin, dresse depuis longtemps deux piéges dangereux à la faiblesse des hommes : un piége de séduction et un piége de terreur. [Massillon, ib. Resp. hum.] Des entretiens dangereux et des commerces de passion remplissent le reste de ses journées. [Massillon, ib. Mauv. riche.] Ce n'est pas ici une chaire de contention, c'est le lieu de la vérité. [Massillon, ib. Par. de Dieu.] Plus Jésus-Christ diminue dans votre coeur, plus l'homme de péché augmente et se fortifie. [Massillon, ib. Commun.] Cette eau de jalousie dont il est parlé dans le Lévitique. [Massillon, ib. Commun. 2] Dans ces maisons de retraite, de prière, d'austérité, où il semble que le Seigneur devrait trouver cette foi qui n'est plus dans le reste de la terre. [Massillon, ib. Vocation.] Cet homme de péché que nous portons dans notre fonds. [Massillon, Panég. St Bernard.] Ne faisons pas de la profession sainte de la piété une vie d'humeur et de caprice. [Massillon, Car. Injust. du monde.] Cette voix de vertu qui se fait entendre dans l'abîme où l'âme est ensevelie. [Massillon, ib. Lazare.] Après bien des années de vertu. [Massillon, ib.] Qu'il est difficile de regarder comme un exil une terre de délices ! [Massillon, ib. Dang. des prosp. temp.] Vous placez dans le sanctuaire des vases de rebut et d'ignominie. [Massillon, ib.] On ne passe pas en un instant d'un état de justice à un état de péché. [Massillon, ib. Inconst.] L'éducation chrétienne est une éducation de retraite, de pudeur, de modestie, de haine du monde. [Massillon, ib. Petit nombre des élus.] Une vie entière de prière et de vigilance. [Massillon, ib. Tiédeur.]

    Il exprime l'instrument. Un coup de fusil. Un signe de tête. Un serrement de main.

    Il exprime la destination. Une salle de spectacle. Un habit de ville. Couverture de mulet. Couvertures de chevaux. Des souliers de chasse.

    La profession. Un homme de guerre. Une femme de ménage. Un garçon de magasin. Un marchand de vin. Un marchand de vins fins. Un marchand de paille, de foin. Un marchand de plumes à écrire. Un marchand de plumes pour faire des lits.

    La matière. Une table de marbre. Une tabatière d'or. Pâte d'amandes. Du sucre de pomme. Une marmelade de pommes. Sirop de groseille. De la fécule de pomme de terre. Un ragoût de pommes de terre.

    Le contenu. Une pièce de vin. Une tasse de lait. Un baril d'olives. Une assiette de poires. Une pension de femmes.

    La durée Une guerre de vingt ans. Un travail de dix années.

    Il exprime la date. Un lièvre de trois jours [un lièvre tué depuis trois jours]. Les démons chassés, les aveugles nés guéris, les morts de quatre jours ressuscités. [Bourdaloue, Myst. Résurr. de J.-C. t. I, p. 320]

    La dimension. Un voile de deux aunes. Un homme de six pieds.

    La valeur. Une pièce de cent sous. Une maison de cent mille francs.

    La quantité. Une armée de cent mille hommes. Une population de quinze cents âmes.

  • 2De sert à unir le nom commun d'une chose avec le mot particulier qui la distingue de toutes les autres choses semblables. La ville de Paris. Le mois de mai. Le mot de langue. Ils ont exclu l'unité de la signification du mot de nombre. [Pascal, Pensées] On entend ce que l'on conçoit par le terme de temps ; c'est ce mouvement supposé. [Pascal, ib. I, 2] Il ne s'ensuivra pas de là que la chose qu'on entend naturellement par le mot de temps soit en effet le mouvement d'une chose créée. [Pascal, ib.] Par suite de cette définition il y aura deux choses qu'on appellera du nom de temps. [Pascal, ib.] Cet usage du mot de sceptre se trouve à toutes les pages de l'Écriture. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Tous les termes de la prophétie sont clairs ; il n'y a que le mot de sceptre que l'usage de notre langue nous pourrait faire prendre pour la seule royauté. [Bossuet, ib.]

    On disait de même dans le XVIIe siècle : l'année de 1691, et ainsi de suite. Aujourd'hui on supprime de préférence le de : l'année 1862.

  • 3Construction de de entre un substantif ou un adjectif pris substantivement et un autre substantif, laquelle est analogue à celle de : la ville de Paris, et dans laquelle le nom construit avec de ne fait que déterminer le nom précédent comme Paris détermine ville : un fripon d'enfant, c'est un fripon qui est un enfant ; mon bourreau de maître, c'est mon bourreau qui est mon maître, et ainsi de suite. Réglez-vous, regardez l'honnête homme de père Que vous avez du ciel ! comme on le considère ! [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] Ô traître ! ô bourreau d'homme. [Molière, Le bourgeois gentilhomme] Eh bien, ne voilà pas mon enragé de maître. [Molière, Le bourgeois gentilhomme] Et ce jaloux maudit, ce traître de Sicilien, me fermera toujours tout accès auprès d'elle. [Molière, Le sicilien, ou L'amour peintre] Vous devez rendre grâces au ciel de l'honnête homme de père qu'il vous a donné. [Molière, L'avare] Votre coquine de Toinette est devenue plus insolente que jamais. [Molière, Le malade imaginaire] Un saint homme de chat bien fourré, gros et gras. [La Fontaine, Fables] Mais un fripon d'enfant (cet âge est sans pitié) Prit sa fronde, et du coup tua plus d'à moitié La volatile malheureuse. [La Fontaine, ib. IX, 2] Il tardait à la dame D'y rencontrer son perfide d'époux. [La Fontaine, Richard.] Sa chienne de face. [Molière, L'école des femmes] Si mon traître d'époux par bonheur était mort. [Regnard, Démocrite] Quel chien de train ! quelle chienne de vie ! [Rousseau J.-b. IV, Épig. 5] Un diable de neveu Me fait par ses écarts mourir a petit feu. [Piron, La métromanie, ou Le poète] J'ai une drôle d'idée dans la tête. [Voltaire, Corresp. génér. 26 janv. 1740] Mes bourreaux de symphonistes raclaient à percer le tympan d'un quinze-vingts. [Rousseau, Les confessions] Tiens ! va dire à ton sot de précepteur qu'il te donne d'autres thèmes. [Brueys, Grondeur, I, 8] Depuis, dis-je, qu'il a perdu, par une querelle de jeu, son libertin de fils aîné, tu sais comment tout a changé pour nous. [Beaumarchais, La mère coupable, ou L'autre Tartuffe]
  • 4De, placé entre les titres et les noms propres de famille, s'emploie comme signe de noblesse. Madame de Sévigné. Le duc de la Rochefoucauld.De, qualification nobiliaire pris substantivement. Il a ajouté un de à son nom. Il a pris le de. Le de s'usurpait aussi par qui voulait depuis longtemps. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon] Il n'est vilain qui faute de mieux ne mette au moins un de à son nom. [Courier, Lettres de France et d'Italie] C'est sa nouvelle fantaisie de mettre un de avec son nom, depuis qu'il est éligible et maire de la commune. [Courier, 2e lettre particulière] Eh quoi ! j'apprends que l'on critique Le de qui précède mon nom. [Béranger, Vilain.]
  • 5De placé entre un mot et ce même mot répété exprime l'excellence ; usage qui, provenant de la langue hébraïque, ne s'étend guère au delà des locutions bibliques ou de locutions formées sur ce modèle. Le saint des saints, le lieu le plus saint dans le temple de Jérusalem. Le cantique des cantiques, titre d'un cantique qui est dans la Bible. L'être des êtres, Dieu. Vanité des vanités, et tout est vanité ; c'est la seule parole qui me reste ; c'est la seule réflexion que me permet, dans un accident si étrange, une si juste et si sensible douleur. [Bossuet, Oraisons funèbres] Humble, et du saint des saints respectant les mystères, J'héritai l'innocence et le Dieu de mes pères. [Lamartine, Méditations poétiques]
  • 6De entre un substantif et un verbe à l'infinitif, ce qui est une espèce de substantif. L'art de bien dire. La faculté de prévoir. Aura-t-il la force d'achever un tel travail ?

    Entre un substantif et quelques mots considérés habituellement comme des adverbes. La journée de demain.

    Entre un substantif et une préposition. Le pays d'au delà la Loire. Notre esprit la reçoit [la foi] à son premier réveil, Comme les dons d'en haut, la vie et le soleil. [Lamartine, Méditations poétiques]

  • 6De pris partitivement ; ce qui d'ailleurs, au fond, n'est encore que le cas de de entre un substantif et un autre substantif, puisque, dans la construction partitive, un substantif est sous-entendu. Des hommes m'ont dit, c'est-à-dire un certain nombre d'hommes. De bons livres, c'est-à-dire un certain nombre de bons livres. Nous ne pouvions jeter les yeux sur les deux rivages sans apercevoir des villes opulentes, des maisons de campagne agréablement situées, des terres qui se couvraient tous les ans d'une moisson dorée, des prairies pleines de troupeaux. [Fénelon, Télémaque] La corruption qui tous les jours peut produire de nouveaux fruits de mort. [Massillon, Car. Fausse confiance] Là, Vénus, me dictant de faciles chansons, M'a nommé son poëte entre ses nourrissons. [Chénier, Élégies]

    De pris partitivement devant un nom singulier : je n'ai point d'argent ; il n'a pas eu de contentement ; je n'ai jamais vu de ville plus jolie ; en ce cas le substantif est un nom qui admet la division, ou qui, ne l'admettant pas de sa nature, est considéré comme une sorte de nom collectif divisible : je n'ai point portion d'argent : il n'a pas eu portion de contentement ; je n'ai jamais vu (ville) plus jolie (dans le genre) de ville. Et quoi ? dit le père, que pourrait-il y avoir de manque après que tant d'habiles gens y ont passé ? [Pascal, Les provinciales] David ne donna jamais de plus beau combat. [Bossuet, Oraisons funèbres] Vous ne faites rien de cela dans la vie que vous menez. [Bourdaloue, Instr. prudence du salut, exhort. t. II, p. 405]

    De se prend partitivement aussi devant un nom de nombre. Nous voyons que les premiers hommes, lorsque le monde plus innocent était encore dans son enfance, remplissaient des neuf cents ans par leur vie. [Bossuet, Oraisons funèbres] Voit-on fleurir chez eux des quatre facultés ? [Boileau, Satires] Je n'aime point ces rois qui ont des trois cents femmes. [Voltaire, Dialogue de Pégase et du vieillard] Je suis un paresseux, mon cher philosophe ; je crois que c'est une mauvaise qualité attachée au peu de santé que j'ai ; je passe des six mois sans écrire à mes amis. [Voltaire, Correspondance]

    De pris partitivement dans une phrase négative avec que, construction dont le sens est pas autre. Nous n'avons point de roi que César. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle]

    De pris partitivement devant certain. Nous bûmes de certain vin. De certains hommes vinrent à nous. Ceux [les principes] de la volonté sont de certains désirs naturels et communs à tous les hommes, comme le désir d'être heureux. [Pascal, Pensées] Et cela pourrait expliquer de certaines bizarreries. [Vauvenargues. Vivac.]

    Aujourd'hui on supprime souvent le de devant certain.

    De employé partitivement devant aucuns, aucunes dans le XVIIe siècle et signifiant quelques-uns, de certaines personnes. Il y en a d'aucunes qui prennent des maris seulement pour se tirer de la contrainte de leurs parents. [Molière, Le malade imaginaire] Cette tournure n'est plus usitée.

    De, dans une construction où au fond il est explétif, devant des adjectifs ou des participes pris partitivement d'après l'analyse grammaticale. Il y eut cent hommes de tués. Est-il quelqu'un d'assez osé ? Je n'y vois rien d'étonnant. Sa conduite n'a rien de généreux. Payez ; sinon, rien de fait [rien qui soit fait, arrêté, conclu]. Ces phrases se résolvent en : de tués, il y eut cent hommes ; d'assez osé, d'homme assez osé, est-il quelqu'un ? etc. toutes constructions qui grammaticalement sont partitives. Sans doute ils n'ont aucun dessein d'arrêté. [Pascal, Les provinciales] Est-il rien de plus noir que ta lâche action ? [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Mais ce qui me paraît encore de plus honorable à la vertu, c'est que.... [Massillon, Car. Resp. hum.] Il est vrai qu'il n'y en avait eu que trois mille cinq cents de vendus en quatre ou cinq jours. [D'alembert, Lett. à Volt. 22 sept. 1767]

    Des grammairiens modernes ont prétendu qu'il n'était pas correct de dire : il y a eu cent hommes de tués, et que le de devait être supprimé. La question avait été agitée déjà du temps de Vaugelas qui déclare que le de est appuyé par de bons auteurs. Aujourd'hui l'usage l'a consacré, usage qui d'ailleurs n'a rien d'inexplicable grammaticalement. Il n'y a rien qui paraisse de plus insensé à ceux qui ne sont pas éclairés d'en haut. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] On remarquera cette tournure : Bossuet ayant à construire rien de plus insensé avec paraître, a mis le verbe au milieu ; construction qui peut sembler insolite, mais qui est bonne et à imiter.

    Il n'y a rien de tel que l'adversité pour mûrir un homme. On dit aussi sans le de : il n'y a rien tel que....

    De se construit de même partitivement et explétivement, avec les mots mieux, pis, plus, moins. Vous n'aurez rien de plus. Quoi de pis que de se déshonorer ? Étranger que j'étais, je n'avais rien de mieux à faire que d'étudier cette foule de gens qui y abordaient sans cesse. [Montesquieu, Lettres persanes]

  • 8De pris absolument devant un substantif, exprime la manière, la disposition, l'état, la situation. De gaieté de coeur. De colère il rompit l'entretien. De peur d'un plus grand mal il céda. De côté et d'autre. Du côté des ennemis. Je les suivis de rage et m'y rangeai comme eux. [Corneille, Sertorius] De bonheur pour ce loup qui ne pouvait crier, Près de là passe une cigogne. [La Fontaine, Fables] De bonheur pour elle ces gens partirent tout aussitôt. [La Fontaine, Psyché, II, p. 118] Que ne l'émondait-on sans prendre la cognée ? De son tempérament il eût encor vécu. [La Fontaine, Fables] Mille gens le sont bien, sans vous faire bravade, Qui de mine, de coeur, de biens et de maison Ne feraient avec vous nulle comparaison. [Molière, L'école des femmes] Elles étaient, de leur fond et par leurs penchants, douces, patientes, équitables, droites, régulières. [Bourdaloue, 2e dim. après l'Épiph. Dominic. t. I, p. 104] Soit d'imprudence, soit de générosité, la suivante crie du milieu des flots : Sauvez-moi, je suis la mère de l'empereur. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque] De lassitude, Messaline se jette dans un de ces tombereaux qui transportent les immondices des jardins. [Diderot, ib.] Lorsque Vénus, du haut des célestes lambris, Sans armes, sans carquois vint m'amener son fils. [Chénier, Élégies]

    En cet emploi, de signifie parfois : en fait de. N'avoir du pouvoir que l'apparence. Vivre avec des hommes qui n'ont presque de l'homme que la figure. [Bourdaloue, Exhort. char. env. un sémin. t. I, p. 157]

    D'honneur, d'homme d'honneur, sorte d'affirmation interjective signifiant sur mon honneur, sur la parole d'un homme d'honneur. Bon ! voilà l'autre encor, digne maître D'un semblable valet ! ô les menteurs hardis ! - D'homme d'honneur, il est ainsi que je le dis. [Molière, Le dépit amoureux]

    De exprimant qu'il est question, qu'il est traité d'une matière. De la chasse. De la tragédie grecque. Des peintres italiens du XVIe siècle. Il y a de sous-entendu : livre, chapitre qui traite de la chasse, etc.

    Pendant. De nuit. De jour, la chouette se cache dans les trous, et de nuit elle va chercher sa pâture. Ils ne me mettront d'aujourd'hui en colère. [Sévigné, 420] Sans que de tout le jour je puisse voir Titus. [Racine, Bérénice] Ce chasseur perce donc un gros de courtisans, Plein de zèle, échauffé, s'il le fut de sa vie. [La Fontaine, Fables] Il [Josèphe] avoue qu'il ne put jamais la bien prononcer [la langue grecque], parce qu'il ne l'avait pas apprise de jeunesse, les Juifs estimant peu l'étude des langues. [Rollin, Histoire ancienne] Et je suis plus heureux dans ma captivité Que je ne le fus de ma vie Dans le triste bonheur dont j'étais enchanté. [Rousseau J.-b. Cantate, Triomphe de l'amour.] Heureux si, de son temps, pour cent bonnes raisons, La Macédoine eût eu des Petites-Maisons. [Boileau, Satires] Ne t'ai-je pas trouvé de nuit tuant un mouton ? [Bruyeis, Avoc. Pat. I, 8]

    À partir de. Du moment qu'il l'a vue, Les troubles ont cessé, sa joie est revenue. [Corneille, Sophonisbe] Je n'avais ni dormi, ni mangé de vingt-quatre heures. [Sévigné, 219] Je suis ici de jeudi. [Sévigné, 287] Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'ils méditent ce dessein. [Pascal, Les provinciales] De ce jour tu verras Thyeste dans mes chaînes. [Créb. Atrée, I, 3]De, construit de cette façon, indique le changement d'état, de condition : de commis il devint directeur. Ordre lui vient d'aller au fond de la Norvége, Prendre le soin d'une maison En tout temps couverte de neige ; Et d'Indou qu'il était on vous le fait Lapon. [La Fontaine, Fables] Ils forgeront de leurs épées des socs de charrue et de leurs lances des faux. [Sacy, Bible, Isaïe, II, 4] Et que le sort burlesque, en ce siècle de fer, D'un pédant, quand il veut, sait faire un duc et pair. [Boileau, Satires]

    Cette construction s'emploie aussi avec les adjectifs. De pauvre il devint riche. De chrétien qu'on était, on devient peu à peu tout mondain et presque païen. [Bourdaloue, Sur la fausse consc. 1er avent, p. 160]

    De.... en.... exprime que l'on va d'un lieu, d'un objet en un autre. Errer, un livre en main, de bocage en bocage. [Chénier, Élégies]

    De.... à.... exprime, au physique ou figurément, l'intervalle, le passage d'une chose à un autre. De l'Elbe à la mer Baltique ou jusqu'à la mer Baltique. De la créature nous devons nous élever au créateur. [Bourdaloue, Respect hum. 2e avent, p. 414] Du crime au repentir un long chemin nous mène, Du repentir au crime un moment nous entraîne. [Colard. Ép. d'Héloïse à Ab.]

    Ils étaient de trente à quarante, leur nombre était entre trente et quarante. Je serai chez moi de cinq heures à SIX, entre cinq heures et six heures.

    De.... à.... D'homme à homme, c'est-à-dire entre deux hommes, quand il s'agit de deux hommes. D'homme à homme, cela peut se dire et se faire.

    De vous à moi, c'est-à-dire entre vous et moi, et de manière que ce qui se passe entre vous et moi ne soit pas répété. Ceci est de vous à moi ; vous n'en parlerez pas.

    De.... en.... De point en point, c'est-à-dire d'un point jusqu'à l'autre, tout à fait, complétement. Il a executé ses ordres de point en point. De bout en bout, c'est-à-dire d'un bout jusqu'à l'autre. De jour en jour, c'est-à-dire un jour après l'autre, chaque jour, incessamment. Le danger devient plus grand de jour en jour.

    B. 9° De entre un adjectif et un substantif ou un pronom personnel. Digne d'estime. Avide de gloire. Altéré de sang. Je suis mécontent de moi. Faible d'esprit et de corps. Allons, unis d'esprit, sans commerce du corps, Achever notre hymen dans l'empire des morts. [Rotrou, Antigone] Elles sont vides de sentiments, qui n'ont régné que depuis leur temps. [La Bruyère, 1] Combien était ennemie la pieuse reine de ces regards dédaigneux ! [Bossuet, Oraisons funèbres] Leur patience m'étonne, et d'autant plus qu'elle ne peut m'être suspecte ni de timidité ni d'impuissance. [Pascal, Les provinciales] Je laisse mon esprit, libre d'inquiétude, D'un facile bonheur faisant sa seule étude. [La Mart. Médit. I, 20]

    De se construit avec le superlatif Le meilleur des hommes. Un poëte à la cour fut jadis à la mode ; Mais des fous aujourd'hui c'est le plus incommode. [Boileau, Satires] Elle tomba premièrement sur une pointe de rocher, et puis sur une autre, de roc en roc ; chacun d'eux emporta sa pièce ; de manière qu'elle arriva le plus joliment du monde au royaume de Proserpine. [La Fontaine, Psyché, II, p. 152]

    De entre un adjectif et un verbe. Désireux de voir. Las de perdre en rimant et sa peine et son bien. [Boileau, Satires] Il était aisé à la reine de faire sentir une grandeur qui lui était naturelle. [Bossuet, Oraisons funèbres]

    De entre un adjectif et un infinitif, avec le sens de à cause que, vu que. Oh ! trop heureux d'avoir une si belle femme ! Malheureux bien plutôt de l'avoir, cette infâme ! [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Mon révérend père, lui dis-je, que le monde est heureux de vous avoir pour maîtres ! [Pascal, Les provinciales] Ils ne sont pas adroits d'avoir ainsi averti tout le monde de leur intention. [Pascal, ib. 19] Ils sont admirables de vouloir prendre le parlement pour dupe. [Pascal, ib.] Mais ne suis-je pas bien fou de vouloir raisonner... ? [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Sottes de ne pas voir que le plus grand des soins.... [La Fontaine, Fables]

    De ou que de entre un adjectif construit avec si et un verbe, et signifiant assez.... pour.... Un agneau se désaltérait Dans le courant.... Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? [La Fontaine, Fables] Je n'aurais pas été si hardi que d'entreprendre.... [Voiture, Lettres]

    C. 10° De construit avec un pronom personnel. On n'agit pas toujours de soi-même. Il est venu de lui-même s'excuser. Choisissez de vous-même et je ferme les yeux. [Corneille, Othon] Je ne fais rien de moi-même. [Sacy, Bible, Évang. St. Jean, VIII, 28] Il a fait de lui-même ce que vous auriez tôt ou tard exigé. [Diderot, Le père de famille]

    De soi, par sa propre vertu, naturellement. De soi, rien n'est permanent sur la terre. Cela va de soi. Cela s'entend de soi. Rien, suivant la raison, n'est juste de soi. [Pascal, Pensées] Tout cela n'a rien, de soi-même, qui soit contraire à la véritable sagesse. [Bourdaloue, Instr. Prudence du salut, Exhort. t. II, p. 407]

    De moi, c'est-à-dire quant à moi, pour ce qui me concerne ; ancienne locution qui représente : quant à ce qui est de moi ; elle est tombée en désuétude, et on dit : pour moi. De moi, toutes les fois que j'arrête les yeux à voir.... [Malherbe, I, 1] De moi, plus je suis combattu, Plus ma résistance Montre sa vertu. [Malherbe, Chanson, V, 27] De moi, je fus touché de voir tant de valeur. [Tristan, La Mort de Chrispe ou Les Malheurs domestiques du Grand Constantin]

    De devant un pronom démonstratif. De celui-ci allons à celui-là.

    De cela même, à cause de cela même. Ces tableaux admirables dont parle Pline et qui, selon ce savant connaisseur, n'en étaient que plus admirés, de cela même qu'ils étaient demeurés imparfaits. [Mairan, Éloges, le card. de Polignac.]

    D. 11° De entre un pronom conjonctif et un autre mot. Qui des deux l'emportera ? Lequel de vous ou de votre ami est venu jusqu'ici ? Or il est temps, ma soeur, de montrer qui nous sommes, Et qui peut plus sur nous, ou des dieux ou des hommes. [Rotrou, Antigone] Qu'ils jugent en partant qui méritait le mieux, Des Français ou de moi, l'empire de ces lieux. [Voltaire, Zaïre]

    Des grammairiens ont blâmé cette tournure, assurant qu'il fallait dire non : lequel des deux était le plus éloquent, de César ou de Cicéron ; mais lequel des deux, César ou Cicéron, était le plus éloquent, ou bien : lequel, de Cicéron et César, était le plus éloquent ? De ces deux tournures la première est correcte et peut s'employer ; la seconde est peu usitée. Dans tous les cas, l'ancienne tournure, qui est dans Rotrou, est justifiée par l'usage et implique seulement un pléonasme dans le de placé devant chaque nom.

    De construit dans le même sens avec le pronom démonstratif celui, celle, ceux, celles. Quoi ! de deux personnes qui font les mêmes choses, celui qui ne sait pas leur doctrine pèche ; celui qui la sait ne pèche pas ! [Pascal, Les provinciales]

    E. 12° De entre un nom de nombre et un autre mot. L'un des deux. Deux des quatre. Daniel, un des enfants de la captivité. [Massillon, Car. Resp. hum.]

    De avec ellipse de un. Il vint des derniers, c'est-à-dire un des derniers. .... Et quoique des plus fins, Il n'avait pu donner d'atteinte à la volaille. [La Fontaine, Fables] Ma femme m'a dit que vous étiez fort honnête homme et tout à fait de ses amis, et je l'ai chargée de vous parler pour un testament que je veux faire. [Molière, Le malade imaginaire] Peut-être êtes-vous de ces hommes qui n'aiment qu'eux-mêmes et qui n'ont égard qu'à leur intérêt propre. [Bourdaloue, Commémor. des morts, Myst. t. II, p. 520] J'ai vu le fer en main Étéocle lui-même ; Il marche des premiers. [Racine, La Thébaïde, ou Les frères ennemis]

    Et de, pris absolument devant un nom de nombre, exprime que, comptant quelque chose, on signale particulièrement le nombre indiqué. Et de trois [bourses] ; celle-ci fut rude à arracher. [Beaumarchais, Le mariage de Figaro, ou La folle journée]

    F. 13° De entre un verbe et un nom, construction où il exprime les compléments des différents verbes de la phrase. Que pensez-vous de cela ? Traiter de la paix. Différer d'avis. Médire de quelqu'un. Il se mêle d'affaires qui ne le regardent pas. On l'accusa de ce malheur. Vous le taxiez de folie. Vivre de légumes. Son esprit manque de justesse. Tirer avantage de ses talents. Le vrai ne dépend point du temps ni de la mode. Issu d'une bonne famille. Et du sacré bandeau qu'il vous mit sur la tête [il] Acheta de vos voeux la superbe conquête. [Rotrou, Bélisaire] Tu [amour] m'obligeras plus d'un trait de ta pitié Qu'elle [la fortune] de son crédit ou de son amitié. [Rotrou, ib. II, 7] Si nous sommes obligés à user de cette sage réserve.... [Bossuet, Libre arb. 4] C'est une dame Qui de quelque espérance avait flatté ma flamme. [Molière, Le misanthrope] [Agnès] N'a plus voulu songer à retourner chez soi, Et de tout son destin s'est commise à ma foi. [Molière, L'école des femmes] Elle [la perdrix] fait la blessée et va traînant de l'aile. [La Fontaine, Fables] Contemplant d'un lieu tranquille leur embarras, leurs afflictions, leurs malheurs, ni plus ni moins que les dieux considèrent de l'Olympe les misérables mortels. [La Fontaine, Psyché, I, p. 101] Je devais par la royauté Avoir commencé mon ouvrage : à la voir d'un certain côté, Messer Gaster [l'estomac] en est l'image. [La Fontaine, Fables] Il me faudrait des journées entières pour me bien expliquer à vous de tout ce que je sens. [Molière, George Dandin] Choisissez de César, d'Achille ou d'Alexandre. [Boileau, Satires] Prosternée aux pieds de Jésus-Christ, elle les arrosa de ses larmes, elle les essuya de ses cheveux. [Bourdaloue, Respect hum. 2e avent. p. 403] Il a fort vu M. d'Uzès, qui ne peut se taire de vos perfections. [Sévigné, 28 oct. 1671] Volage muse, aimable enchanteresse, Qui, m'égarant dans de douces erreurs, Viens tour à tour parsemer ma jeunesse De jeux, d'ennuis, d'épines et de fleurs. [Gresset, Épître à ma Muse.] Il ne vous eût pas été permis de vivre d'humeur, de tempérament, et de ne prendre que ce qui vous plaît pour la règle de ce que vous devez faire. [Massillon, Oraisons funèbres et sermons] De cette autre entreprise honorez mon audace. [Racine, Mithridate] Sans me faire payer son salut de mon coeur. [Racine, Andromaque] Le seul Agamemnon, refusant tant de gloire, N'ose d'un peu de sang acheter la victoire. [Racine, Iphigénie en Aulide] Laissez à Ménélas racheter d'un tel prix Sa coupable moitié dont il est trop épris. [Racine, ib. IV, 4] Mais d'un soin si cruel la fortune me joue. [Racine, Bérénice] .... D'un regard a daigné m'avertir. [Racine, ib. I, 3] .... D'un ordre constant gouvernant ses provinces. [Racine, La Thébaïde, ou Les frères ennemis] Venez, de l'huile sainte il faut vous consacrer. [Racine, Athalie] Tous les jours je l'invoque, et d'un soin paternel Il me nourrit des dons offerts sur son autel. [Racine, ib. II, 7] De quelle noble ardeur pensez-vous qu'ils se rangent Sous les drapeaux d'un roi longtemps victorieux ? [Racine, Mithridate] Les prudents du siècle eurent beau lui représenter.... qu'il fallait éblouir les âmes grossières de quelque apparence de gloire. [Fléchier, Panég. II, p. 357] Son fils Ferdinand III qui hérita de sa politique et fit comme lui la guerre de son cabinet. [Voltaire, Le siècle de Louis XIV] Toi qui prétendais me défendre, tu ne m'as servi de rien. [Voltaire, Le blanc et le noir.] Il [Héraclite] avait écrit de la matière, de l'univers, de la république et de la théologie. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque] Les anachorètes écrivirent de la douceur du rocher et des délices de la contemplation. [Chateaubriand, Le génie du christianisme, ou Les beautés de la religion chrétienne] La muse t'enivra de précoces faveurs. [Lamartine, Méditations poétiques] Silencieux abîme où je vais redescendre, Pourquoi laissas-tu l'homme échapper de ta main ! De quel sommeil profond je dormais dans ton sein ? [Lamartine, ib. I, 18]

  • 8De entre un verbe et un substantif et composant avec ce substantif une sorte de locution adverbiale qui modifie le sens du verbe à la façon des adverbes. Il me parla d'un ton menaçant. Il alla de son propre mouvement le trouver. Non, je n'en ferai rien, la chose est résolue, Ou l'on m'y contraindra de puissance absolue. [Mairet, Sophonisbe] Si vous ne consolez d'un traitement plus doux Celui qui désormais ne peut vivre sans vous. [Mairet, ib. III, 4] Anéantissez-vous de honte et de respect. [Corneille, La toison d'or] Et même à ses Romains ne daigne repartir Que d'un regard farouche et d'un profond soupir. [Corneille, La mort de Pompée] S'il ne vous traite ici d'entière confidence. [Corneille, Polyeucte] [Il] Les traitait malgré lui d'entière égalité. [Corneille, Attila] Et de quelque rigueur que le destin me traite, Je perds moins à mourir qu'à vivre leur sujette. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] Et pour vous témoigner de quelle indifférence J'abandonne un plaisir que j'ai tant poursuivi. [Rotrou, Venceslas] Ô folle piété qui d'une même audace Fit la rébellion et reçoit la menace ! [Rotrou, Antigone] Nous volons sur ses pas d'une ardeur unanime. [Rotrou, Bélisaire] Car Lucile soutient que c'est une chanson, Et m'a parlé d'un air à m'ôter tout soupçon. [Molière, Le dépit amoureux] Et traitant de mépris les sens et la matière, à l'esprit, comme nous, donnez-vous tout entière. [Molière, Les femmes savantes] Où, de droit absolu, j'ai pouvoir d'ordonner. [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Et tâchons d'ébranler, de force ou d'industrie, Ce malheureux dessein qui nous a tous troublés. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur] Vous les voulez traiter d'un semblable langage ? [Molière, Le bourgeois gentilhomme] Et traitent de même air l'honnête homme et le fat. [Molière, Le misanthrope] Nous faisons maintenant de la médecine d'une façon toute nouvelle. [Molière, Le médecin malgré lui] Vous agiriez de mauvais sens. [Pascal, dans COUSIN] Ils l'aimaient seulement de bouche, et ils lui rendaient de la langue des soumissions trompeuses. [Sacy, Bible, psaume 77, V. 36] .... Ô jour heureux pour moi ! De quelle ardeur j'irai reconnaître mon roi ! [Racine, Athalie]
  • 9De entre un verbe passif ou un participe passif ou une construction à sens passif et un substantif ou un pronom personnel et faisant fonction de complément passif. Je suis vaincu du temps, je cède à ses outrages. [Malherbe, II, 12] Tantôt je me la vois d'un pirate ravie. [Malherbe, V, 21] Le soldat qui ne s'était jamais vu tromper des [par les] promesses du roi. [Vaugelas, Q. C. 499] L'agrément est institué de la nature pour représenter la jouissance. [Descartes, Pass. 90] Il a voulu dire seulement avec saint Paul que toute puissance est établie de Dieu. [Pellisson, Mém. pour les gens de lettres, p. 75] J'ai connu un homme qui prouvait par bonnes raisons qu'il ne faut jamais dire, une telle personne est morte d'une fièvre et d'une fluxion de poitrine, mais elle est morte de quatre médecins et de deux apothicaires. [Molière, L'amour médecin] Jésus-Christ est-il mort pour des impies dans le temps destiné de Dieu ? [Sacy, Bible, St Paul, Ép. aux Rom. V, 6] Animé d'un regard, je puis tout entreprendre. [Racine, Andromaque] Et de mille remords son esprit combattu. [Racine, ib. V, 2] Excité d'un désir curieux. [Racine, Britannicus] Quoi ! toujours enchaîné de ma gloire passée.... [Racine, ib. IV, 3] Vaincu du pouvoir de vos charmes. [Racine, Alexandre le grand] Ô ciel ! si notre amour est condamné de toi. [Racine, Bajazet] Jadis Priam vaincu fut respecté d'Achille. [Racine, Andromaque] Aux larmes, au travail le peuple est condamné, Et d'un sceptre de fer veut être gouverné. [Racine, Athalie] Ignace suscité de Dieu pour venir au secours de son Église affligée. [Fléchier, Panég. II, p. 209] Appelé de Dieu au ministère de sa parole. [Fléchier, ib. p. 198] Il se regarda donc comme un ouvrier envoyé du père de famille pour défricher cette terre inculte. [Fléchier, ib. p. 299] Une âme rachetée du sang de Jésus-Christ. [Fléchier, ib. p. 309] L'autorité des prophètes, des apôtres, des hommes inspirés de Dieu. [Massillon, Car. Doutes s. la rel.] Moïse son cadet est établi du ciel chef des armées du Seigneur. [Massillon, ib. Vocation.] Un ver secret et dévorant placé de la main de Dieu au milieu de son coeur. [Massillon, ib. Mauv. riche.] Un impie peut être frappé de Dieu, et sentir le poids de la majesté qu'il avait blasphémée. [Massillon, ib. Inconstance.] Quoi ! vous auriez honte d'être choisi de Dieu comme un vase de miséricorde ! [Massillon, ib. Resp. hum.] être né le premier dans une famille, c'est être choisi du ciel pour succéder aux titres et aux dignités de nos ancêtres. [Massillon, ib. Vocat.] Plus occupé des nouveaux titres dont il est revêtu qu'instruit des derniers avis d'un père mourant. [Massillon, ib. Mort.] Si vous croyez que l'Évangile est une loi donnée de Dieu. [Massillon, ib. Samaritaine.] En rendant l'honneur et le tribut aux puissances établies de Dieu. [Massillon, ib. Aumône.] L'esprit de curiosité donné de Dieu à l'homme. [Voltaire, Le siècle de Louis XIV] Votre Majesté a fait, depuis quarante ans de règne, tout ce qu'il faut pour se faire respecter de ses amis et de ses ennemis. [D'alembert, Lett. au roi de Prusse, 8 juin, 1780] Les Français sont ma proie : ils n'affranchiront pas Les humbles pavillons que mon mépris leur laisse, Déjà vaincus de leur mollesse Et du seul souvenir de nos derniers combats. [Gilbert, Ode sur la guerre.] N'attends pas que ton coeur, de mollesse abattu.... [Ducis, Abufar ou La Famille arabe] Ô jours de mon printemps, jours couronnés de rose, à votre fuite en vain un long regret s'oppose. [Chénier, Élégies]
  • 11De entre un verbe et un substantif, et signifiant : pour, à cause de, avec. Mais je hais vos messieurs de leurs honteux délais. [Molière, L'amphytrion] J'adore le bon abbé de tout ce qu'il me mande là-dessus, et de l'envie qu'il a de me voir recevoir une si chère et si aimable compagnie. [Sévigné, 4 juin 1676] En vain suis-je séparé du monde d'habit, d'état, de demeure, de fonction et de conversation, si mon esprit et mon coeur y sont attachés. [Bourdaloue, Serm. 17e dim. après la Pent. Domin. t. IV, p. 70] Déjà Troie en alarmes Redoute mon bûcher et frémit de vos larmes. [Racine, Iphigénie en Aulide] Au moins consolez-moi de quelque heure de paix. [Racine, La Thébaïde, ou Les frères ennemis] Je ne sais point.... De mes sonnets flatteurs lasser tout l'univers, Et vendre au plus offrant mon encens et mes vers. [Boileau, Satires] D'un soin officieux j'irritais sa blessure. [Delavigne, Les vêpres siciliennes]
  • 12De entre un verbe et un adjectif. Il s'est laissé traiter de lâche, c'est-à-dire il s'est laissé appeler lâche. C'était s'exposer à être traité de séditieux par les Hérodiens. [Bourdaloue, Serm. 22e dim. après la Pentec. Dom. t. IV, p. 317]

    Même emploi avec un substantif. On le traita publiquement d'homme sans foi La voix publique le qualifiait de traître, c'est-à-dire elle le disait traître. Se qualifier de prince.

  • 13De entre un verbe et un autre verbe qui sert de complément au premier. On l'accusa d'avoir conspiré. Vous êtes chargé de lui écrire. Il désespérait de réussir. On lui conseille de partir. Choisis de leur donner ton sang ou de l'encens. [Corneille, Polyeucte] Il lui échappa d'écrire : Qu'a de commun la censure de Rome avec celle de France ? [Pascal, Les provinciales] Il veut aller au delà et nous imposer de croire ce qu'il a décidé seul. [Pascal, ib. 19] Les papes ont souvent entrepris de traiter comme hérétiques ceux qui appelleraient d'eux aux conciles. [Pascal, ib.] Ah ! Seigneur, je n'ai pas eu ce dédain qui empêche de jeter les yeux sur les mortels trop rampants. [Bossuet, Oraisons funèbres] Cessez de vous laisser conduire au premier vent. [Molière, L'étourdi, ou Les contretemps] Rougis plutôt, rougis d'envier au vulgaire Le stérile repos dont son coeur est jaloux. [Lamartine, Méditations poétiques]

    Dans le XVIIe siècle, de était employé dans des cas où présentement on met à. Il exhorta le poëte de ne plus faire de vers la nuit.... [Scarron, Le Roman comique] Une galère turque où l'on nous avait invités d'entrer. [Molière, Les fourberies de Scapin] La crainte fait en moi l'office du zèle.... et me réduit d'applaudir bien souvent à ce que mon âme déteste. [Molière, Dom Juan, ou le Festin de Pierre] Ah ! je vous apprendrai de me traiter ainsi. [Molière, L'amphytrion]

  • 14De entre deux verbes, avec un sens équivalent à : de ce que, vu que, puisque, quand, comme si. Que veut-elle dire De ne venir pas ? [Malherbe, VI, 7] Je mérite la mort de mériter sa haine. [Corneille, Le Cid] À toute autorité je fermerais les yeux, Et je ferais beaucoup de respecter les dieux. [Rotrou, Antigone] Je croyais tout perdu de crier de la sorte. [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Ah ! voilà qui me plaît de parler de la sorte ! [Molière, Le bourgeois gentilhomme] Est-ce pour rire ou si tous deux vous extravaguez de vouloir que je sois médecin ? [Molière, Le médecin malgré lui] Si je suis affligé, ce n'est pas pour des prunes, Et je le donnerais à bien d'autres qu'à moi, De se voir sans chagrin au point où je me voi. [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Quel sort ont nos yeux en partage, Et qu'est-ce qu'ils ont fait aux dieux, De ne jouir d'aucun hommage ? [Molière, Psyché] [Il] s'imagina qu'il ferait bien De se pendre et finir lui-même sa misère. [La Fontaine, Fables] Puisque je vois que je vous ferai plaisir de vous parler.... [Pellisson, Convers. de L. XIV devant Lille, p. 45] Un bon prince est toujours assez loué d'être aimé. [Massillon, Oraisons funèbres et sermons] Vous vous trompez de regarder comme des inclinations inalliables avec la piété ces penchants.... [Massillon, Car. Pécheresse.] Je me croirais haï d'être aimé faiblement. [Voltaire, Zaïre]

    De entre un verbe pris impersonnellement, et un infinitif. Il est bon de s'amuser. Il convient de travailler.

  • 15De devant un infinitif et pris absolument, c'est-à-dire sans nom ou verbe dont il soit le complément. On les appela ; eux, de courir, c'est-à-dire, sous-entendu, ils commencèrent, ils se hâtèrent de courir. Grenouilles aussitôt de sauter dans les ondes, Grenouilles de rentrer en leurs grottes profondes. [La Fontaine, Fables] Les médiocres gens Vinrent se mettre sur les rangs ; Elle, de se moquer. [La Fontaine, Fables] L'épouse indiscrète et peu fine Sort du lit quand le jour fut à peine levé, Et de courir chez sa voisine. [La Fontaine, ib. VIII, 6] Mais j'offre ce que j'ai ; l'ours l'accepte ; et d'aller ; Les voilà bons amis avant que d'arriver. [La Fontaine, ib. VIII, 10] Le monarque des dieux leur envoie une grue, Qui les croque, qui les tue, Qui les gobe à son plaisir ; Et grenouilles de se plaindre, Et Jupin de leur dire.... [La Fontaine, ib. III, 4] Ce portier du logis était un chien énorme, Expédiant les loups en forme ; Celui-ci s'en douta : serviteur au portier, Dit-il, et de courir ; il était fort agile.... [La Fontaine, ib. IX, 10] Je visai si juste que je lui fis tomber un bouquet dans le sein ; et de rire. [Rousseau, Les confessions]
  • 16De devant un infinitif et pris absolument comme le précédent, mais servant, dans cette construction, soit de sujet complexe au verbe de la phrase, soit d'annonce de ce qui va suivre. Mais de souffrir ma gloire en la bouche des miens, C'est en ôter le prix au ciel dont je la tiens. [Rotrou, Bélisaire] Car, de m'imaginer que vous me méprisiez, j'avoue franchement que je n'ai pas si mauvaise opinion de moi. [Guez de Balzac, Correspondance] Car de m'imaginer que vous m'ayez gardé quelque place.... j'ai trop bonne opinion de votre esprit pour m'en persuader cette bassesse. [Voiture, Lettres] Je sais quel est leur prix ; mais de les accepter, Je ne puis, et voudrais vous pouvoir écouter. [La Fontaine, Filles de Minée.] De dire si la compagnie Prit goût à la plaisanterie, J'en doute. [La Fontaine, ib. VIII, 8] Or d'aller lui dire non, Sans quelque valable excuse, Ce n'est pas comme on en use. [La Fontaine, Fables] Comme si d'occuper ou plus ou moins de place Nous rendait, disait-il, plus ou moins importants. [La Fontaine, ib. VIII, 15] De raconter quel sort les avait assemblés, Quoique sous divers points tous quatre ils fussent nés, C'est un récit de longue haleine. [La Fontaine, ib. X, 26] Puisque d'observer sa loi, c'est la moindre de nos pensées. [Bossuet, Bonté et rigueur de Dieu.] D'expliquer ce qui s'y passe, ce n'en est pas ici le lieu. [Bossuet, Oraisons funèbres] Car de croire que votre conduite leur soit inconnue, et qu'elle demeure secrète pour eux, abus, chrétiens. [Bourdaloue, Sur le scandale, 1er avent, p. 126] De les vouloir parcourir toutes, ce serait une matière infinie. [Bourdaloue, 6e dim. après l'Épiph. Dominic. t. I, p. 279] Car de mépriser la règle et d'en ressentir l'onction, c'est ce qui ne fut jamais et ce qui ne peut être. [Bourdaloue, Exhort. sur l'observ. des règles, t. I, p. 218] De vous en faire aimer, n'est que le dernier de vos soins. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] Je l'ai vu quelque part : de savoir où, il est difficile. [La Bruyère, VII] De savoir quelles sont leurs limites, ce n'est pas une chose facile. [La Bruyère, ib.] De servir un amant, je n'en ai pas l'adresse. [Boileau, Satires] Car de penser alors qu'un Dieu tourne le monde Et règle les ressorts de la machine ronde, C'est là, tout haut du moins, ce qu'il n'avouera pas. [Boileau, ib.] Thalès répétait souvent que de parler beaucoup n'était pas une marque d'esprit. [Fénelon, Thalès.] De la voir ne servirait qu'à augmenter l'aversion. [Massillon, Car. Pardon.] Car de vous le dépeindre en général, vous ne vous reconnaîtriez pas. [Massillon, Car. Médis.] Vous n'en demeurerez pas à être simple spectateur, vous y applaudirez ; car de s'aller mêler parmi les mondains pour être leur censeur éternel, les avis ne seraient pas là à leur place. [Massillon, Confér. Fuite du monde.] Comme si de coopérer à l'ouvrage de la rédemption des hommes était une oeuvre mercenaire. [Massillon, ib. Zèle contre les scandales] Mais, direz-vous, de vouloir toujours reprendre, corriger, exhorter, ce serait se rendre odieux et importun. [Massillon, ib. Cond. des clercs dans le monde.] De préférer la raison à la félicité, c'est être très insensé. [Voltaire, Bramin.] De savoir si Constantin fut cause de la ruine de l'Empire, c'est une recherche digne de votre esprit. [Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations et sur les principaux faits de l'histoire depuis Charlemagne jusqu'à Louis XIII] De vous dire précisément s'il y a plus de gens à lier dans un pays que dans un autre, c'est ce que mes faibles lumières ne me permettent pas. [Voltaire, Candide, ou L'optimiste] Et que de supposer qu'un animal est composé de petits animaux est à peu près la même chose que de dire que.... [Buffon, Animaux, ch. 8] De lui copier ce griffonnage, ce serait pour en mourir. [Courier, Lettres de France et d'Italie] Les Calabrais en veulent surtout aux Français ; de vous dire pourquoi, cela serait trop long. [Courier, Lettres de France et d'Italie]

    Cette tournure est perpétuelle dans le XVIIe siècle, et on ne parle guère autrement ; aujourd'hui on supprime souvent, surtout quand l'infinitif est sujet complexe, ce de qui n'est ni sans utilité ni sans grâce, et qui d'ailleurs peut être repris, quand on veut, d'après les meilleures et les plus sûres autorités.

    Cette tournure rend compte de phrases comme celle-ci : Sa force était de céder à propos ; il faut entendre que de céder est un sujet complexe, et construire : de céder à propos était sa force. Son caractère particulier était de concilier les intérêts opposés, et, en s'élevant au-dessus, de trouver le secret endroit et comme le noeud par où on peut les réunir. [Bossuet, Oraisons funèbres] Ses principaux soins sont de travailler pour la grandeur de son maître. [La Fontaine, Psyché, I, p. 105] Richelieu, ce prélat de qui toute l'envie Est de voir ta grandeur aux Indes se borner. [Malherbe, II, 12]

  • 17C'est par une même analogie d'emploi et pour un certain besoin de l'oreille que l'on met de ou que de devant des verbes où ces mots sont explétifs. C'est faire injure au maître d'une maison, d'y entrer par la fenêtre. [Pascal, Les provinciales] Son père Antonin lui avait appris qu'il valait mieux sauver un seul citoyen que de défaire mille ennemis. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Que le ciel la préserve à jamais de danger ! Voyez quelle bonté de vouloir me venger ! [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Je m'en rapporte à vous-même et vous demande si c'est une chose louable que de rire ; assurément ce n'en est pas une, non plus que de boire et de manger. [La Fontaine, Psyché, I, p. 101] C'est déshonorer la religion, de croire que.... [Massillon, Petit carême] Ce serait dégrader l'Évangile, de le regarder comme la religion du peuple. [Massillon, Petit carême] Est-ce aimer Dieu que de croire faiblement sa vérité ? que d'entendre indifféremment sa parole ? [Fléchier, Panég. I, p. 313] Il aima mieux abandonner le butin à son armée que de se l'approprier. [Vertot, Histoire des révolutions arrivées dans le gouvernement de la République romaine]
  • 18De entre le verbe être ou tout autre verbe exprimant un état, et un substantif, construction où il indique que la chose dont il s'agit devient nôtre. La lecture est d'une grande fatigue pour mes yeux affaiblis. Nous sommes de la maison. Il est de votre âge. J'ai toujours marché depuis par le plus beau temps, le plus beau pays et le plus beau chemin du monde ; vous me disiez qu'il était d'hiver quand vous y passâtes ; il est devenu d'été, et d'un été le plus tempéré qu'on puisse imaginer. [Sévigné, 348] Jésus-Christ leur avait fait expressément entendre que son royaume ne serait pas de ce monde. [Bourdaloue, Instr. pour la 2e fête de Pâques, Exhort. t. II, p. 263] La prière est pour vous d'un dégoût et d'un ennui que vous ne pouvez supporter. [Massillon, Car. Prière, 1] Il se vit bientôt des plaisirs du roi, sans que l'envie des courtisans en parût révoltée. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] .... Mon voyage dépeint Vous sera d'un plaisir extrême. [La Fontaine, Fables] Il n'a pas été de ce passage. [Sévigné, 148] D'Hacqueville est de ce voyage. [Sévigné, 286] Je ne pouvais me persuader que cette lettre fût de Philoclès [eût été écrite par lui]. [Fénelon, Télémaque] Hélas ! tout ce qu'elle aimait devait être de peu de durée. [Bossuet, Oraisons funèbres]

    Le verbe peut être sous-entendu. Henriette, d'un si grand coeur, est contrainte de demander du secours ; Anne, d'un si grand coeur, ne peut en donner assez. [Bossuet, Oraisons funèbres]

    Il est de.... c'est le propre de, le caractère de. Il est de la foi, que ce que vous donnez aux pauvres, vous le donnez à Jésus-Christ. [Bourdaloue, Nativ. de J. C. 2e avent, p. 540]

    Il est de.... comme.... impersonnellement, avec un substantif ou un pronom, signifiant qu'une chose se comporte comme une autre. Il est de ceci comme d'une beauté excellente et d'une autre qui a des grâces : celle-ci plaît, mais l'autre ravit. [La Fontaine, Psyché, I, p. 102]

    Qu'est-ce.... avec de ou que de. Qu'est-ce de ce langage-là ? c'est-à-dire que faut-il penser de ce langage-là ? ô Dieu ! qu'est-ce que de nous ? [Bossuet, Mort. 1] Hélas ! si l'on n'aimait pas, que serait-ce de la vie ? [Molière, Monsieur de Pourceaugnac]

    Familièrement. Ce que c'est que de nous ! c'est-à-dire, voyez la misérable condition humaine.

    Dans une phrase affirmative. Nous ne savons ce que c'est que de tromperie, ou de tromper. Au temps de Papirius, on ne savait pour ainsi dire ce que c'était que de cavalerie. [St-évrem. II, 19]

    Malherbe (IV, 10) a dit d'une façon analogue, mais qui a vieilli : Ce ne m'est plus de nouveauté [cela ne me surprend plus] Qu'elle soit parfaite en beauté.

    Si j'étais de vous ou que de vous, si j'étais à votre place. Non, si j'étais de vous, je le planterais là. [Régnier, Satires] Dans le fond rien n'est plus misérable ; et si j'étais de vous.... [Imbert, Jaloux sans amour, IV, 1]

    G. 24° De placé entre un adverbe et un nom ; il s'agit ici des adverbes loin, près, tant, trop, etc. qui apportent à l'esprit l'idée de choses et non, comme l'adverbe proprement dit, l'idée d'une qualité abstraite. Loin de la patrie. Près du tombeau. Moins d'argent. Tant de belles actions. Je suis confondu de tant de bonté. Trop ou trop peu d'exercice nuit à la santé. Et, bien loin des sergents, des clercs et du palais, Va chercher un repos qu'il ne trouva jamais. [Boileau, Satires] Pendant que tant de naissance, tant de biens, tant de grâces, qui l'accompagnaient, lui attiraient les regards de toute l'Europe. [Bossuet, Oraisons funèbres] Combien de fois ainsi, trompé par l'existence, De mon sein pour jamais j'ai banni l'espérance ! [Lamartine, Méditations poétiques]

    Voici, voilà avec de. Voilà de quel ton il a parlé. Qu'est-ce donc [l'animal] ? Une montre. Et nous ? C'est autre chose. Voici de la façon que Descartes l'expose. [La Fontaine, Fables] Ah ! voilà justement de mes religieuses, Lorsqu'un père combat leurs flammes amoureuses. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur] Voilà, ce me semble, de ces cas où il est doux d'avouer qu'on a tort. [Voltaire, Correspondance] Diantre de.... au diable soit.... Diantre soit de la folle avec ses visions ! A-t-on rien vu d'égal à ses préventions ? [Molière, Les femmes savantes]

    De placé entre un adverbe et un verbe. Bien loin de céder. Près de partir.De construit avec un adverbe, en tant que nom abstrait de lieu, de temps, de quantité, etc. De là, d'ici. De près, de loin. De trop. C'est de là que nous vient cet art ingénieux De peindre la parole et de parler aux yeux. [Brébeuf, Phars. ch. II] Ô mon père, d'où Molina a-t-il pu être éclairé pour déterminer une chose de cette importance sans aucun secours de l'Écriture ? [Pascal, Les provinciales] D'où vous peuvent venir ces douleurs non communes ? [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] D'ici je vois la vie, à travers un nuage, S'évanouir pour moi dans l'ombre du passé. [Lamartine, Méditations poétiques]

    De construit avec plus ou moins, au sens de que. Il ne s'y trouva pas moins de trente personnes, c'est-à-dire pas moins que trente personnes. Ce cep portait plus de vingt grappes, c'est-à-dire plus que vingt grappes. Cet emploi est un reste de la vieille langue qui exprimait le complément du comparatif non par que, mais par de (exemple : plus fort de moi), comme l'Italien l'exprime par di ; de ou di rendant l'ablatif latin usité en ce cas.

    H. 25° De construit avec une préposition. Distinguer l'ami d'avec le flatteur. La justice et la charité ont disparu d'au milieu d'eux. Je suis sorti d'avec lui très satisfait. Vous m'avez chassé de chez moi. D'outre en outre. Vous, homme vain, qui à peine échappé de parmi le peuple.... [Massillon, Villeroy.] Il [Mahomet enfant] ne sera point ôté d'entre les mains des mortels, parce qu'heureuses les mamelles qui l'allaiteront et les mains qui le toucheront. [Montesquieu, Lettres persanes] Aussi a-t-il fallu les aller querir bien loin et les faire venir de delà la mer. [Voiture, Lettres]

    De par le roi, en vertu de l'autorité du roi. Et familièrement, cela s'est fait de par ma volonté (voir PAR). En cette locution se sont confondues la construction des deux prépositions de par, et l'ancienne forme de part le roi, c'est-à-dire de la part du roi.

    I. 26° De construit avec la conjonction quand. De quand est cette lettre ? Effets qui diffèrent quand la lune est pleine de quand elle est nouvelle. [Descartes, Monde, 12]

    J. 27° De ce que, conjonction composée qui signifie parce que, à cause que. De ce que je n'en parle pas, cela ne veut pas dire que je n'y songe plus. Voulez-vous d'autres nullités ? Que direz-vous de ce que le pape ne se contente pas de défendre d'écrire, de prêcher et de rien dire de contraire à ses décisions ? [Pascal, Les provinciales] Ce n'est pas tant la peur de la mort qui me fait fuir que de ce qu'il est fâcheux à un gentilhomme d'être pendu. [Molière, Monsieur de Pourceaugnac]

REMARQUE

1. La préposition de est prise tantôt dans le sens passif, tantôt dans le sens actif : quand vous dites l'amour de Rome, cela peut vouloir dire l'amour que Rome a pour vous ou l'amour que vous avez pour Rome ; Rome peut être celle qui aime ou celle qui est aimée. Il faut donc que les mots qui entourent de en déterminent bien le sens.

2. De, pris partitivement, veut l'article défini le, la, les quand le substantif n'est pas précédé d'un adjectif : des passants l'avertirent ; de l'argent est nécessaire. Mais cet article se supprime quand un adjectif précède le substantif : d'honnêtes gens ; de belles et bonnes terres ; de bon vin. Ces deux constructions s'expliquent naturellement ; la première s'explique par : un certain nombre des passants ; l'autre par : un certain nombre d'honnêtes gens ; suivant que l'on considère, dans le premier cas, les passants comme déterminés par l'article, et dans le second cas, honnêtes gens comme indéterminés par l'absence d'article. C'est ensuite l'oreille qui a fait le choix et qui a voulu, par exemple, que l'on dît des hommes et non pas d'hommes, qui n'a pas semblé assez plein ; dès lors l'usage s'est fixé et les règles sont intervenues. Avec les adverbes de quantité, c'est de sans article qu'on emploie : beaucoup d'hommes ; trop d'argent, etc. ; bien fait exception (voirBIEN adverbe) : bien des gens m'ont dit.

3. Quand la phrase est affirmative, de, pris partitivement, veut toujours l'article après soi. Je verse de l'eau. Je demande du pain. Voulez-vous de l'eau ? Si la phrase est négative, de prend l'article ou ne le prend pas ; mais le sens est différent : je ne demande pas de pain ; je ne demande pas du pain. Dans le premier cas, je ne demande rien, pas plus du pain qu'autre chose. Dans le second cas, ce n'est pas du pain que je demande ; mais je désire autre chose. Je ne mange pas de moules, veut dire que je ne les aime pas ou n'en veux pas ; je ne mange pas des moules, veut dire que ce ne sont pas des moules que je mange actuellement.

4. En certaines locutions, où l'adjectif fait corps avec son substantif, on met des plutôt que de : des jeunes gens ; des mauvais sujets ; des bons mots ; des premiers ministres. Il est très rare que des premiers ministres s'abaissent à de si honteuses lâchetés, découvertes tôt ou tard par ceux qui ont donné l'argent ou par les registres qui ont fait foi. [Voltaire, Histoire de l'empire de Russie sous Pierre le Grand] Pourtant il n'est pas interdit de suivre la règle ordinaire et de dire : de jeunes gens ; de mauvais sujets ; de bons mots. Malherbe a dit, II, 12 : Ceux à qui la chaleur ne bout plus dans les veines, En vain dans les combats ont des soins diligents ; Mars est comme l'Amour ; ses travaux et ses peines Veulent de jeunes gens. Et Molière : Et dans tous ses propos On voit qu'il se travaille à dire de bons mots. [Molière, Le misanthrope]

5. Lorsqu'un nombre cardinal est précédé de en, l'adjectif qui suit ce nombre prend ordinairement la préposition de : sur cent habitants, il y en a deux de riches. Comme en devant un nom de nombre ne permet pas de mettre un substantif après, cette remarque ne concerne que les adjectifs, et avec les substantifs l'on prend un autre tour : sur mille habitants, il y en a trois qui sont cabaretiers.

6. Voltaire, Oreste, II, 1, a dit : De deuil et de grandeur tout offre ici l'image. Il y a une faute de langage dans ce vers ; en effet, l'image exprime une idée définie à cause de l'article ; et la préposition de, placée comme elle est, exprime une idée indéfinie. Il aurait fallu dire : une image de deuil et de grandeur, ou bien l'image du deuil et de la grandeur.

7. La remarque précédente touche à un précepte analogue qui est qu'un mot pris indéterminément, c'est-à-dire sans l'article défini le, la, les, ne peut plus être représenté par un pronom dans une phrase suivante. Ainsi il serait incorrect de dire : vous m'avez fait justice, et je l'aime ; le pronom la ne peut représenter justice pris indéterminément. C'est une faute semblable qu'a commise la Bruyère, ch. XI, en disant : On l'a vu une fois heurter de front contre celui d'un aveugle. Cependant cette prescription n'est pas tellement rigoureuse qu'en certaines circonstances bien choisies, et quand le sens n'offre aucune ambiguïté, on ne puisse s'en dispenser. Ainsi il serait trop rigoureux de condamner cette phrase-ci : comme il est de bonne compagnie, il est juste qu'il l'aime.

8. Faut-il dire : je me suis entretenu avec de bons et de sages personnages ou avec de bons et sages personnages. La première forme se trouve dans les passages suivants : Avoir ensemble d'oisifs et de longs entretiens. [Bourdaloue, Pensées, t. III, p. 100] D'impitoyables et de faux réformateurs. [Bourdaloue, ib. p. 157] Vous jugerez que le critique a de profondes et de singulières connaissances de notre histoire. [Voltaire, Correspondance] Ces machines qui nous ont fourni de grands et d'éternels moyens de vaincre et de régner. [Buffon, Chien.] Lorsqu'on voulait se nourrir de sérieuses et d'utiles pensées. [Chateaubriand, Le génie du christianisme, ou Les beautés de la religion chrétienne] La seconde forme se trouve dans ces passages-ci : Revenue d'une si longue et si étrange défaillance. [Bossuet, Oraisons funèbres] La louange de sage et vigilant père de famille. [Bossuet, Oraisons funèbres] Il est donc loisible en ceci de prendre l'une ou l'autre tournure. Cependant cela ne s'applique qu'au cas où les adjectifs n'expriment pas des qualités inconciliables ; ainsi il ne faudrait pas dire : il cède à de bonnes et mauvaises pensées ; mais à de bonnes et de mauvaises pensées ; ou aussi : à de bonnes et à de mauvaises pensées.

9. La règle est, quand de est suivi de deux ou plusieurs noms ou verbes, de le répéter à chaque nom et à chaque verbe : le temps de l'action et de la parole, et non le temps de l'action et la parole ; le temps de parler et d'agir, et non le temps de parler et agir. Mais cette règle n'existait pas au XVIe siècle, et l'écrivain n'avait alors qu'à consulter là-dessus son goût et son oreille. Une portion de cette liberté durait encore dans le XVIIe siècle ; témoin ces exemples : La puissance de bien juger et distinguer le vrai d'avec le faux. [Descartes, Discours de la méthode] ; Le remède plus prompt où j'ai su recourir, C'est de pousser ma pointe et dire en diligence à notre vieux patron toute la manigance. [Molière, Le dépit amoureux] Trouvestu beau, dis-moi, de diffamer ma fille Et faire un tel scandale à toute une famille ? [Molière, Le bourgeois gentilhomme] Il me prend des tentations d'accommoder son visage à la compote et le mettre en état de ne plaire, de sa vie, aux diseurs de fleurettes. [Molière, George Dandin] Ésope, pour toute punition, lui recommanda d'honorer les dieux et son prince ; se rendre terrible à ses ennemis, facile et commode aux autres, bien traiter sa femme, sans pourtant lui confier son secret ; parler peu et chasser de chez soi les babillards ; ne se point laisser abattre au malheur ; avoir soin du lendemain.... surtout n'être point envieux du bonheur ni de la vertu d'autrui. [La Fontaine, Vie d'Ésope] Avec la règle actuelle et l'usage ancien, on peut dire que le de doit toujours se répéter, quand il s'agit de substantifs, et qu'aujourd'hui on rejettera une phrase comme celle-ci de Molière : La peste soit de l'homme et sa chienne de face ! [Molière, L'école des femmes] mais qu'avec les verbes on distinguera : qu'en général il faut répéter le de ; qu'on peut pourtant l'omettre quand les deux verbes expriment une action simultanée (par exemple : il importe de bien mâcher et broyer les aliments), et dans une longue énumération, en poésie surtout, si le sens n'en souffre pas.

10. Aujourd'hui, dans les dates où figure le nom du mois, on dit, par abréviation, le 10 mars, le 12 juin, etc. Autrefois on mettait le de : le 10 de mars, le 12 de juin, etc. Voltaire n'y manque jamais dans sa longue correspondance. Mme de Sévigné datait autrement, sans de et avec le nombre ordinal : à Paris, ce dimanche 26e avril ; aux Rochers, mercredi 19e avril.

11. Dans le XVIe siècle et dans le XVIIe, on ne se faisait pas scrupule, dans les constructions avec c'est... que, de répéter, par pléonasme, la préposition de. Ce n'est pas de ces sortes de respects dont je vous parle. [Molière, George Dandin] Ce n'est pas de vous, madame, dont il est amoureux. [Molière, Les amants magnifiques] Ces pléonasmes sont condamnés aujourd'hui, et il faudrait dire : ce n'est pas de vous, madame, qu'il est amoureux ; ou ce n'est pas vous, madame, dont il est amoureux.

12. Le dictionnaire de l'Académie écrit : couverture de mulet et couverture de chevaux, gelée de pomme et gelée de coings. Des grammairiens se sont plaints de ces disparates, et que l'Académie n'eût donné aucune règle. Le fait est que la chose est indifférente et dépend du point de vue, suivant que l'on considère le mot comme singulier et collectif ou comme pluriel et individuel. Ainsi on dira de l'huile d'olive ou d'olives ; mais on dira un baril d'olives, parce qu'ici on ne peut considérer l'olive comme collective ; de la gelée de pomme ou de pommes, mais un panier de pommes ; des caprices de femme ou de femmes, mais une pension de femmes.

13. D'après Vaugelas, de veut toujours être joint immédiatement à son nom, sans qu'il y ait rien d'étranger entre deux, de sorte qu'il y aurait une faute dans cette phrase-ci : j'ai suivi l'avis de tous les jurisconsultes et de presque tous les casuistes ; il faut dire : et presque de tous les casuistes. Ces scrupules n'ont pas été confirmés par l'usage ; et la tournure blâmée se dit et s'écrit aujourd'hui sans conteste.

14. L'usage s'est introduit de dire : il a extrêmement d'esprit, il a infiniment d'esprit ; dans ce cas on traite extrêmement, infiniment comme beaucoup. On dit aussi, et beaucoup moins souvent, bien que plus exactement : il a de l'esprit extrêmement ou infiniment.

15. Est-il correct de dire avec ellipse de la préposition de : on perdit quinze à vingt hommes ; dix à quinze dames étaient présentes ? Cette ellipse, très employée dans le parler vulgaire, et indiquée dans le Dictionnaire de l'Académie au mot à, est maintenant entrée dans l'usage, bien que la grammaire ne puisse la justifier ; que penserait-on en effet, en changeant les termes, de cette locutionci : il y a, Paris à Lyon trente lieues ? Il s'entend de soi qu'on pourra dire grammaticalement, en rétablissant la préposition de : on perdit de quinze à vingt hommes ; de dix à quinze dames étaient présentes.

16. De employé dans les noms propres a deux origines. Tantôt il sert à désigner un nom de lieu, avec qualification nobiliaire ou non : M. de la Rochefoucaut (La Rochefoucaut est un nom de lieu) ; Pierre du Frêne (du Frêne désignant un frêne remarquable dans la localité) ; tantôt de exprime un rapport de filiation : dans le moyen âge où les noms de famille n'étaient pas établis et où le nom de baptême était le vrai nom, on distinguait les individus par le nom de leur père : Petrus Johannis, Pierre fils de Jean ; cela se disait, dans la langue vulgaire, Pierre de Jean ; usage d'où sont venus une multitude de noms propres actuels.

+

DE.
3Ajoutez :

C'est par une construction où de ne sert qu'à déterminer, qu'il faut interpréter ce vers de Molière : C'est un étrange fait du soin que vous prenez, à me venir toujours jeter mon âge au nez [le fait du soin, le fait qui est le soin]. [Molière, L'école des maris]

REMARQUE

Ajoutez :

17. À la règle qui veut qu'on dise, par exemple, de bons soldats, et non des bons soldats (voy. la Rem. 2), citons comme exception difficile à imiter, mais qui du moins doit être notée, ce vers de Racine : Qui sait si.... Ce roi [Mithridate].... N'accuse point le ciel qui le laisse outrager, Et des indignes fils qui n'osent le venger ? [Racine, Mithridate] Notez encore et n'imitez pas : Ces sages Qui dans un noble exil sur des lointains rivages.... [Delille, Les jardins ou L'art d'embellir les paysages]

18. Il faut appeler l'attention sur l'emploi de de dans les exemples suivants : Je ne regarde pas tout ce qui me paraît de poli et de régulier. [Méré, t. II, p. 229] Rien ne me paraît de plus inhumain que de.... [Méré, Oeuvr. posthumes, p. 82] Laissant tout ce qui est de vrai, et chassant tout qu'il y a de faux. [Pascal, Pensées] Ce qui est de merveilleux est qu'il n'y en a point de laides [de femmes] dans toute l'île [Majorque]. [Retz, Mémoires] Ce qui est de plus admirable, c'est qu'au milieu de tant de faiblesse... [Bossuet, Panégyrique] Rapprochez ces exemples des exemples analogues qui sont cités à la fin du n° 7. Cet emploi de de, plus restreint aujourd'hui, est un véritable emploi partitif. Laissant tout ce qui est de vrai, de Pascal, est équivalent à : laissant tout ce qui est parmi le vrai. Nous dirions de préférence aujourd'hui : laissant tout ce qui est vrai ; mais la phrase ancienne est plus expressive ; aussi cette tournure ne doit-elle pas être abandonnée.

19. Il est dit au n° 19 que de entre deux verbes a un sens équivalent à : de ce que, vu que, etc. Mais il est bien entendu qu'il en est de même avec les locutions composées qui remplacent un verbe. J'ai bonne opinion de lui de vous aimer. [Sévigné, 3 juillet 1675] C'est-à-dire : de ce qu'il vous aime.

20. De, précédé de celui ou celle remplaçant un substantif, a quelquefois le sens de : qui consiste à. Cette conduite va bien plus à.... que celle de suivre.... [Fénelon, Lett. spirit. CXXXVI] De tous mes châteaux en Espagne, il ne me reste que celui de chercher une occupation. [Rousseau, Les confessions]

21. J. J. Rousseau a dit : Il y a quelque chose de dur et d'injuste de compter pour rien ce que j'ai fait. [Rousseau, Correspondance] On dit plus ordinairement : à compter. Mais de compter est bon aussi.

22. Régnier a dit : On a prétention.... Me rendre.... Le ventre creux, Ép. III. De coup ou de poison il est permis changer. [Rousseau, Ép. II] La suppression de de est un archaïsme, qui est tombé en désuétude.

23. On sait que, dans l'ancienne langue, le complément du comparatif se rendait non par que, mais par de. En voici un exemple dans un texte latin du IXe siècle : Accentus est anima verborum sive vox syllabae, quae in sermone plus sonat de ceteris syllabis. Revue critique, 8 février 1873, p. 87]

24. Voir pour l'emploi de de comme particule nobiliaire, le mot NOBILIAIRE.

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