Voir les citations avec "mot"

mot

nm (mo ; on prononçait mo au XVIe siècle, PALSGRAVE, p. 24, et non pas mot' ; le t se lie dans la prononciation soutenue : un mo-t ambigu ; dans la conversation, on ne le lie pas, excepté dans la locution : mot à mot ; quelques personnes font sentir le t, mot', quand mot finit une phrase ; cela n'est pas aujourd'hui de bon usage, bien qu'anciennement Régnier-Desmarais en ait fait une règle ; au pluriel, l's se lie : des mo-z ambigus ; mots rime, outre les terminaisons en ots, avec faux, repos, eaux, etc.)

Résumé

  • 1° Son monosyllabique ou polysyllabique, composé de plusieurs articulations, qui a un sens.
  • 2° Mot nouveau, mot propre, mot faible.
  • 3° Mots consacrés, sacramentels, factices, forgés.
  • 4° Gros mots, mots gras.
  • 5° Grands mots.
  • 6° Paroles.
  • 7° Ce qu'on écrit brièvement à quelqu'un.
  • 8° Les mots, par opposition aux choses.
  • 9° Sentence, apophthegme, dit notable, parole mémorable.
  • 10° Un bon mot.
  • 11° Mot fin.
  • 12° Fin mot.
  • 13° Mot trouvé.
  • 14° Mot pour rire.
  • 15° Prix que l'on demande ou que l'on offre d'une chose ; le dernier mot ; au bas mot ; prendre au mot.
  • 16° Le mot d'une énigme, d'une charade, d'un logogriphe,
  • 17° Le mot dans une devise.
  • 18° Mot d'ordre.
  • 19° En un mot ; en deux mots ; en peu de mots.
  • 20° Mot à mot ; le mot à mot.
  • 21° De mot à mot.
  • 22° À ces mots.
  • 23° À demi-mot ; le demi-mot.
  • 24° À mots couverts.
  • 25° Dans l'ancienne poésie française, vers qui se répétait dans toutes les stances d'un poëme.
  • 26° En vénerie, sonner un ou deux mots.
  • 1Son monosyllabique ou polysyllabique, composé de plusieurs articulations, qui a un sens. Vous vous souvenez du vieux pédagogue de la cour, et qu'on appelait autrefois le tyran des mots et des syllabes [Malherbe]. [Guez de Balzac, Socrate chrétien] Cependant leur savoir ne s'étend seulement Qu'à regratter un mot douteux au jugement. [Régnier, Satires] J'ai une certaine tendresse pour tous ces beaux mots que je vois ainsi mourir, opprimés par la tyrannie de l'usage qui ne nous en donne point d'autres en leur place. [Vaugelas, Remarques sur la langue française] Je me souviens de cette belle différence qu'il y a entre les personnes et les mots, qui est que, quand une personne est accusée et que l'on doute de son innocence, on doit aller à l'absolution ; mais, quand on doute de la bonté d'un mot, il faut au contraire le condamner et se porter à la rigueur. [Vaugelas, ib. t. II, p. 917] Une oreille un peu délicate pâtit furieusement à entendre prononcer ces mots-là. [Molière, Les précieuses ridicules] Et Malherbe et Balzao, si savants en beaux mots. [Molière, Les femmes savantes] Quand, dans un discours, se trouvent des mots répétés, et qu'essayant de les corriger, on les trouve si propres, qu'on gâterait le discours, il les faut laisser. [Pascal, Pensées] Il y en a qui vont jusqu'à cette absurdité d'expliquer un mot par le mot même ; j'en sais qui ont défini la lumière en cette façon : la lumière est un mouvement luminaire.... on voit assez de là qu'il y a des mots incapables d'être définis. [Pascal, De l'esprit géométrique] Ces mots primitifs, espace, temps, mouvement... [Pascal, ib.] ... L'imagination que l'on prend que les bonnes choses [des sciences] sont inaccessibles, en leur donnant le nom de grandes, hautes, élevées, sublimes.... je voudrais les nommer basses, communes, familières ; ces noms-là leur conviennent mieux, je hais les mots d'enflure. [Id. ib. II] Quelle facilité, quelle éloquence [dans une lettre] ! avec quel respect tous les mots viennent s'offrir à vous et à l'arrangement que vous en faites ! [Sévigné, 24 mai 1690] Il ne faut jamais disputer des mots, mais tâcher de les entendre. [Bossuet, Instructions sur les états d'oraison] On vit redoubler sa valeur ; n'entendez pas par ce mot une hardiesse vaine, indiscrète, emportée. [Fléchier, Oraisons funèbres] Quand la Toute-Puissance D'un mot forma le ciel, l'air, la terre et les flots. [Boileau, Satires] Ce n'est pas quelquefois qu'une muse un peu fine Sur un mot en passant ne joue et ne badine. [Boileau, L'art poétique] Ainsi, recommençant un ouvrage vingt fois, Si j'écris quatre mots, j'en effacerai trois. [Boileau, Satires] Il est un heureux choix de mots harmonieux ; Fuyez des mauvais sons le concours odieux. [Boileau, L'art poétique] Mais mon esprit, tremblant sur le choix de ses mots, N'en dira jamais un s'il ne tombe à propos. [Boileau, Satires] Et sur le ton grondeur lorsqu'elle les harangue [ses domestiques], Il faut voir de quels mots elle enrichit la langue. [Boileau, ib. X] Enfin Malherbe vint.... D'un mot mis en sa place enseigna le pouvoir. [Boileau, L'art poétique] Tantôt, cherchant la fin d'un vers que je construi, Je trouve au coin d'un bois le mot qui m'avait fui. [Boileau, Epîtres] Et, sans dire un seul mot, j'avalais au hasard Quelque aile de poulet.... [Boileau, Satires] Ils me font dire aussi des mots longs d'une toise. [Racine, Les plaideurs] Josabet livrerait même sa propre vie, S'il fallait que sa vie, à sa sincérité, Coûtât le moindre mot contre la vérité. [Racine, Athalie] D'un mot ou d'un regard je puis le secourir. [Racine, Bajazet] Marot, par son tour et par son style, semble avoir écrit depuis Ronsard ; il n'y a guère entre ce premier et nous que la différence de quelques mots. [La Bruyère, I] Combien de ces mots aventuriers qui paraissent subitement, durent un temps, et que bientôt on ne revoit plus ! [La Bruyère, V] Il n'appartient qu'à elles [les femmes] de faire lire dans un mot tout un sentiment, et de rendre délicatement une pensée qui est délicate. [La Bruyère, I] Chaque mot dans mon coeur enfonce le poignard. [Voltaire, Alzire, ou Les américains] Citer les meilleurs auteurs qui ont fait usage de ce mot, faire voir le plus ou moins d'étendue qu'ils lui ont donné, remarquer s'il est plus propre à la poésie qu'à la prose. [Voltaire, Dictionnaire philosophique] Quelle perte pour ceux d'entre nos écrivains qui ont l'imagination forte, que celle de tant de mots que nous revoyons avec plaisir dans Amyot et dans Montaigne ! [Diderot, Lettre sur les sourds et muets à l'usage de ceux qui entendent et qui parlent] Un seul mot renferme souvent une collection d'idées : tels sont les termes d'esprit et de coeur. [Duclos, Consid. moeurs, ch. 11] Les mots sont des termes moyens entre les idées et les objets ; l'idée doit produire le mot, et le mot doit rappeler l'idée ; mais le sens des mots n'est pas toujours tellement déterminé qu'il amène cet effet. [Sennebier, Ess. sur l'art d'observ. t. II, p. 45, dans POUGENS] Mais l'abus.... sottise que ce mot ; ceux qui l'ont inventé, ce sont eux qui vraiment abusent de la presse. [Courier, Pamphlets] Ce pamphlétaire [P. L. Courier], qui ne se gênait d'aucune vérité périlleuse à dire, hésitait sur un mot, sur une virgule, se montrait timide à toute façon de parler qui n'était pas de la langue de ses auteurs. [Carrel, Oeuvr. t. V, p. 211]

    Fig. Là [sur la falaise], tout est comme un rêve, Chaque voix a des mots, Tout parle.... [Hugo, Odes et ballades]

    Familièrement. Traîner ses mots, parler très lentement.

    Compter ses mots, parler avec lenteur et avec affectation.

    Manger ses mots, voir MANGER.

    Absolument. Pas un mot, c'est-à-dire silence complet. Croyant que Milord l'avait oublié, je lui en parle avant de nous mettre à table ; pas un mot comme auparavant. [Rousseau, Les confessions]

    Fig. N'entendre pas un mot de quelque chose, y être tout à fait ignorant, étranger. Il n'entend pas un mot de finances. [Voiture, Lettres]

    On dit dans le même sens : il n'en sait pas un mot, il n'en sait pas le plus petit mot. Elle ne sait pas le plus petit mot de tout ceci. [Genlis, théât. d'éduc. la Cloison, sc. 1]

    Dire les mots et les paroles, dire crûment une chose qui aurait besoin d'être adoucie par l'expression.

    Un mot à deux ententes, à double entente, à double sens, mot susceptible de deux interprétations.

    On dit aussi : mot équivoque, mot ambigu. Vos mines et vos cris aux ombres d'indécence Que d'un mot ambigu peut avoir l'innocence. [Molière, Le misanthrope]

    Il n'y a pas le mot de vrai, un mot de vrai dans ce qu'on vous a rapporté, c'est-à-dire tout y est faux, controuvé. Il n'y a pas le mot de vrai de tout ce que vous imaginez là. [Goldoni, Bourru bienfais. II, 3]

    Un mot pour l'autre, mot dit ou écrit en place du mot qu'il faudrait. On nous a pour la vie Chassés de vingt maisons. - Chassés ! quelle folie ! - Oh ! c'est un mot pour l'autre, et puisqu'il faut choisir, Point chassés, mais priés de ne plus revenir. [Gresset, Le méchant]

  • 2Mot nouveau, mot qui n'existait pas dans la langue, et que l'on crée pour une raison quelconque. Si est-ce que, lorsqu'il est question de faire un mot nouveau dont il semble que l'on ne peut se passer, comme est celui d'exactitude, la première chose à quoi il faut prendre garde, est qu'il ne soit point équivoque ; car dès là faites état qu'il ne sera jamais bien reçu. [Vaugelas, Remarques sur la langue française] L'on écrit régulièrement depuis vingt années ; l'on est esclave de la construction ; l'on a enrichi la langue de nouveaux mots. [La Bruyère, I] Il ne s'y trouve pas [dans Racine] un mot nouveau, c'est-à-dire pas un de ces mots qui se faisaient de son temps, comme il s'en est toujours fait et comme il s'en fera toujours. [D'olivet, Rem. Racine, § 13] N'employez jamais un mot nouveau, à moins qu'il n'ait ces trois qualités : être nécessaire, intelligible et sonore. [Voltaire, Conseils à un journ.]

    Mot propre, mot qui exprime avec plus de justesse et d'exactitude que tout autre l'idée qu'on veut faire entendre. La haine, qui s'efforce de paraître impartiale, n'a jamais pour la louange le mot propre, parce qu'elle ne cherche que des termes qui puissent affaiblir la vérité qu'elle exprime à regret. [Genlis, Mme de Maintenon, t. I, p. 237, dans POUGENS]

    On dit par opposition : mot impropre.

    Mot faible, celui qui n'exprime l'idée qu'imparfaitement.

  • 3Mots consacrés, mots qui sont tellement propres et usités pour signifier certaines choses, qu'on ne peut se servir d'un autre mot sans parler improprement.

    Mots sacramentels ou sacramentaux, mots qui appartiennent à un sacrement.Par extension, mots sacramentels, ceux qui sont essentiels à la validité d'un acte, d'une convention.

    Mot factice ou fictif, mot qui n'existe pas réellement, mais qui est fait suivant les analogies de la langue.

    Mot forgé, mot créé par plaisanterie, d'après quelque circonstance ou quelque nom. Tartufiée est un mot forgé.

    Mot hybride, voir HYBRIDE.

    Mot artificiel, mot sans signification, mais composé de telles lettres ou syllabes qu'il sert à rappeler certains objets et à aider la mémoire. Barbara dans la logique est un mot artificiel qui désigne un syllogisme dont les trois propositions sont universelles affirmatives.

  • 4 Familièrement. Gros mots, jurements. Sortez, m'a-t-il dit, petit.... je n'ose pas prononcer devant une femme le gros mot qu'il a dit. [Beaumarchais, Le mariage de Figaro, ou La folle journée]

    Gros mots, menaces, paroles offensantes. L'évêque de Rouen essuya les plus gros mots, dont la reine est prodigue dans sa colère. [Voyer D'argenson, Mém. p. 390, dans POUGENS]

    Voir aussi GROS, au n° 12.

    L'Académie donne : il a dit de gros mots et des gros mots ; c'est la même observation que pour de bons mots ou des bons mots, voy. BON, Rem. 4.

    Populairement. Avoir des mots, échanger des reproches.

    Mots gras, mots qui contiennent quelque impureté, et qu'on ne doit point dire en honnête compagnie et surtout devant des femmes.

    Mots de gueule, voir GUEULE, au n° 3.

  • 5Grands mots, paroles ampoulées. Il [Ronsard] vit... Tomber de ses grands mots le faste pédantesque. [Boileau, L'art poétique] Tout beau, dira quelqu'un, vous entrez en furie ; à quoi bon ces grands mots ?.... [Boileau, Satires] Les pédants.... ne la distinguent pas [l'éloquence] de l'entassement des figures, de l'usage des grands mots et de la rondeur des périodes. [La Bruyère, I]

    Grands mots, expressions scientifiques employées hors de propos (voir GRAND, n° 8). ... La métaphore et la métonymie, Grands mots que Pradon croit des termes de chimie. [Boileau, Epîtres]

    Un grand mot, une parole de grande importance. Ô l'heureuse nouvelle, Le grand mot qu'on m'a dit ! nous irons, peuple aimé, Nous entrerons, troupe fidèle Dans la maison du Dieu qui seul a tout formé. [Corneille, Trad. du psaume CXXI]

    Familièrement. Le grand mot est lâché, le mot qu'on retenait est enfin prononcé.

  • 6Paroles, et, particulièrement, peu de paroles. Dites-lui un mot en ma faveur. Il n'a pas pu placer un mot dans la conversation. Un mot ne fait pas voir jusques au fond d'une âme. [Corneille, Rodogune, princesse des Parthes] Faute d'un mot d'aveu dont il n'ose douter. [Corneille, Sophonisbe] Ils ne m'ont jamais dit un mot de leur amour. [Molière, Les femmes savantes] Mais disons donc un pauvre mot de ma fille. [Sévigné, 43] Il n'a pas trouvé le moment de dire un mot en faveur de mon fils. [Sévigné, 583] J'ai dit aussi que je croyais qu'il faudrait, quand il sera tout à fait résolu, en dire un petit mot au roi ; je voudrais que ce mot passât par vous. [Maintenon, Lettres] Le prélat.... Leur confie en ces mots sa trop juste douleur. [Boileau, Le lutrin] Dès le premier mot ma langue embarrassée Dans ma bouche vingt fois a demeuré glacée. [Racine, Bérénice] Souvent d'un grand dessein un mot nous fait juger. [Racine, Athalie] Seigneur, dites un mot, et vous nous sauvez tous. [Racine, Bajazet] Une audience destinée à rendre sommaire justice au peuple, aux artisans et aux petites affaires qui n'ont qu'un mot. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon] Léonor, qui était à la porte de sa chambre, ne perdait pas un mot de ce que l'on disait. [Lesage, Le diable boiteux] Jamais un mot d'amour n'est sorti de sa bouche. [Lamotte, Inès de Castro, I, 3] Si M. le maréchal de Richelieu était à Versailles, il pourrait lui en dire quelques mots, c'est-à-dire, en faire quelques plaisanteries, tourner mon entreprise en ridicule, se bien moquer de moi et de ma colonie. [Voltaire, Correspondance] Ces raisons seront bien moins fortes qu'un mot de votre bouche, et je vous supplie d'avoir la bonté de dire ce mot à un prince qui ne se fait pas prier quand il s'agit de faire des heureux. [Voltaire, Correspondance] Et de son plein savoir, si je réplique un mot, Pour prouver que j'ai tort, il me déclare un sot. [Gilbert, Le XVIIIe siècle] C'est un mérite non commun, ni facile, de clore en peu de mots beaucoup de sens. [Courier, Pamphlets]

    Toucher un mot de, recommander une affaire, une personne.

    Elliptiquement, un mot, se dit pour touchez un mot, recommandez. Cependant, s'il est vrai que mon service plaise, Sire, un bon mot de grâce au père de la Chaise [qui avait la feuille des bénéfices]. [Corneille, Au roi, 1676]

    Si je n'en disais mot, je n'en pensais pas moins, c'est-à-dire tout en me taisant je n'en gardais pas moins ma pensée (voir DIRE, n° 28). Si je n'en disais mot, je n'en pensais pas moins. [Régnier, Satires]

    N'avoir pas le mot à dire, le plus petit mot à dire, être sans aucun droit pour élever des objections. Elle est, je vous assure, bien mortifiée et bien décontenancée ; je la vis l'autre jour, elle n'a pas le mot à dire. [Sévigné, 23] Je n'ai pas le mot dire à tout le premier article de votre lettre. [Sévigné, 27 juin 1679] Tout cela fut traité avec une justesse, une droiture, une vérité, que les plus grands critiques n'auraient pas eu le mot à dire. [Sévigné, 5 mars 1683] Il n'y a pas le plus petit mot à dire à cela. [Marivaux, Les serments indiscrets]

    N'être pas à un mot, ne pas se laisser imposer silence. M. de Rohan n'était pas à un mot, ni aisé à persuader. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon]

    Avoir le dernier mot, l'emporter dans une discussion, faire taire son adversaire. Oh ! puisque vous le prenez par là, vous n'aurez pas le dernier mot. [Fénelon, t. XIX, p. 341]

    Au premier mot, à la première parole qui se dit de quelque chose, dès qu'on peut comprendre ce dont il s'agit. Un noble coeur au premier mot doit prendre son parti. [Molière, Dom Juan, ou le Festin de Pierre] J'ai lu votre lettre au roi, qui l'a entendue au premier mot. [Maintenon, Lettres]

    Il faut que tout passe à son mot, il faut que tout se fasse comme il l'entend. Mais que peut-on espérer, quand un homme, et encore un homme qui n'a pas plus d'autorité ni peut-être plus de savoir que les autres, ne veut rien entendre, et qu'il faut que tout passe à son mot ? [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes]

    Dire deux mots, tenir quelque discours très court. Mais, de grâce encor, sire, Deux mots en sa défense. [Corneille, Le Cid] Et j'ai deux mots à vous dire De la part de Jupiter. [Molière, L'amphytrion]

    Dire deux mots de, s'occuper de l'affaire dont il s'agit. L'autre reprit : il vous faut un remède, Demain matin, nous en dirons deux mots. [La Fontaine, Remède.] Il est là dedans qui lui en dit deux mots. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont]

    Par forme de menace. Nous en dirons deux mots quand vous voudrez, nous viderons notre querelle quand il vous plaira.

    On dit dans le même sens : J'ai à me plaindre de lui, je lui en dirai deux mots.

    Par forme de provocation, quand on veut avoir une explication avec quelqu'un. À moi, comte, deux mots. [Corneille, Le Cid]

    Par extension et par plaisanterie. Disons deux mots à cette bouteille de bourgogne, à ce pâté, entamons cette bouteille, ce pâté.

    Dire son mot, parler à propos, donner son avis, prendre part à la conversation. Chacun lui dit son mot cette fois-là. [La Fontaine, Papef.] Vous faites un dialogue, chacun y dit son mot très plaisamment. [Sévigné, 97] S'il faut absolument que je dise mon mot, je commencerais par la douceur. [Maintenon, Lettres] Sur l'Oedipe nouveau de cette énigme obscure [l'univers], Chacun a dit mot. [Voltaire, Disc. 6]

    Vous m'en direz quelques mots, c'est-à-dire vous apprécierez combien cela est bon, utile, etc. Tu m'en diras quelques mots dans deux jours. [La Fontaine, Troq.]

    Ne dire mot, ne répondre mot, ne point parler, ne point répondre. Celle qui n'a dit mot, Monsieur, c'est la plus belle ou je ne suis qu'un sot. [Corneille, Le menteur] Et vous ne dites mot à ces indignités. [Molière, Le dépit amoureux] Comme il ne répondit mot, je dis.... [Pascal, Les provinciales] Le bruit est pour le fat, les plaintes pour le sot ; L'honnête homme trompé s'éloigne et ne dit mot. [Lanoue, la Coquette corrigée, I, 3] Il écoutait tout et ne disait mot. [Bernardin de Saint-pierre, Café de Surate.]

    On dit dans un sens analogue : ne sonner mot, ne souffler mot. Ne soufflez mot, retenez votre haleine ; Tremblez, enfants, vous qui jurez parfois. [Béranger, Préf.]

    Trancher le mot, dire tout net, ne point pallier son discours, s'exprimer sans feinte, donner une réponse décisive. Avoir prédit, tranchant le mot, Qu'il ne serait jamais qu'un sot. [Scarron, Virgile travesti]

    Un mot, deux mots, s'il vous plaît, se dit familièrement pour appeler quelqu'un quand on a à lui parler. De grâce, un mot, mon frère. [Molière, Tartuffe, ou l'imposteur]

  • 7Ce qu'on écrit brièvement à quelqu'un. Je lui en écrirai un mot. Dites-moi quelque petit mot de ma tante. [Sévigné, 114] Un mot de notre voyage, ma chère enfant. [Sévigné, 543] Il serait à désirer que tous ceux qui prennent le parti de sortir de la vie laissassent par écrit leurs raisons, avec un petit mot de leur philosophie ; cela ne serait pas inutile aux vivants et à l'histoire de l'esprit humain. [Voltaire, Olympie, Note.] Il n'y avait pas un mot de tout cela dans votre livre, mon cher oncle. [Voltaire, l'Ingénu, 5] Garder dans son coeur de jeune homme Un nom mystérieux que jamais on ne nomme, Glisser un mot furtif dans une tendre main. [Hugo, Les feuilles d'automne]
  • 8Les mots, par opposition aux choses. Si quelqu'un, plein de pensées plus hautes, prétend ici plus superbement mépriser toute cette étude des mots et du langage.... [Pellisson, Histoire de l'Académie française] Un jeune Grec employait à l'étude des choses les précieuses années qu'un jeune Français consacre à l'étude des mots. [D'olivet, Hist. Acad. t. II, p. 163, dans POUGENS]

    Ce sont des mots, ce ne sont que des mots, c'est-à-dire ces paroles sont vides de sens ; et aussi ces paroles ne seront suivies d'aucun effet.Un mot d'écrit, un billet court. N'ayant reçu des recommandations que de deux ou trois personnes, je me plaignais en général de toutes les autres, de qui je n'avais pas ouï un mot depuis que je suis ici. [Voiture, Lettres] Celui qui l'a fait [un sonnet] devait bien connaître l'humeur de la personne [une dame] à qui il écrivait, puisqu'ayant perdu un amant, il ne lui en dit pas un mot de consolation. [Voiture, ib.] Que dites-vous du tour, et de ce mot d'écrit ? [Molière, L'école des femmes]

    On dit dans le même sens : un mot, deux mots. Donnez-moi un mot, donnez-moi deux mots de votre main. Tenez, voyez ce mot, et sortez hors de doute ; Lisez-le donc tout haut. [Molière, Le dépit amoureux]

  • 9Sentence, apophthegme, dit notable, parole mémorable. Le docte saint Jean Chrysostome a renfermé en un petit mot une sentence remarquable, quand il a dit.... [Bossuet, Sermons] Saint Grégoire de Nazianze a dit ce beau mot du grand saint Basile : Il était prêtre, dit-il, avant même que d'être prêtre. [Bossuet, Oraisons funèbres] Ces mots heureux qu'une approbation universelle transmet à la postérité. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] Après avoir supputé longtemps sa dépense et ses forces, selon le mot de l'Évangile, elle en demeure là et ne jette pas même les premiers fondements de l'édifice. [Massillon, Carême, Enf. prod.] Savez-vous bien que Pythagore, qui n'était pas un sot, et qui a mis toute sa philosophie en logogriphes, dit dans un de ses préceptes : Ne mangez pas votre coeur. C'est un grand mot. [Voltaire, Correspondance]

    Il se dit aussi de pensées moins importantes. Il lui échappe des mots fort heureux. Et tel mot, pour avoir réjoui le lecteur, A coûté bien souvent des larmes à l'auteur. [Boileau, Satires] Et dès qu'un mot plaisant vient luire à mon esprit, Je n'ai point de repos qu'il ne soit en écrit. [Boileau, ib.]

    Mot d'Évangile, voir ÉVANGILE.

  • 10Un bon mot, une parole pleine de sens, de force (sens peu usité). [Montaigne] s'arrête à faire entendre qu'il ne faut pas juger de la capacité d'un homme par l'excellence d'un bon mot qu'on lui entend dire. [Pascal, De l'esprit géométrique]

    Plus ordinairement, chose dite avec esprit. Un jeune frisé.... Me vint prendre et me dit, pensant dire un bon mot : Pour un poëte du temps, vous êtes trop dévot. [Régnier, Satires] Dieu ne créa que pour les sots Les méchants diseurs de bons mots. [La Fontaine, Fables] Et dans tous ses propos On voit qu'il se travaille à dire de bons mots. [Molière, Le misanthrope] Diseur de bons mots, mauvais caractère. [Pascal, Pensées] Diseur de bons mots, mauvais caractère : je le dirais, s'il n'avait été dit. [La Bruyère, VIII] M. de Pompone m'a mandé qu'il me priait d'écrire tous les bons mots de Mme Cornuel. [Sévigné, 271] Les uns.... d'autres.... j'en vois qui sont sans cesse à étudier de bons mots, pour avoir l'applaudissement du beau monde. [Bossuet, Sermons] Un jeune fou qui se croit tout permis, Et qui pour un bon mot va perdre vingt amis. [Boileau, Satires] Ils blanchissent auprès d'eux [les rois] dans la pratique des bons mots, qui leur tiennent lieu d'exploits ; mais ils s'attirent, à force d'être plaisants, des emplois graves. [Boileau, ib. X] Personne, après Mme Cornuel, n'a plus dit de bons mots que Mme de Coulanges. [Mme de Caylus, Souvenirs, p. 127, dans POUGENS] Les bons mots sont des hasards, et les agréments sont des titres. [Voisenon, Sultan Misapouf, Oeuv. t. V, p. 58, dans POUGENS] Cacambo expliquait les bons mots du roi à Candide, et, quoique traduits, ils paraissaient toujours des bons mots ; de tout ce qui étonnait Candide, ce n'était pas ce qui l'étonnait le moins. [Voltaire, Candide, ou L'optimiste] Par des bons mots, qui piquent et qu'on aime, Si naturels que l'on croirait soi-même Les avoir dits. [Voltaire, Ce qui plaît, etc.] Je vous réponds que, si le roi a autant de millions que l'abbé de Voisenon dit de bons mots, il est plus riche que les empereurs de la Chine et des Indes. [Voltaire, Correspondance] J'ai rencontré souvent de ces gens à bons mots, De ces hommes charmants qui n'étaient que des sots. [Gresset, Le méchant] Et faisait jaillir à propos Le feu de la saillie et l'éclair des bons mots. [Delille, La conversation] .... Un flacon délectable Verse avec son nectar les aimables propos, Et, comme son bouchon, fait partir les bons mots. [Delille, L'homme des champs, ou Les Géorgiques françaises]

    Absolument. Des mots, de bons mots, des traits d'esprit Est-ce bien là l'emploi qu'un bon esprit doit prendre ? L'orateur des foyers et des mauvais propos ? Quels titres sont les siens ? l'insolence et des mots. [Gresset, Le méchant] Né avec le talent de la plaisanterie, ses mots étaient souvent répétés. [Condorcet, Vie de Volt.]

    On dit maintenant en ce sens : faire des mots.

  • 11Mot fin, expression dont la force ou l'esprit ne paraît qu'après qu'on y a réfléchi.
  • 12 Fig. Le fin mot, ce qu'il y a de secret, d'important dans une affaire.

    Je n'entends pas le fin mot de tout cela, je ne comprends pas ce qu'on veut, à quoi tendent tous ces discours et cette conduite singulière.

    Dire le fin mot, manifester entièrement son projet, ses vues.

  • 13Mot trouvé, mot si heureux ou si heureusement placé, qu'il semble le résultat d'une trouvaille, non d'un effort de l'esprit. Qui pense finement et s'exprime avec grâce Fait tout passer ; car tout passe ; Je l'ai cent fois éprouvé, Quand le mot est bien trouvé. [La Fontaine, Tabl.] Voilà ce que Boileau appelle des mots trouvés. [Voltaire, Dictionnaire philosophique]
  • 14 Familièrement. Mot pour rire, ce que l'on dit en plaisantant pour amuser les autres. Eh bien, il parle livre ; il a le mot pour rire. [Régnier, Satires] Le bon Picard a donc le petit mot pour rire ! [Collin D'harleville, Optimiste, I, 9]

    Il n'y a pas le mot pour rire, se dit lorsqu'un homme, voulant être plaisant, ne l'est pas du tout. Il n'y a pas le mot pour rire à ce qu'il dit. Où est là le mot pour rire ?

    Je ne sais où est le mot pour rire dans cette affaire, se dit d'une affaire qui a mal réussi, qui est fort désagréable.

    Il n'y a pas là le mot pour rire, le plus petit mot pour rire, la chose dont on parle ne doit pas être tournée en plaisanterie.

  • 15Prix que l'on demande ou que l'on offre d'une chose. Je n'en rabattrai rien ; je n'ai pas deux mots. Je priai Jolet de faire le marché au mot du père [au prix que le père avait marqué], et que je donnerais le surplus. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon]

    Le premier mot, le premier prix, celui sur lequel il est possible que l'on fasse quelque diminution ou quelque augmentation.

    Le dernier mot, le dernier prix que l'on offre ou que l'on accepte. Allons, ton dernier mot, bonhomme, et prends-y garde. - Faut-il vous parler clair ? - Oui. - C'est que je le garde [mon moulin] ; Voilà mon dernier mot. [Andrieux, le Meunier de Sans-Souci]

    Fig. Il se dit, dans toute discussion, de ce qui est la détermination dernière. Fort bien ! C'est votre dernier mot ? et moi voici le mien. [Collin D'harleville, Le vieux célibataire]

    Au bas mot, en évaluant la chose au plus petit prix.

    Prendre au mot, accepter sur-le-champ les offres, les propositions qui sont faites, et, en général, les dires de quelqu'un. On prend soudain au mot les hommes de sa sorte. [Corneille, Mélite] Maître AEéas au mot le prit, Et fit compliment au poëte. [Scarron, Virgile travesti] Vous êtes bientôt prise au mot, ma fille. [Bossuet, Lett. Cornuau, 77] Sans s'imaginer qu'elle dût le prendre au mot. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] J'aurais été le plus puni, si l'on m'eût pris au mot. [Marivaux, Le paysan parvenu] Quelque permission qu'ils [les grands] semblent nous donner d'oublier leur rang, il ne faut jamais les prendre au mot. [Diderot, Principes de polit. 32]

    Lâcher le mot, voir LÂCHER, n° 10.

  • 16Le mot d'une énigme, d'une charade, d'un logogriphe, le mot qu'on propose à deviner dans une énigme, dans un logogriphe, etc.

    Fig. C'est une énigme dont chacun a cherché le mot depuis Pythagore. [Voltaire, âme, 14] Il est nécessaire de vous expliquer cette énigme ; en voici le mot.... [Genlis, Adèle et Théod. t. I, p. 273, dans POUGENS]

    Fig. Le mot de la situation, ce qui l'explique.

    Fig. Chercher le mot, avoir le mot d'une chose, en chercher, en avoir trouvé l'explication. J'ai vainement cherche le mot de l'univers. [Lamartine, Méditations poétiques]

    Vous dites là le mot, ce que vous dites éclaircit la difficulté, est décisif. Le gouvernement deviendra toujours corrupteur, quand, par sa nature, il sera corrompu ; voilà le mot. [Raynal, Histoire philosophique et politiques des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes]

  • 17Mot, dans une devise, signifie les paroles de la devise.

    Il se dit également d'un mot ou d'une phrase courte que quelques maisons illustres placent dans leurs armoiries.

  • 18 Terme de guerre. Mot d'ordre, sorte de reconnaissance donnée par un chef à ceux qui sont sous ses ordres pour qu'ils puissent se reconnaître, et qui est composée de deux mots : l'un, mot d'ordre proprement dit, est celui de la demande ; l'autre, mot de ralliement, est celui de la réponse. Donner le mot, prendre le mot, porter le mot. Quand un poste reconnaît une patrouille, il en reçoit le mot d'ordre, et donne celui de ralliement. Quand une patrouille rencontre une ronde, elle lui donne les deux mots d'ordre. Il est arrivé à Brest une contestation entre le sieur chevalier de Chasteaurenaut et le sieur comte de Sourdis, chefs d'escadre, sur le commandement dans ledit port, ce dernier ayant prétendu donner le mot, quoique moins ancien... Seignelay à Demuin, 1681, dans JAL] Les mots de ralliement ! - Dieu, Charle et Médicis. [Chénier M. J. Charles IX, II, 4]

    On disait autrefois dans le même sens : le mot du guet. Son fils avait donné pour mot du guet : la meilleure des mères. [Diderot, Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur les moeurs et les écrits de Sénèque]

    Le mot de passe, le mot qu'il faut dire pour qu'on vous laisse passer par un endroit gardé.

    Fig. Prendre le mot de, subir les ordres de... Il dit, et croit bien dire, parlant de moi, le loustic du parti national, et fait là une faute, sans s'en douter, le bonhomme ; le mot est étranger ; lorsque l'on prend le mot des puissances étrangères, il ne faut pas le changer. [Courier, Lettres de France et d'Italie] Fig. Avoir le mot, être averti de ce qu'il convient de faire ou de dire dans certaines circonstances. Elle aura beau s'en plaindre ; Le concierge a le mot, vous n'avez rien à craindre. [Corneille Th. Le galant doublé] Le roi, qui avait le mot, avait étalé tous ses trésors. [Voltaire, Zadig, ou La destinée] M. d'Orbe a le mot pour entamer une savante dissertation. [Rousseau, Julie, ou la Nouvelle Héloïse]

    Dans un sens analogue, donner le mot, indiquer ce qu'il faut dire ou faire. Janot, à qui Richard avait donné le mot. [La Fontaine, Rich.] La voilà qui donne le mot à toute cette société de gens de bien, afin qu'ils concourent avec elle au succès de son entreprise. [Marivaux, La Vie de Marianne, ou les aventures de Madame la comtesse de ***]

    Fig. Se donner le mot du guet, se dire le mot, se donner le mot, c'est-à-dire être de concert, d'intelligence ensemble. Comme si toutes deux s'étaient donné le mot. [La Fontaine, Tabl.] Si nous pouvions nous donner le mot de devenir sages. [La Bruyère, XII] Toutes les nations ont dansé autrefois à la nouvelle lune ; s'étaient-elles donné le mot ? non, pas plus que pour se réjouir à la naissance de son fils. [Voltaire, Dictionnaire philosophique] Aucun n'est parti, et ils se sont tous donné le mot de ne pas quitter. Correspond. de Klinglin, t. I, p. 127]

  • 19En un mot, bref, enfin. En un mot, il faut vivre de manière que nous mourions à l'usage même de la vie. [Bossuet, Sermons] Elle flotte, elle hésite, en un mot elle est femme. [Racine, Athalie]

    En un mot, en une seule parole, en quelques paroles. En un mot, je n'en ferai rien. Pour répondre en un mot à toutes vos raisons, je vous dis que je n'y irai pas.

    En deux mots, en trois mots, même sens. Voilà précisément mon histoire en trois mots. [Destouches, le Philosophe marié, I, 4] Nicomède, en deux mots, ce désordre me fâche. [Corneille, Nicomède] Admirable portrait des gens du siècle, exprimé en deux mots par ce saint docteur. [Bourdaloue, 4e dim. après Pâq. Dominic. t. II, p. 145]

    En peu de mots, brièvement. ....Qu'il n'est point de coupable en repos ; C'est ce qu'il faut ici montrer en peu de mots. [Boileau, Epîtres]

    Familièrement. Autant en un mot qu'en cent, qu'en mille ; en un mot comme en cent, comme en mille, façons de parler par lesquelles on exprime sa dernière résolution. En un mot comme en cent, je ne puis faire mieux. [Boursault, Fables d'Ésope, V, I] En un mot comme en mille, tournez tant qu'il vous plaira, il n'y a rien de tel que d'être sage. [Marivaux, La Vie de Marianne, ou les aventures de Madame la comtesse de ***]

  • 20Mot à mot, mot pour mot, sans aucun changement ni dans les mots ni dans leur ordre. Rappelle tous tes sens, rentre bien dans ton âme, Et réponds mot pour mot à chaque question. [Molière, L'amphytrion] Lessius que le père Héreau suit mot à mot. [Pascal, Les provinciales] Elle me conta mot à mot une conversation qu'elle avait eue avec le roi. [Sévigné, 12] C'est en vain qu'on écrirait mot pour mot ces narrations. [Hamilton, Mémoires du chevalier de Grammont] Il manquait d'intelligence et d'instruction, au point qu'il fallut lui expliquer son rôle en langage vulgaire et le lui montrer mot à mot comme à un enfant. [Marmontel, Mémoires d'un père pour servir à l'instruction de ses enfants]

    Cela est mot pour mot, mot à mot dans Montaigne, dans Bossuet, cela s'y trouve entièrement, identiquement. Pour savoir si elles [ces propositions] étaient mot à mot dans Jansénius ou non. [Pascal, Les provinciales] Croirait-on que le jugement de Sancho dans l'île de Barataria est tiré presque mot à mot d'un recueil de légendes écrites en latin par un Espagnol du XIIe siècle, et dont la bibliothèque du roi conserve le manuscrit ? [Saint-foix, Ess. Paris, Oeuv. t. IV, dans POUGENS] Cet homme [Bolingbroke], qui avait sans doute un beau génie, donna au célèbre Pope son plan du Tout est bien, qu'on retrouve en effet mot pour mot dans les oeuvres posthumes de milord Bolingbroke. [Voltaire, Dictionnaire philosophique]

    Dicter mot à mot, dicter un mot après l'autre, ne dicter qu'un mot à la fois.

    Traduire mot à mot, traduire un mot d'une langue en place d'un mot d'une autre langue, sans rien changer à l'ordre. Homère, ce poëte si sensé, si harmonieux, si sublime, devient puéril, insipide et d'une bassesse insupportable quand on entreprend de le traduire en latin mot à mot, comme saint Jérôme l'a sagement remarqué. [Rollin, Traité des Études]

    nm Le mot à mot, une traduction littérale. Faire le mot à mot.

  • 21De mot à mot, même sens. Voici donc de mot à mot comme on parla. [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes] Qui voudra faire un tissu de toute la doctrine de saint Augustin, n'a qu'à ramasser, de mot à mot seulement, ce qu'on trouve dans les endroits que ce Père a cités de saint Ambroise. [Bossuet, Déf. de la trad. et des saints Pères, VIII, 22]
  • 22À ces mots, loc. adv. usitée dans la narration, et signifiant après qu'il a été parlé ainsi. À ces mots.... reconnaissant ma faute. [Boileau, Satires]

    On dit dans un sens analogue : à ce mot. Dis-lui qu'avec douceur il traite sa captive ; Qu'il lui rende.... à ce mot, ce héros expiré.... [Racine, Phèdre]

  • 23À demi-mot, sans dire tout. S'expliquer à demi-mot.

    Entendre à demi-mot, comprendre promptement ce qu'une personne veut dire, dès qu'elle a commencé de parler. J'entends à demi-mot où va la raillerie. [Molière, Sganarelle, ou Le cocu imaginaire] Nous étions bien propres à vivre dans une même ville : nous nous entendons, ce me semble, à demi-mot. [Sévigné, à Bussy, 19 déc. 1670] On dirait que les coeurs qui s'aiment s'entendent à demi-mot. [Chateaubriand, Le génie du christianisme, ou Les beautés de la religion chrétienne]

    nm Le demi-mot, sorte de réticence par laquelle on fait entendre sa pensée sans l'exprimer nettement ; le demi-mot se rattache à l'euphémisme. Riotes entre amants sont jeux pour la plupart ; Vous les trouverez tous bâtis sur ce modèle ; Un mot les met au champ, demi-mot les rappelle. [La Fontaine, l'Eunuque, V, 2] Ce trait que vous lancez en passant, cette parole malicieuse, ce demi-mot qui donne tant à penser par son obscurité affectée. [Bossuet, Sermons]

    Au pl. Demi-mots, insinuations, ouvertures discrètes. D'Antin hasarda des demi-mots qui firent que le roi lui dit le mariage. [Saint-simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon] On sait comment il opinait : des demi-mots, des réticences, des phrases indécises ; du vague et de l'obscurité, ce fut tout ce que j'en tirai. [Marmontel, Mémoires d'un père pour servir à l'instruction de ses enfants]

  • 24À mots couverts, en employant des expressions qui voilent le sens de ce qu'on dit. D'après ce que tu m'en dis à mots couverts. [Mirab. Lett. orig. t. III, p. 539 dans POUGENS]
  • 25Mot se disait, dans l'ancienne poésie française, d'un vers qui se répétait dans toutes les stances d'un poëme ; ces stances s'appelaient gloses.
  • 26 En termes de vénerie, sonner un ou deux mots, faire entendre, avec le cor, une ou deux notes prolongées.

PROVERBES

Qui ne dit mot consent, en certains cas, se taire c'est consentir. Sotencourt : Hem ! vous ne dites mot. - Lisette, à part : Qui ne dit mot consent. [Regnard, Le bal]

Il n'y a qu'un mot qui serve, il faut parler franc et sans déguisement, et dire une parole sur quoi on puisse faire quelque fond. Écoutez ; il n'y a qu'un mot qui serve ; je n'entends pas que vous ayez d'autres noms. [Molière, Les précieuses ridicules]

Quand les mots sont dits, l'eau bénite est faite, quand on a conclu un marché, il faut l'exécuter.

REMARQUE

1. Après mot employé pour annoncer un substantif, adjectif, verbe, adverbe, préposition que l'on cite, on joint ce substantif, etc. à mot sans préposition : Dans le mot tempête la pénultième syllabe est longue, Dict. de l'Acad. au mot pénultième. On peut aussi intercaler la préposition de : Le mot de vertu emporte presque toujours l'idée d'effort fait sur soi-même, Dict. de l'Acad. emporter. User des mots de tu et de toi en parlant à quelqu'un, ib. tutoyer.

2. D'après Pautex, il vaut mieux mettre de en trois cas : 1° quand mot peut être remplacé par épithète : Le mot de gredin est injurieux ; 2° quand mot peut être remplacé par nom : Le mot de gazetier a été remplacé par le mot de journaliste ; 3° quand mot est équivalent à idée ou à quelque autre terme semblable : Le mot de mort est pénible à certaines personnes.

SYNONYME

1. MOT, TERME., À l'idée de mot, terme ajoute l'idée de convenance au sujet dont on parle : La pureté du langage dépend des mots ; la précision du langage dépend des termes.

2. MOT, PAROLE., Les paroles sont le son émis comme exprimant une idée, tandis que les mots représentent non-seulement le son, mais aussi l'écriture ; mais, dans quelques cas, mot se prend pour paroles, et il en devient synonyme : S'exprimer en peu de mots ou en peu de paroles.

+

27Le mot de la fin, le mot, le trait par lequel on termine un discours, un article. Ce mot-là, messieurs, je l'ai retenu parce qu'il m'a paru devoir être le mot de la fin. [Journal officiel]
28Rapprochement instantané entre deux idées dont le rapport n'était pas visible. Il y a beaucoup de mots dans cette pièce. Cette scène pétille de mots.

REMARQUE

Ajoutez :

3. Il est bon de rappeler l'idée de Bayle sur la naissance des mots. Notez que la naissance d'un mot est pour l'ordinaire la mort d'un autre ; c'est comme à l'égard des productions de la nature. [Bayle, Dict. Poquelin, note D.]

  • rechercher